Francine Lebon-Melnotte a été promue Chevalier de la Légion d'honneur le 1er janvier 2022. Une distinction qui récompense son engagement associatif depuis plus de 30 ans. Et plus récemment dans l'association "Du cœur au travail", à Bar-sur-Seine (Aube).
Comme souvent en pareil récompense, Francine Lebon-Melnotte n'est pas à l'origine de la procédure pour se voir honorer de la plus grande distinction décernée à un citoyen par la République. Pour dire vrai, elle ignore totalement qui est celui, où celle, qui a déposé son nom aux candidatures pour obtenir la Légion d'honneur début janvier 2022.
Et pourtant, elle s'est pliée aux questions des enquêteurs, systématiques dans ce genre de démarche, concernant sa vie : "Il faut savoir qu'en tant que citoyen, contrairement aux militaires, il faut au moins 20 ans de services rendus à la Nation. J'en suis à plus de 30 ans aujourd'hui. Les enquêtes sont obligatoires, vous savez. Ils ont posé des questions sur mon parcours, ma famille. C'était vraiment poussé, voire un peu pénible à la fin".
Mais pour Francine, l'important est ailleurs. Même si elle accueille cette distinction avec humilité, la Légion d'honneur valorise le travail de sa vie : "Ce n'est pas une fin en soi. Mais oui, pour moi, c'est une certaine fierté, des émotions. Je donne et je donnerai encore après, car cela donne du sens à ma vie."
Trois décennies de vie associative
Il y a 20 ans, quasiment jour pour jour, en 2002, Francine recevait sa première distinction : la médaille de l'Ordre national du mérite. Un honneur qui récompense, là aussi, les services rendus à la Nation. Dans le cas de Francine, ces services ont été rendus à travers son engagement associatif.
Tout à commencé en 1989, grâce à son second fils, Olivier, alors bénévole pour les Restos du cœur : "C'est lui qui m'a poussé dans la marmite, explique-t-elle en riant. À l'époque, ma situation personnelle était compliquée. J'avais besoin d'autre chose. J'ai arrêté mon travail de dirigeante de mon entreprise d'épluchage et je me suis investie totalement dans le bénévolat pour les Restos du cœur à Bar-sur-Seine et à Troyes (Aube)."
Elle raconte aujourd'hui avec nostalgie ses premiers pas de bénévole, l'excitation de la découverte : "J'étais très emballée. C'était encore les débuts des Restos. On faisait des folies. Parfois, je passais des nuits entières à travailler pour l'association. C'était très chronophage mais aussi très exaltant. Et puis j'ai fait le tour de France avec les Enfoirés, c'était génial."
En 2003, Francine rejoint Paris, au siège de l'association, pour développer les relations avec les entreprises. Elle y restera sept ans avant de retourner chez elle, à Bar-sur-Seine (Aube), pour reprendre une association locale qu'elle renommera "Du cœur au travail", comme un clin d'œil à son passé.
"Si vous en sauvez entre cinq et dix dans une année, c'est déjà une victoire"
Dans les locaux flambants en neuf de l'association, 5 bis rue des Maquisard, Francine et les bénévoles tentent d'aider des personnes en difficulté à travers l'insertion par le travail : "Les cas de figure sont tellement différents, on a des personnes cassées par la vie, plus ou moins rebelles, certains rencontrent des difficultés humaines, d'autres personnelles. On essaye de les booster, de temps en temps cela passe par un coup de pied au derrière ou alors par de la douceur."
Heureusement, Francine peut compter sur son expérience pour gérer les situations complexes. L'association s'occupe de 18 femmes et de 12 hommes. Elle les encadre, les aide à rédiger un CV, répondre à un entretien d'embauche. Les emplois sont très différents les uns des autres, du ménage chez des particuliers, aux chantiers, en passant par l'aménagement d'espaces verts.
Avec l'expérience s'y habitue. On sème les petites graines et on espère qu'elles vont germer un jour.
Francine Lebon-Melnotte
Au quotidien, les bénévoles assurent un travail harassant de suivi, d'accompagnement, de conseil. Des efforts à l'année parfois réduits à néant. "Certaines personnes s'investissent et du jour au lendemain ne viennent plus, souvent à cause d'influences extérieures. C'est difficile à accepter. Avec l'expérience s'y habitue. On sème les petites graines et on espère qu'elles vont germer un jour. Si on en sauve entre cinq et dix dans une année, c'est déjà une victoire."
Pour continuer d'aller de l'avant, Francine s'arme de son "côté guerrier" et continue de lancer des projets. Le dernier en date : la création d'une auto-école solidaire. Si la pandémie a ralenti son développement, Francine compte bien faire progresser ce projet en 2022. Et ne lui demandez pas combien de temps elle compte continuer, car elle vous répondra avec malice : " Dieu seul sait combien de temps, je vais encore faire ça."