Dans un message posté sur le réseau social X, le parti Les Républicains s'est prononcé sur la demande de l'Algérie à la France de rendre certains biens historiques et symboliques. D'anciens membres du parti, notamment en Champagne-Ardenne, y ont vu une dérive extrémiste.
Il ne s'agissait, ironiquement, que d'un simple "message de service", mais ce message adressé par le parti Les Républicains a mis le feu aux poudres. "Message de service à l’Algérie, il faut tout reprendre, les biens et le mal : criminels, délinquants, clandestins, OQTF …"
🇩🇿 ❌ Message de service à l’Algérie, il faut tout reprendre, les biens et le mal : criminels, délinquants, clandestins, OQTF …#OneTwoThree ✈️ https://t.co/fB3zWZEaqt pic.twitter.com/pnCxhYgXAX
— les Républicains (@lesRepublicains) May 30, 2024
Ce message vient commenter un article du journal proche de l'extrême droite Valeurs Actuelles s'intéressant à une liste de biens réclamés par l'Algérie à la France dans le cadre des travaux de la commission d'historiens français et algériens sur la colonisation. En partageant cet article, les Républicains suggèrent alors que l'Algérie "doit tout reprendre : les biens et le mal". Avant de préciser leur pensée : "criminels, délinquants [et] clandestins" ainsi que les personnes frappées d'une "OQTF", une obligation de quitter le territoire français.
Une vision très restrictive de l'Algérie qui a suscité de nombreux messages d'indignation et des analyses politiques acerbes.
Une "dérive" extrémiste
Ancien membre des Républicains, le maire de Charleville-Mézières, Boris Ravignon, a semblé plus que jamais conforté dans son choix de quitter le parti aujourd'hui présidé par Eric Ciotti. Il compare sans ambiguïtés les Républicains à un "vulgaire parti d'extrême droite" et stigmatise "une dérive". "Céder à la provocation de l’Etat algérien n’est déjà pas une preuve d’intelligence. Mais jamais je n’aurais imaginé voir ma famille politique @lesRepublicains se vautrer dans l’amalgame comme un vulgaire parti d’extrême-droite. Je condamne fermement cette dérive".
Céder à la provocation de l’Etat algérien n’est déjà pas une preuve d’intelligence.
— Boris Ravignon (@boris_ravignon) May 30, 2024
Mais jamais je n’aurais imaginé voir ma famille politique @lesRepublicains se vautrer dans l’amalgame comme un vulgaire parti d’extrême-droite.
Je condamne fermement cette dérive. https://t.co/aQt0SYfAPJ
De son côté, Arnaud Robinet n'a pas réagi directement sur les réseaux sociaux au message des Républicains, mais il a répondu à un autre message sur X, posté celui-ci par la candidate de La France Insoumise Rima Hassan déclarant qu'il était "temps que la France rende à l'Algérie ce qu'elle lui doit". Le maire (Horizons) de Reims y a ajouté : "Y compris ses ressortissants sous OQTF".
Y compris ses ressortissants sous OQTF… https://t.co/gx6g0ITr5r
— Arnaud Robinet (@ArnaudRobinet) May 29, 2024
Pour le maire de Reims, il s'agit peut-être d'une référence à l'attaque de la synagogue de Rouen, le 17 mai, par un Algérien de 29 ans, sous le coup justement d'une obligation de quitter le territoire français.
Cette fermeté est assumée par cet ancien membre des Républicains, aujourd'hui engagé auprès d'Édouard Philippe dans le parti Horizons. À l'occasion des débats à l'Assemblée nationale sur la loi Asile et immigration, Arnaud Robinet s'était ainsi déjà engagé pour la renégociation des accords avec l'Algérie.
Je dis stop à l’accord migratoire avec l’Algerie de 1968 ! A un moment ça suffit, il faut dire stop! Cessons de nous faire humilier par l’Etat algérien. Les Français n’en peuvent plus. Réduire l’immigration passe par cette mesure ! Sortons du en-même-temps diplomatique pic.twitter.com/qLlvw7AIdw
— Arnaud Robinet (@ArnaudRobinet) November 30, 2023
Les Républicains ont "beaucoup changé"
Le message posté par Les Républicains s'inscrit dans un virage très droitier entrepris par la formation politique depuis de longues années. Après plusieurs défaites électorales et des affaires judiciaires, le parti s'est vu rogner son électorat au centre par la majorité présidentielle d'Emmanuel Macron et à sa droite par le Rassemblement National.
Sous l'impulsion de ses présidents successifs Laurent Wauquiez, Christian Jacob puis Eric Ciotti, les Républicains ont insisté dans leur programme sur des marqueurs bien identifiés de la droite telle que l'immigration. Une tendance de droitisation du parti qui a conduit de nombreuses personnalités à quitter le navire, comme c'est le cas par exemple de Catherine Vautrin, récemment nommée au gouvernement Ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités.
Interrogée ce vendredi matin sur France Inter sur la polémique liée au message des Républicains, l'ancienne Présidente du Grand Reims s'est contentée d'un court commentaire qui en dit pourtant très long : le parti "a beaucoup changé".
L'immigration au cœur de la campagne des Européennes
La question migratoire reste un enjeu important de la campagne actuelle pour les élections européennes. La tête de liste des Républicains Françaois-Xavier Bellamy ne s'y trompe pas, en remettant en cause le pacte asile et migration votée au printemps par le Parlement européen avec le soutien des députés européens macronistes.
Cette semaine, il a également fustigé la décision du Conseil constitutionnel de faire bénéficier de l'aide juridictionnelle aux étrangers en situation irrégulière au nom du "principe d'égalité devant la justice".
Nous demandons que la délivrance d'aides et de visas soit strictement conditionnée à la coopération des pays extra-européens au rapatriement de leurs ressortissants présents illégalement sur notre sol.
— Fx Bellamy (@fxbellamy) May 30, 2024
#GrandDebat #AvecBellamy #Européennes2024 pic.twitter.com/KuHBgIhDdG
Le scrutin du 9 juin permettra de dire si cette stratégie est fructueuse pour les Républicains qui n'avaient récolté que 8,48 % des suffrages. Ou si, comme le fustigent ses anciens membres, ces postures ne servent finalement que la cause du Rassemblement National.