Bogny-sur-Meuse : les bonbons, les Sucres Rouges de la Maison Simon perpétuent la tradition de la Saint-Nicolas

100 % ardennais, les Sucres Rouges sont connus uniquement en Champagne-Ardenne. La Maison Simon perpétue la tradition depuis 1925. Elle fabrique ces bonbons, seulement pour la Saint-Nicolas et les fêtes de Noel. Rencontre avec Thomas Coutinho, 28 ans, la 4ème génération qui assure la relève.

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Connaissez-vous les bonbons, les Sucres Rouges ? Ils sont uniquement fabriqués à Bogny-sur-Meuse (Ardennes). D'un rouge vif avec des formes spécifiques et fabriquées dans des moules qui ont presqu'un siècle, Thomas perpétue le savoir-faire hérité de ses arrières grands-parents Lucie et Jean Simon, spécialistes de desserts assortis, de bonbons fins et confiseurs. Ils habitaient à Braux, ancienne commune française des Ardennes, aujourd'hui intégrée à Bogny-sur-Meuse.


Thomas manie toujours les moules en métal argenté en zamak, réalisés par son arrière-arrière-arrière grand-père maternel, Ovide Hudreaux, en 1925. Thomas est la 4 ème génération. L'alliage de zinc, d'aluminium et de magnésium, employé pour la construction mécanique, résiste au temps, fidèle à la tradition de la Saint-Nicolas bien ancrée dans les Ardennes, mais aussi dans l'Est et le Nord de la France. Ce mélange chaud est coulé dans des moules en forme d'animaux, personnages et de différents objets.


Quand on les a goûtés, on ne s'en passe plus 

" Je suis né dans ces bonbons. Tout petit, mon grand-père m'emmenait dans son atelier. J'ai toujours eu droit à mon coq en sucre rouge, mais le produit phare reste celui du Saint-Nicolas". La clientèle de Thomas est composée de particuliers et de boulangeries uniquement situées en Champagne-Ardenne. Les particuliers sont tous des expatriés qui passent commande pour avoir leurs friandises à cette époque de l'année.

" Quand on a goûté aux sucres rouges, on ne peut plus s'en passer" prévient Thomas. Ils se dégustent en les laissant fondre dans la bouche, et peut avoir un petit goût de la pomme d'amour, mais pas que... En fait, il faut les goûter pour le savoir." Un goût qui rappelle celui de la fête foraine et qui n'est pas dû au hasard. Ses arrière-grands-parents étaient en effet confiseurs forains. "Des bonbons, ils en ont créés de toutes sortes" souligne Thomas.

Les Sucres Rouges sont une spécialité. C'est un mélange de sucre blanc, d'eau, de glucose et d'un colorant naturel rouge vif. Souvent associés aux sucres d'orge. Ces derniers, dont l'origine remonte à 1638, étaient fabriqués à partir d'une recette créée par des religieuses de Notre-Dame-des-Anges à Moret en Seine-et-Marne. La différence réside dans l'ajout d'extrait d'orge. Mais cet orge ne se retrouve pas dans les sucres rouges de la Maison Simon. La recette a été élaborée par les grands-parents de Thomas, cuiseurs de sucre à l'époque. Ils ont inventé ce goût unique.

À cela, s'ajoute l'importance de fêter Noël à l'époque. "En 1925, le père Noël n'existait pas" rappelle Thomas. Les gens fêtaient la Saint-Nicolas, le premier week-end de décembre et puis c'est tout ça s'arrêtait là. C'est comme ça que mon grand-père me racontait Noël" se souvient-il.

Il aura fallu attendre 1931 et la publicité pour promouvoir la boisson Coca-Cola pour retrouver le Père Noël qui est toujours représenté de la même manière avec l'arrivée des cadeaux sous le sapin la nuit du 25 décembre.
 

Moi, mon cadeau, c'était mon sachet de bonbons avec des sucres rouges dont un grand en forme de coq, des nonnettes aussi et des petits chocolats. Et chaque année, j'ai encore droit à mon sachet. Même à 28 ans

Thomas Coutinho


"Pour moi, Noël, c'est la Saint-Nicolas" précise Thomas. Il a le fameux moule qui symbolise ce personnage. Thomas s'aperçoit avec satisfaction que cette tradition n'est plus vraiment d'actualité à Paris, mais qu'elle perdure dans le Grand Est et Le Nord. "Ma copine, Maïwenn, qui est du Nord, connaît très bien la Saint-Nicolas, c'est une tradition présente aussi dans les pays transfrontaliers comme l'Allemagne, la Belgique ou le Luxembourg et des Pays-Bas".
 

Je me souviens, petit, de l'histoire du père fouettard, des personnages, de Saint-Nicolas. Et j'ai à cœur de faire perdurer cela pour les expatriés des Ardennes qui adorent cette fête. Les commandes de la boutique n'ont jamais cessé à cette période de l'année.

Thomas Coutinho


"Chaque année, ma grand-mère venait ouvrir l'atelier de septembre à décembre pour fabriquer ces bonbons, car les Sucres Rouges, c'est la Saint-Nicolas et les autres personnages symbolisent les fêtes de Noël" explique-t-il.


