Dans l'Aube près de Troyes, la prison de Lavau doit bientôt prendre du service. Mais à quelques jours de l'ouverture, les surveillants du syndicat Force ouvrière tirent la sonnette d'alarme. Les agents pénitentiaires alertent sur des malfaçons qui pourraient les mettre en danger.
Elle n'est toujours pas mise en service qu'elle fait déjà parler d'elle. Dans les prochains jours, vers la mi-décembre 2023, la toute nouvelle prison de Lavau (Aube) accueillera ses premiers détenus en provenance de l'ancienne maison d'arrêt de la rue Hennequin à Troyes et de région parisienne. À terme, l'établissement pénitentiaire permettra de loger 472 prisonniers.
Pourtant, selon les surveillants du syndicat FO Justice, le centre pénitentiaire dernier cri ne serait pas en mesure d'ouvrir. Selon eux, en plus des problèmes de salubrité d'un des bâtiments de la prison déjà touché par des infiltrations d'eau, la sécurité des surveillants serait remise en cause par de nombreuses malfaçons. "Les travaux sont à peine finis qu'il y a déjà des soucis d'humidité. Ça promet pour la suite", ironise Julien Decurninge, délégué régional Force Ouvrière Justice.
Malfaçons, défaut d'organisation... les problèmes s'accumulent
Une multitude d’équipements comme les portes, l'éclairage ou encore les téléphones ne fonctionneraient toujours pas correctement. Le manque de visibilité sur les cellules pour personnes à mobilité réduite mettrait en danger les agents. Idem pour les geôles du quartier disciplinaire.
"L'agencement de ces cellules est ainsi fait que si un détenu se cachait, on ne le verrait pas à travers l'œilleton", détaille Julien Decurninge."À l'isolement, ils ont carrément mis la douche à l'entrée. Certains vont en profiter pour inonder la coursive à coup sûr", redoute le syndicaliste.
Comme toutes les autres cellules de cette prison moderne, les fenêtres ne sont pas obstruées par des barreaux pour le bien-être des détenus. Seule une vis empêche à ces derniers d'ouvrir le carreau. Un détail qui inquiète les surveillants. "Vu la solidité de ces vis, je peux vous assurer qu'ils arriveront très vite à ouvrir les fenêtres pour mettre en place leur trafic", assure-t-il.
➡️ Prison de Troyes-Lavau : Ouverture chaotique. Naufrage confirmé#FO #JUSTICE #FOJUSTICEhttps://t.co/w8uAP4daF0
— FO JUSTICE (@SyndFoJustice) December 3, 2023
"On fonce droit vers la catastrophe"
Enfin, après l'avoir éprouvé pendant plus de deux mois de mise en route "à blanc", le système de rondes et de relèves mises en place par l'administration serait encore loin d'être au point. "Dans l'état actuel des choses, il faut plus de deux heures aux deux agents pour accomplir la ronde de nuit du bâtiment. C'est beaucoup trop. Il faut imaginer en plus qu'ils devront répondre à des sollicitations. Ils ne pourront pas prendre leur poste suivant dans les temps impartis et cela va désorganiser toute la prison", prévient Julien Decurninge.
Pour parer à ces situations, les agents demandent à repousser l'ouverture du centre pénitentiaire de Lavau. "Une ouverture, c'est un grand stress pour les collègues, toujours sous le choc d'avoir dû fermer leurs établissements à Clairvaux et Hennequin. Surtout avec une administration qui nous écoute à demi-mot."
Des problèmes qui font écho à ceux rencontrés au centre pénitentiaire de Lutterbach (Haut-Rhin) inauguré en 2021. Un an plus tard, un rapport du contrôleur général des lieux de privation de liberté pointait du doigt de nombreux dysfonctionnements. "On leur a dit dès le début qu'il ne fallait pas faire les mêmes erreurs. Mais l'administration n'a pas retenu la leçon. On fonce droit à la catastrophe", conclut Juien Decurninge.
L'administration pénitentiaire maintient l'ouverture en l'état
De son côté, la direction de la prison confirme que l'ouverture prochaine du centre pénitentiaire de Troyes-Lavau est bien maintenue. L'administration pénitentiaire l'assure : "Les problématiques techniques évoquées par les organisations professionnelles sont prises en compte. Des ajustements techniques sont encore en cours mais ne sont en aucun cas préjudiciables à la sécurité des personnels et des personnes détenues."