Aube : vive émotion lors de la marche blanche en hommage à l’assistante sociale tuée à Virey-sous-Bar

Près d’un millier de personnes se sont rassemblées à Mergey, dans l’Aube, en hommage à Audrey Adam. L’assistante sociale de 36 ans a été tuée le 12 mai dans l’exercice de ses fonctions. Un drame qui suscite l’indignation d’une profession à bout de souffle. 

L’émotion est palpable ce samedi matin dans les rues de Mergey. C’est dans cette commune auboise qu’habitait Audrey Adam, l’assistante sociale de 36 ans tuée le 12 mai dernier dans l’exercice de ses fonctions. Son mari, ses deux enfants mais aussi des voisins, des élus, des connaissances : près d’un millier de personnes se sont donné rendez-vous, roses blanches à la main, pour lui rendre un dernier hommage. 

Dans le cortège également, plusieurs de ses collègues, encore sous le choc. Ils se souviennent d’une professionnelle très investie : “Elle était pleine de vie. C’est difficile de mettre des mots, tout de suite. Elle va nous manquer, on ne l’oubliera pas”, confie l’une d’entre elles, qui retient difficilement ses larmes. 

Audrey Adam a été tuée par balle à Virey-sous-Bar par un octogénaire à qui elle rendait sa visite mensuelle. Le retraité a ensuite retourné l’arme contre lui. Un drame qui survient sur fond de dégradation des conditions de travail des assistants sociaux. “C’est difficile, on se sent trop peu considérés, nous les travailleurs sociaux. Alors qu’on se donne beaucoup, notre métier on l’aime”, déplore une autre collègue d’Audrey Adam, présente à la marche blanche. Un malaise ressenti par l’ensemble de la profession. 

 

Un métier en souffrance

L’onde de choc a dépassé les frontières de l’Aube. Sept professionnels du secteur, originaires de toute la France, viennent tout juste de créer un collectif pour rendre hommage à l’assistante sociale auboise et alerter sur les réalités d’un métier qu’ils jugent trop souvent méprisé : “Le décès d’Audrey, ça nous a profondément touchés. Il n’y a pas eu d’écho au niveau national comme ça peut être le cas pour d’autres professionnels qui décèdent dans l’exercice de leurs fonctions. Il n’y a pas eu non plus de prise de parole des politiques, du Président, ni de notre ministre des Solidarités. Le but c’est de proposer qu’un hommage soit rendu avec l’accord de sa famille, mais surtout de faire prendre conscience de notre réalité de terrain”, détaille l'une des membres fondatrices qui souhaite garder l'anonymat.

 

Le collectif, baptisé Travail Social de Demain (TSD), est suivi par plus de 400 personnes sur Facebook. Ses membres ont également lancé il y a une semaine, une pétition qui a déjà recueilli près de 40 000 signatures. Ils s’adressent aux députés, aux ministres et au président de la République. Ils alertent sur la dégradation de leurs conditions de travail : “Nos professions font partie de celles qui ont le plus haut niveau de risques psychosociaux. Nous sommes tous les jours, menacés, insultés (...) Aujourd'hui nous avons besoin de lumière, de reconnaissance et de soutien de la part de la nation.”

 

“J'ai écrit le texte en cinq minutes, parce que moi aussi j'ai deux enfants en bas âge. Ça nous a tous beaucoup touché, on a envie de se faire entendre”, explique l'instigatrice de la pétition, membre du collectif TSD. Sous le texte, les commentaires affluent. Ils reflètent une profession au bord de la crise de nerfs. “Je signe car je suis éducatrice spécialisée actuellement en protection de l'enfant et que nous vivons des situations à risque tous les jours. Une grande pensée pour Audrey, décédée dans le cadre de ses fonctions”, témoigne une signataire. “Les médecins, les pompiers, les policiers et maintenant les travailleurs sociaux...Où va-t-on comme cela ?”, s’interroge une autre. 

 

"J'ai déjà été séquestrée"

La profession dénonce une violence accrue et des moyens trop limités pour y faire face. L'une des membres fondatrices du collectif (TSD) raconte : “La tragédie concernant Audrey, ça nous concerne tous, tous les travailleurs sociaux et ça aurait pu être n’importe lequel d’entre nous ce jour-là parce que tous les jours on est confrontés à des insultes, à des menaces. Moi par exemple, j’ai déjà été séquestrée dans un domicile, j’ai déjà été séquestrée dans le bureau du juge des enfants, c’est de la violence qu’on vit quotidiennement.” Elle a déjà dû porter plainte plusieurs fois.

Une situation qui, selon elle, s'est aggravée avec la crise sanitaire : “On sait que les difficultés des usagers que l’on rencontre sont croissantes depuis plusieurs années. La pandémie n’a fait qu’ajouter des difficultés aux problèmes déjà présents.” Aujourd'hui, les professionnels attendent une prise de conscience politique. Car au-delà des hommages et des symboles, ils espèrent faire réagir sur le manque de moyens et les conditions de travail de l'ensemble du secteur social. 

 

Vendredi 21 mai, sur Twitter, Emmanuel Macron a annoncé son souhait de créer “un statut de mort pour le service de la République” pour “les agents publics décédés dans des circonstances exceptionnelles.” Mais les travailleurs sociaux attendent davantage du gouvernement. “Ce que l'on voudrait, c’est une réflexion nationale sur ce que le travail social apporte. On est quand même un ciment pour notre société. On ne peut plus attendre un autre drame pour faire bouger les lignes”, conclut l'une des membres du collectif Travail Social de Demain. 

 

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