Ardennes : un aide-soignant plaque tout pour partir en Guyane, "pour l'instant j'ai du peps et je veux devenir infirmier"

Il a décidé de quitter ses Ardennes natales pour continuer à se former dans les métiers de la santé et acquérir de l'expérience. Le 2 février 2022, Jordan Laurent, aide-soignant, sera en poste à l'hôpital de Saint-Laurent de Maroni, en Guyane, à quatre heures de route de Cayenne.

Il est à l'opposé des discours ambiants. Jordan Laurent, aide-soignant à l'hôpital de Rethel, vient de démissionner… pour continuer son parcours de soignant aux Antilles. "Je n'ai pas 20 ans de boutique, peut-être que je serai totalement aigri, épuisé par ce système désastreux dans quelques années, explique le jeune homme de 25 ans. Je comprends mes collègues, même si ces discours négatifs déstabilisent les services de soins. J'ai 25 ans, j'ai du peps et un regard plus jeune".

Pour garder ce dynamisme et ne pas être gangrené par cette morosité ambiante du milieu médical, Jordan Laurent a postulé loin, très loin de la métropole au centre hospitalier Ouest Guyanais de Saint-Laurent de Maroni, à quatre heures de Cayenne.

Réserve sanitaire de santé et missions humanitaires

Jordan Laurent débute dans les métiers de soins à la personne en 2017. Après une formation d'auxiliaire de soins en CFPPA, il travaille en Epahd quelques mois puis entre au centre hospitalier de Rethel comme ASH, agent de service hospitalier. L'année suivante, il passe son concours d'aide-soignant, le réussit et se forme durant une année avant d'intégrer à nouveau l'hôpital de Rethel, son diplôme en poche.

J'avais cette chance de partir avec la réserve sanitaire lorsque j'en avais un peu marre. Ces missions me relançaient et me permettaient de voir autres choses, d'apprendre au sein d'une nouvelle culture et d'appréhender une autre manière de travailler.

Jordan Laurent, aide-soignant ardennais

"J'ai d'abord travaillé au bloc opératoire, puis dans une dizaine de services à Rethel et à Vouziers. Je me suis aussi, à ce moment-là, inscrit pour partir avec la réserve sanitaire de Santé Publique France". C'est à ce moment-là que les missions hors de son "confort" ardennais débutent. "En mars, puis en août 2020, je suis appelé et je pars en mission en Guyane à Saint-Laurent de Maroni. J'ai travaillé en pédiatrie et aux urgences pédiatriques pour gérer la crise liée à la Covid". Durant ces expériences, le jeune soignant ardennais apprend sans doute plus qu'en quelques mois de pratique en métropole. "Mon directeur, de l'hôpital de Rethel, a signé avec la réserve sanitaire un contrat d'un an renouvelable et en 2021, je suis reparti."

Entre temps, Jordan Laurent part au Cameroun, en mission humanitaire avec l'association Lifetime Project. A Yaoundé, hébergé en famille d'accueil, il se plonge à nouveau dans une autre culture. "J'ai travaillé dans un orphelinat, au planning familial et toutes les semaines, je faisais des gardes auprès d'une structure d'accueil des enfants de la rue". Ces trois semaines de novembre 2020, lui apportent aussi énormément. Proche de la population, avec le temps nécessaire pour réaliser le travail pour lequel il était missionné. Des rencontres qui compteront, quelques mois plus tard, lorsqu'il prendra la décision de tout quitter.

2021, la démission

Dès le début de l'année 2021, Jordan Laurent est retenu parmi les 72 soignants que l'Etat français envoie à Wallis et Futuna en renfort pour tenter d'enrayer la pandémie. "Nous étions 7 à 900 personnes à postuler pour cette alerte de la réserve sanitaire et j'ai été parmi ceux-là. J'ai travaillé en réanimation et nous travaillons aussi dans des dispensaires", précise-t-il.

En Guyane, il n'y a pas cette pression hospitalière. A Rethel, je stagne. J'ai besoin de voir d'autres pathologies pour préparer le concours d'infirmier.

Jordan Laurent, aide-soignant ardennais

A son retour, il achète son appartement à Rethel, comme pour se convaincre, peut-être, que sa vie est bel et bien ici, sur ses terres natales. Pourtant, toute l'année, le jeune ardennais ne cessera ses allers et retours entre la métropole et la Guyane. Juillet, août puis septembre et octobre. Les liens se font et l'envie d'y retourner plus pressante. Et puis, il s'entend bien avec ses collègues sur place. "Plusieurs fois, la directrice de l'hôpital de Saint-Laurent de Maroni m'a proposé d'intégrer ses équipes, explique-t-il. J'avais cette chance de partir avec la réserve sanitaire lorsque j'en avais un peu marre. Ces missions me relançaient et me permettait de voir autres choses, d'apprendre au sein d'une nouvelle culture et d'appréhender une autre manière de travailler. C'est ce qui motive aujourd'hui mon départ. Apprendre plus, beaucoup plus. En Guyane, il n'y a pas cette pression hospitalière. A Rethel, je stagne. J'ai besoin de voir d'autres pathologies pour préparer le concours d'infirmier".

Le 30 décembre 2021, Jordan a donné sa démission au centre hospitalier de Rethel. "J'ai postulé au Centre hospitalier Ouest Guyanais où j'ai passé deux entretiens, un pour le pôle mère enfant et l'autre pour la psychiatrie". Candidature retenue et billet d'avion aller payé par le Centre hospitalier guyanais ! Le 31 janvier, Jordan sera dans l'avion et le 2 février en poste. Un seul petit regret : ne plus pouvoir partir avec la réserve sanitaire. "Je n'ai pas le choix, je ne pourrai plus faire ces missions ni même de l'humanitaire. Ils ont trop besoin de leur personnel"

Son contrat en Guyane se termine le 31 janvier 2023, entre temps, Jordan souhaite passer son concours pour entrer à l'école d'infirmier. "Je le passerai à Cayenne mais je reviendrai faire mes études en métropole."

Diplômé du lycée hôtelier de Bazeilles, baccalauréat puis BTS, à 25 ans, Jordan Laurent a déjà plus d'une vie dans ses bagages. Mais, aider, soigner, être aux côtés des autres, semble être celle qu'il a choisie.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité