L'association Ma ville à vélo 08 envisage de saisir la justice si le maire de Rethel (Ardennes) ne revoit pas son projet qui concerne la rue Jean-Baptiste Clément, à l'entrée de la ville. Elle réclame la mise en place d'aménagements dédiés aux cyclistes. Mais l'élu reste ferme.
La rue Jean-Baptiste Clément est l'une des portes d'entrée de Rethel, sous-préfecture des Ardennes. La ville, située à mi-chemin entre Charleville-Mézières et Reims, y a récemment entamé des travaux. L'objectif est notamment de renforcer la sécurité routière, selon le maire. Il est prévu d'installer un terre-plein central pour séparer la chaussée de 11 mètres de large. Une proposition qui n'est pas du goût de tous.
"Les solutions proposées ne conviennent pas du tout, parce ça devient plus dangereux pour les vélos", affirme François Malard, vice-président de Ma ville à vélo 08. " Aujourd'hui, on est dans une voie qui est assez large. Quand on a un gros camion derrière, on n'a pas vraiment peur parce qu'il a la place pour doubler".
Mais avec le nouvel aménagement, ce ne sera plus le cas, selon lui. "Il n'y aura pas la place. Donc on va se faire raser par les véhicules qui vont absolument vouloir doubler, parce que l'aménagement est long", prédit-il.
"Le maire va à l'encontre de la loi"
Son association réclame la mise en place d'une bande cyclable pour chaque sens de circulation, pour sécuriser le passage des vélos. Un courrier a été envoyé au maire il y a plusieurs semaines, il est resté pour l'instant lettre morte.
"Le maire de Rethel va à l'encontre de la loi. Donc c'est pour ça qu'on proteste. Une loi qui date de 1996 indique qu'à chaque fois qu'on transforme une rue dans une zone urbaine, on doit-on doit trouver une solution pour les cyclistes", rappelle le représentant associatif.
Mais le maire divers droite Joseph Afribo ne veut pas en entendre parler. "Ce qui a été prévu initialement sera construit", tranche-t-il. "Une piste cyclable rue Jean-Baptiste Clément n'est pas du tout pertinente, bien au contraire. Elle ne servira à rien."
Je suis un gestionnaire, l'argent ne m'appartient pas. Il appartient à la collectivité et doit être utilisé à bon escient. C'est facile de vouloir tout avec l'argent des autres.
Joseph Afribo, maire de Rethel
Alors que le conseil régional du Grand Est vient de présenter un plan vélo sur 2022-2028 doté d'un budget total de 120 millions d'euros et souhaite devenir "la première région cyclable de France" derrière l'Île-de-France, la position défendue par le maire de Rethel est qualifiée de "rétrograde" par l'association.
"On voit les politiques de tous bords ou presque, aller dans le sens des mobilités actives. À côté de cela, il y a des gens qu'on peut considérer comme rétrogrades, qui sont encore sur des schémas des années 1950", explique François Malard.
La justice en dernier recours
Après l'envoi d'un second écrit à la mairie, Ma ville à vélo 08 envisage de saisir la justice si l'élu ne revoit pas sa position. "Ce serait une première pour nous, mais on est associé avec l'association Nature et Avenir qui a tout à fait l'habitude […] Si la loi n'est pas respectée, il n'y a plus que cette solution-là", affirme le vice-président de l'association.
Le maire invite Ma ville à vélo 08 à d'abord venir le rencontrer. "Ma porte est ouverte à tout le monde. Il faut prendre rendez-vous, puis on en discute de vive voix. C'est mieux que d'avoir des missives. Je ne connais même pas ces gens."
"On ne va pas faire des pistes cyclables pour que les gens viennent se promener à vélo dans Rethel. Ce n'est pas possible […] On a tout fait pour vendre du véhicule. Il faut faire avec maintenant", poursuit-il.
Des aménagements cyclables vont tout de même être mis en place au niveau des ponts qui traversent le canal des Ardennes et l'Aisne. Les travaux doivent débuter en octobre. Des passerelles réservées aux piétons et aux cyclistes seront construites de part et d'autre des ouvrages actuels. Le projet a été présenté en conseil municipal au mois d'avril dernier.
Une solution qui va dans le bon sens pour Ma ville à vélo 08, mais qui ne sera pleinement efficace que si les cyclistes peuvent bénéficier d'aménagements en continu sur leur trajet. "Vous êtes sécurisé à un endroit, au niveau des ponts, c'est bien sûr le point le plus délicat et c'est par là qu'il faut commencer. Mais ce qui est important pour les cyclistes, c'est une continuité […] Si on sécurise, on le voit à Charleville, les gens vont se poser la question de la marche à pied ou du vélo", précise François Malard, le vice-président.
Mais le maire affirme que la traversée principale de la ville n'est pas adaptée pour être dotée de bandes cyclables. Les "rues adjacentes" doivent cependant être aménagées.
Rue Jean-Baptiste Clément, les travaux ont débuté mais sont pour l'instant arrêtés. Les agriculteurs se sont également inquiétés des conséquences de ce nouvel aménagement sur le passage de leurs engins, comme cela a été raconté par nos confrères de l'Ardennais. Joseph Afribo assure que les moissons se sont passées sans encombre.
0,8 % des actifs utilisent le vélo pour se rendre au travail à Rethel, selon des chiffres de l'Insee de 2019. Ce chiffre est de 2,3 % au niveau national.