Alors qu'un foyer de fièvre catarrhale a été confirmé dans les Ardennes, le ministère de l'agriculture a décidé d'avancer la campagne de vaccination. Elle débute ce lundi 12 août 2024. Comment va-t-elle se dérouler? Sera-t-elle suffisante pour protéger les élevages français? Les professionnels répondent à nos questions.
Les éleveurs l'attendaient avec impatience dans les départements concernés par les restrictions, notamment les Ardennes et la Marne. Ils peuvent désormais vacciner leurs animaux contre la fièvre catarrhale. La campagne de vaccination, qui devait débuter le 14 août, a été avancée de deux jours face à l'expansion de la maladie. Mais plusieurs questions se posent concernant ce vaccin.
Comment ce vaccin va-t-il être distribué?
Cette vaccination se déroule par l'intermédiaire des vétérinaires sanitaires à qui les éleveurs passent commande. Eux-mêmes se chargent de demander des doses de vaccin au ministère de l'Agriculture via une plateforme appelée "Calypso".
Cette plateforme a présenté quelques dysfonctionnements à son ouverture. Ce lundi 12 août au matin, impossible pour certains vétérinaires d'y accéder: "j'étais prêt dès 7h du matin pour passer ma commande, mais ça ne marchait pas. À 10h du matin, nous nous sommes appelés entre collègues, nous avions tous le même problème" assure Alain Meyer, vétérinaire et secrétaire général du Groupement Technique Vétérinaire Grand Est.
Ils ont toutefois pu passer commande l'après-midi. Une fois la démarche effectuée, le ministère de l'Agriculture assure que les doses seront livrées dans un délai de deux à trois jours.
Comment les injections vont-elles être effectuées?
Les éleveurs ont la possibilité de vacciner directement leurs animaux. C'était une de leurs principales revendications. Cette liberté leur permet de faire des économies. Mais pour les vétérinaires, elle constitue aussi un risque: "Nous allons laisser des doses de vaccin aux éleveurs sans pouvoir s'assurer qu'ils respectent bien le protocole, notamment la chaîne du froid" remarque Alain Meyer.
Ces vaccins sont injectés en une seule dose pour les ovins, et en deux doses pour les bovins, avec un délai de trois semaines entre les deux injections. L'immunité est obtenue trois semaines après la dernière injection.
Ce vaccin est-il efficace?
Son efficacité a pu être observée dans les pays qui l'utilisent déjà, notamment en Belgique et aux Pays-Bas. La mortalité due à la fièvre catarrhale (25 à 30% chez les ovins) a chuté, devenant marginale après vaccination. Toutefois, si ce vaccin évite les formes graves de la maladie, il n'empêche pas les contaminations.
C'est bien ce qui pose problème à certains vétérinaires: "Ce vaccin a été délivré en urgence par les laboratoires face à la propagation de la maladie" souligne Alain Meyer."On ne connaît pas encore ses effets secondaires sur le long terme". Il craint notamment que ce vaccin reste inefficace face aux avortements provoqués par la fièvre catarrhale chez les femelles en gestation.
Y aura-t-il assez de doses pour tous les éleveurs?
C'est l'une des craintes des éleveurs.
Le ministère de l'agriculture affirme avoir pris les devants après l'apparition du sérotype 3 de la fièvre catarrhale aux Pays-Bas en octobre 2023. Dès le mois de juillet, il a passé une commande de vaccins auprès des deux laboratoires ayant déposé une demande d'utilisation en France.
Il dispose ainsi aujourd'hui de 600 000 doses du vaccin BULTAVO 3 (laboratoire Boehringer Ingelheim) destiné aux ovins, et 4 millions de doses du vaccin BLUEVAC 3 (laboratoire CZV) destinés aux bovins.
Bruno Faucheron, président du Groupement de défense sanitaire des Ardennes souligne que son département compte à lui seul 250 000 bovins et 40 000 ovins. "La maladie s'étend très vite, le nombre de dose suffirait pour les départements soumis à des restrictions à ce jour (12 août 2024), mais quand d'autres départements seront concernés, ça ne suffira plus". Cet éleveur craint de devoir sélectionner les animaux à vacciner.
Toutefois, le ministère de l'Agriculture assure que les stocks seront renouvelés en fonction des besoins.