Le groupe Soufflet basé à Nogent-sur-Seine (Aube) a annoncé être entré en négociation avec InVivo, propriétaire des enseignes Jardiland et Gamm Vert, en vue de la vente de 100 % du capital du Groupe Soufflet. La nouvelle entité pèserait 10 milliards d'euros.
Rien n'est fait, mais l'annonce officielle d'un rapprochement entre le groupe Soufflet acteur incontournable du commerce des céréales mondial installé à Nogent-sur-Seine (Aube) et Invivo, plus grande coopérative agricole française, est un évènement dans le milieu agricole. Ce rapprochement devrait être effectif d'ici fin 2021. Les instances représentatives du personnel de chacun des deux Groupes agro-industriels ont été informées ce mercredi 13 janvier de ce projet de rachat. "Un processus d’information-consultation sera engagé rapidement. Le rapprochement entre les deux Groupes sera soumis à l’autorisation préalable des autorités compétentes en matière de contrôle des concentrations. L’ensemble de l’opération pourrait être finalisé avant la fin de l’année 2021".
Pour le secteur agricole, il s'agit d'un événement de taille. Dans un communiqué, le groupe InVivo, union nationale de coopératives agricoles françaises bénéficiant de plusieurs implantations stratégiques à l’étranger, annonce que ce rapprochement ouvrirait la voie à la création d’un champion français agricole et agroalimentaire d’envergure internationale de premier plan. "La combinaison des activités, très majoritairement complémentaires, du Groupe InVivo avec celles du Groupe Soufflet préserverait dans la durée leurs structurations par métiers, leurs cohérences, leurs positionnements et leurs identités respectives. Le nouveau groupe ainsi créé se trouverait positionné pour relever les défis de souveraineté alimentaire, de compétitivité et de développement durable de l’agriculture française et des filières agroalimentaires".
Poids total du géant : 10 milliards d'euros
Jean Rottner, le président de la Région Grand Est s'est réjoui de cette annonce. "C’est avec une grande satisfaction que j’apprends les négociations menées entre ces deux groupes emblématiques du secteur agricole et agroalimentaire. Elles contribueront sans conteste à l’attractivité et au rayonnement économique de notre Région à l’échelle internationale. Ce rapprochement répondra aux défis d’une production 100 % Made in France, respectueuse à la fois de l’environnement et du travail des agriculteurs ainsi que de l’ensemble des acteurs des filières agroalimentaires. Je salue aujourd’hui le travail et la dynamique impulsée par les deux entrepreneurs, leurs équipes et l’ensemble de leurs salariés qui permettent de faire de ce nouveau groupe un leader européen. Je tiens particulièrement à saluer leur choix de privilégier l’expertise française tournée vers l’innovation et vectrice d’excellence dans les domaines de la transition agricole et alimentaire".
Avec un chiffre d’affaires combiné de près de 10 milliards d’euros, dont environ la moitié réalisée à l’international, ce nouvel ensemble rayonnerait tant en France qu’à l’international, dans plus de 30 pays, avec plus de 90 sites industriels, dont 59 en France, et plus de 12.500 salariés. Le groupe Soufflet a racheté les boulangeries industrielles Neuhauser en juillet 2014, couvrant ainsi toute la "chaîne de valeur" du blé. Suite à cette annonce, la CGT de Neuhauser va d'ailleurs demander l'organisation d'une réunion extraordinaire avec la direction "afin d'avoir plus d'informations et connaître l'impact que cela aura..."
Histoire familiale
Cette entreprise familiale bien connue dans l'Aube, mais moins du grand public, est installée depuis sa création en 1900 à Nogent-sur-Seine. Du côté de la famille Soufflet, Michel Soufflet, 90 ans, fondateur du groupe et président du conseil de Surveillance indique que "l’empreinte et les valeurs familiales du Groupe Soufflet demeurent les atouts incontestés de notre identité et jouent un rôle crucial dans la relation de confiance que nous entretenons avec les agriculteurs, nos partenaires depuis plus de 120 ans. Avec ce projet, le Groupe pourrait ainsi continuer à servir et aider ses clients agriculteurs à se développer, comme ils l’ont toujours fait avec lui". Celui qui est considéré comme le patriarche de cette multinationale à capitaux familiaux a confié en 2001 les commandes à son fils Jean-Michel.
Le maintien de la marque Soufflet et de ses talents constituerait ainsi la "clé de voûte" de ce rapprochement qui permettrait de tirer le "meilleur des valeurs, des positionnements et des savoir-faire de chacun, au bénéfice de tous", précise le groupe agro-alimentaire. Jean-Michel Soufflet, 64 ans, président du Directoire du Groupe Soufflet, déclare que "la réussite de ce rapprochement repose sur la préservation de l’identité de chaque Groupe, en continuant à mettre en valeur leurs racines, leurs notoriétés et leurs empreintes locales comme internationales, afin de leur permettre de poursuivre leur développement respectif, au service de leurs partenaires qu’ils soient industriels ou agriculteurs, dans la logique des filières céréalières construites au fil des ans. En nous rapprochant d’InVivo, notre Groupe familial trouverait une solution franco-française pour pérenniser son identité, assurer la continuité de ses activités et préserver son ancrage nogentais et sa présence régionale".
En 2012, un laboratoire de 3000m² était inauguré à Nogent-sur-Seine au sein du groupe Soufflet. Il permet des expériences de fermentation à partir d'agro-ressources. Cette installation de 112 Millions d'euros (fonds publics et privés) a favorisé des expérimentations de fermentation en milieu solide (FMS). La fermentation en milieu solide consiste à cultiver un micro-organisme dans un milieu faiblement hydraté.
L’association des deux Groupes, Soufflet et InVivo, permettrait d’accélérer l’accès de tous les agriculteurs aux techniques les plus récentes et les plus respectueuses de l’environnement pour un déploiement à grande échelle au sein de la « Ferme France », précise le communiqué. Il n'est, en revanche, pas fait mention des éventuelles conséquences sur l'emploi de ce rachat d'un groupe de 7.000 collaborateurs dans le monde, basé dans l'Aube depuis 1946. En 2018, Michel Soufflet s'était ouvert à nos confrères de l'AFP. "Mon objectif a toujours été, depuis toujours, de rester indépendant et de n'avoir aucun associé". Sa vision a donc évolué au fil du temps. Il indiquait aussi "n'avoir jamais autant distribué de dividendes aux actionnaires, parce que de toute façon on n'a pas besoin d'argent, on n'a pas le temps de le dépenser".
Le montant de ce projet de rachat n'a pas été communiqué. Pour information, le chiffre d'affaire de la seule branche Soufflet négoce était de 1.894.098.699 euros en 2020 en augmentation constante et la branche Soufflet agriculture de 1. 338.819.292 euros. Sur l'exercice 2018-2019, le chiffre d'affaires du groupe était de 4,866 milliards d'euros.