Témoignage. "Ma vie est foutue" : un éleveur en grande difficulté contraint de vendre ses bêtes aux enchères

Publié le Écrit par Matti Faye et Sébastien Valente
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Jean Delaitre, éleveur installé dans les Ardennes, doit payer 145 000 euros à la Mutualité sociale agricole, la MSA. Une somme que le sexagénaire ne peut pas verser, lui qui vit désormais sans eau courante. Ce samedi 9 mars, ses bêtes ont été vendues aux enchères.

Pendant toute sa vie, Jean Delaitre a travaillé. Éleveur, couvreur, et même employé communal durant quinze ans à Rocquigny, petite commune des Ardennes où se trouve aussi sa petite ferme de 17 hectares. Désormais âgé de 67 ans, il espérait pouvoir enfin profiter de la retraite, mais il n’a plus rien.

Il est lourdement endetté, fiché à la Banque de France. Pour des cotisations non réglées depuis 2010, et qui ont été majorées durant toutes ces années, ses granges, ses terres, tout a été saisi. Il a vu son cheptel de 24 vaches de race charolaise lui être retiré.

En 2019, un huissier mandaté par la Mutualité sociale agricole, la MSA, lui a saisi "un peu plus de 36 000 euros", explique Jean Delaitre. Il doit toujours 145 000 euros à l'organisme. Une somme qu'il est bien sûr incapable de payer. Après trois passages devant le tribunal, il a été placé en liquidation judiciaire.

"Un système irréversible"

"Ma vie est foutue. Mon grand-père s'est déjà pendu dans la grange, je ne l'ai pas connu. Mon père est mort, j'avais quatre ans. Ça fera un de plus… que voulez-vous", confie l'éleveur, totalement dépité.

Le sexagénaire assure ne plus toucher le moindre revenu depuis 2019. "J'ai fait une demande de retraite en 2020, refusée. La MSA n'a pas voulu me la donner tant que j'avais l'exploitation. Quatre demandes de retraite refusées. Ça fait depuis 2019 que je n'ai aucune ressource. Même pas un euro."

Il n'a pas de voiture, pas de télévision ni de téléphone. Dans sa maison, l'électricité a été un temps coupée, mais est revenue. L'homme vit cependant sans eau courante.

"On était au courant depuis un petit moment. On savait que ça n'allait pas trop bien. Le monde agricole est malheureux en même temps", indique Serge Labie, le maire sans étiquette de Rocquigny.

L'éleveur, confronté aux demandes de l'administration, n'a pas agi comme il aurait dû. "Dès qu'on oublie une croix dans une case, ça formalise beaucoup de problèmes après. Jean n'a pas fait trop attention, et puis ça s'est mal passé. On s'aperçoit que pour une faute de gestion, on arrive à un système qui est irréversible", ajoute le maire.

Des élus ardennais ont été sollicités pour tenter de débloquer la situation. "Ça n'a rien donné pour autant", assure le maire. Les 24 bêtes de Jean Delaitre ont été mises aux enchères ce samedi 9 mars dans l'après-midi. Le commissaire-priseur en charge de la vente a interdit à notre équipe de tourner des images.

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