100 % ardennais 

Véritable tradition Ardennaise depuis 1925, ce savoir-faire existe depuis 4 générations au sein de la famille Simon, maintenant installée à Bogny-sur-Meuse dans les Ardennes. Cette tradition était très importante dans la vallée de la Meuse. Il n'y avait pas de "Saint-Nicolas" sans "Sucres Rouges". 

"J'ai voulu prendre la relève de ma grand-mère, car ni mes parents, ni mes deux frères, tous installés à Paris, comme moi, n'ont souhaité poursuivre la fabrication de ces bonbons" explique Thomas. 

Depuis 2017, il vient chaque année, à Bogny-sur-Meuse. Il s'installe de septembre à fin décembre pour fabriquer ses Sucres Rouges sous l'oeil attentionné de sa grand-mère Jeanine qui vient encore parfois.

"Ma grand-mère vit ici depuis qu'elle a pris sa retraite. Elle avait dû quitter la région pour travailler et elle avait laissé mon arrière-grand-père Constant poursuivre la fabrication de ces confiseries tout seul", raconte Thomas. "Mon arrière-grand-père, a arrêté son métier de forain pour se fixer à Braux en 1958 et se consacrer uniquement à la production de ses bonbons"  explique-t-il.
 
 

Une histoire de famille

De septembre à St Nicolas, la production allait à bon train. Mais en 1981, Jeannine, la grand-mère a perdu son emploi et a retrouvé un travail en région parisienne. Elle y resta pendant 20 ans. Mais elle revenait dans les Ardennes tous les week-ends lors de la saison des Sucres. Puis en 2001 dès sa retraite, elle retourna "au pays", nous laissant à Paris mes parents et nous ses petits-enfants, mais nous revenions régulièrement dans les Ardennes, précise Thomas." Je me souviens, petit, de mon arrière-grand-père, Constant, qui faisait les bonbons dans l'atelier" se remémore Thomas.

De 2001 à 2016, sa grand-mère met en marche sa fabrique de bonbons dans la deuxième quinzaine d'octobre, traditionnellement pour la St Nicolas et les fêtes de Noël. Elle décide de déménager son atelier dans son sous-sol. Dans son laboratoire, la table de travail recouverte d'une plaque de granit de 5 cm d'épaisseur est d'origine. Au dessus, un mini-palan à deux chaînes et crochets se déplace sur un rail suspendu. Le but recherché est le même, amener le récipient contenant le sucre cuit au dessus des moules pour les remplir. "Mon arrière-grand-père avait trouvé cette astuce quand il s'aperçut que le poids des casseroles devenait trop important et fatigant" explique Thomas qui a modernisé le plan il y a quelques années, car certaines parties étaient fabriquées en bois.

Elle espérait que cette tradition perdure et c'est pour, elle, que je veux prendre la relève confie Thomas. " Mais je reprends aussi le flambeau pour qu'on n'oublie pas ces sucres rouges et qu'ils ne disparaissent pas" espère le jeune-homme qui envisage de reprendre l'activité à temps plein
 
 

Les expatriés se les arrachent

D'autant qu'il possède des moules exceptionnelles qui représentent une multitude de personnages en plus de celui de Saint-Nicolas. Des danseuses qui plaisent aux petites-filles, des objets comme des pipes, des pistolets, des animaux représentant des chats, écureuils, canards, poussins, coqs, pigeons ou encore des monuments comme des églises. Sans oublier, ce moule très rare de la Tour Eiffel dont Thomas est particulièrement fier. 

Pour l'instant, le jeune homme ne peut honorer que les commandes pour les commerces de la région et les expatriés des Ardennes. Il est tout seul avec sa copine, pour fabriquer les bonbons, les emballer et les livrer en colissimo.

Il envisage de faire vivre l'entreprise partout en France et à l'étranger. D'ailleurs, il a commencé à le faire. Il envoie ses bonbons, en Espagne et en Italie, où habitent plusieurs expatriés ardennais. Ils lui commandent chaque année les fameuses sucreries qui leur rappellent leur enfance.

Thomas a un fichier client d'expatriés de 115 personnes. Cela représente une cinquantaine de commandes pour la saison. Cette année, il en a eu 35. "Moins de professionnels cette année à cause de la crise sanitaire. Certains n'ont pas osé commander par crainte" regrette Thomas même s'il les comprend.

Actuellement, il finit les commandes, en priorité celles des professionnels. Il est en rupture de stocks sur son site, mais les sucres rouges sont en vente dans les boulangeries de la région. Pour cette année, il aura produit 300 kg de bonbons. Pour connaître le prix et les points de vente, Thomas a créé un site.

"Sur place, il n'est plus possible d'en acheter" précise Thomas qui ne peut pas, faute de bras, ouvrir une boutique. Mais cela viendra, il le souhaite ardemment. 2021 sera l'année de la réflexion pour la Maison Simon.

Thomas n'a qu'un dernier message à faire passer : faire perdurer La Maison Simon, la tradition des Sucres Rouges et surtout rassurer ceux qui pensaient que ces bonbons avaient disparu. Ils sont à Bogny-sur-Meuse !




 
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