Au 21 ème jour de confinement, et en pleine épidémie de coronavirus, les jardiniers familiaux n'ont droit qu'à une heure dans les jardins ouvriers proches de chez eux. Ils attendent des jours meilleurs pour commencer vraiment leurs potagers.
Les mesures sanitaires strictes du moment nous obligent tous à rester confinés, pour le bien de chacun. L'expérience devient très vite une épreuve quand on vit dans un appartement. Et l'appel de la nature se fait de plus en plus sentir avec les beaux jours qui s'annoncent.
Mais en ville, tout le monde n'a pas le privilège d'avoir un jardin ou un potager derrière sa maison ou son logement. Le moindre carré de verdure devient alors, pour certains, un petit havre de paix bien précieux. Passer des matinées entières dans son potager ou son verger n'est toutefois possible que si celui-ci est dans votre propriété.
La sortie au jardin
Les jardins familiaux ou jardins ouvriers, sont une belle alternative pour profiter, comme un propriétaire, d'un lopin de terre à jardiner. A Charleville-Mézières, des dizaines de ces parcelles sont proposés à la location, à l'année, pour une trentaine d'euros environ. Dans le quartier de l'hôpital Manchester, on les aperçoit du haut des barres d'immeubles, au pied des cités.Ce lundi 6 avril de bon matin, il n'y a pas foule dans les petites parcelles louées. En cette belle journée de printemps, les jardiniers du quartier devraient être en pleine activité mais, en ce moment, le temps est compté. Se rendre dans les jardins ouvriers proches de chez soi, est une activité physique en quelque sorte. Sous le régime covid-19, la sortie est donc limitée à une heure.
André Haligon, 73 ans, l'a bien compris: il parcourt à grands pas son potager à la recherche de quelques bricoles à faire, le tout en 60 minutes si possible.
"Moi, je viens à pied et je n'ai droit qu'à une heure seulement !", m'annonce-t-il dépité devant le portail de sa parcelle.
Pour cet ancien boulanger à la retraite, ce jardin ouvrier à deux rangs de carottes de sa fenêtre est une aubaine, un petit paradis. "Normalement, (quand il n'y a pas de restrictions ndlr), j'arrive même à 5 h du matin. J'ai gardé l'habitude avec mon ancien métier, je me lève tôt, et je reste jusqu'à 10 h 30 au moins. Mais en ce moment avec le virus, on ne peut rester qu'une heure."
On essaie de ne pas exagérer. J'ai mon attestation de déplacement mais c'est un peu galère. Il faudrait qu'on ait une dérogation. Je n'ai pu faire que deux à trois semis de choux et de tomates dans des cagettes en plastiques, et quelques fleurs. C'est tout !
- André Haligon, jardinier amateur à Charleville-Mézières
Le jardin, un bon médicament
En levant la tête, André pourrait voir son immeuble au loin. Il vit encore avec son épouse dans l'appartement familial, un F 5, l'endroit où ils ont élevé leurs cinq fils, il y a quelques années. Ce bout de terrain à entretenir, c'est son passe-temps, son loisir principal. "Ce jardin, je l'ai depuis 12 ans !" poursuit-il en me montrant ses salades d'hiver un peu flétries. "Dans un potager, on a toujours de l'occupation. On range les outils, on bricole. Je viens régulièrement, même en hiver. Le gros du travail, c'est à partir du 15 avril en général. Là, ce sont les premières semis, les préparatifs. Le jardin, on le fait aussi pour que ça soit rentable".D'habitude, il y a deux ou trois copains qui arrivent, on discute un peu, mais là, c'est confinement. Dès que ce sera terminé, je passerai mes journées entières ici. Il faudra récupérer le temps perdu.
- André Haligon, adepte des jardins ouvriers de Charleville-Mézières
Surveillance et réglementation
Sous leurs airs bucoliques d'un début avril, les plantations du jour n'en étaient pas moins sous bonne garde ce lundi matin. Au détour d'un sentier, une patrouille de police s'était donnée une mission champêtre : contrôler les jardiniers et les promeneurs dans les allées. Dur retour à la réalité de la pandémie au covid-19. Un agent me rappelle les consignes valables dans ces jardins ouvriers de la ville. Il ne doit pas y avoir de rassemblements autres que la famille confinée dans les jardins.Il valait mieux avoir également ses papiers d'identité et son autorisation de sortie d'une heure sur soi aujourd'hui.
Ainsi, en rappel, la sortie : c'est une heure, une fois par jour et à moins d'un kilomètre.
Dans le Grand Est, les règles s'appliquent de la même façon : "L'accès aux jardins familiaux ou ouvriers reste possible pour les seules nécessités liées aux cultures potagères et dans le strict respect des mesures barrières."
Le terme "jardins ouvriers" rappelle au moins une notion importante : le travail. Une fois la précieuse parcelle attribuée par la Ville, il sera de votre responsabilité de la jardiner et de l'entretenir durant l'année de location. Le réglement intérieur confirme que le terrain pourra être remis en location si le contrat n'est pas respecté.