C'est une plateforme qui cartonne auprès des jeunes. Spliiit propose de réduire le coût des abonnements numériques en les partageant. Elle vient de dépasser le million d'utilisateurs. Mais la start-up, basée à Rosières-près-Troyes (Aube), est aussi dans le viseur des mastodontes du streaming comme Netflix ou Disney.
Ses fondateurs la décrivent comme le "Blablacar des abonnements numériques". Une formule qui connaît un succès fulgurant. Implantée depuis 2020 à la technopôle de l'Aube à Rosières-près-Troyes, Spliiit affiche aujourd'hui un chiffre d’affaires de 1 million d'euros. Le principe de Spliiit est simple: partager la facture d'une plateforme de musique, de vidéo à la demande ou encore d'actualité, pour réaliser des économies.
Le principe du covoiturage
Jonathan Lalinec, l'un des fondateurs de l'entreprise, prend l'exemple du détenteur d'un compte Spotify famille. "Ce compte peut être utilisé par 6 utilisateurs. Si vous n'êtes que 3 à vous en servir, il reste 3 places vacantes. L'idée est de les revendre pour faire du partage de frais, comme lorsqu'on propose un covoiturage. Donc sur un abonnement à 18 euros par mois, on met à disposition 3 places à 3 euros par mois, cela fait un gain de 9 euros".
La commission prise par Spliiit pour mettre en relation les co-abonnés est assez faible : 0,5 centimes + 5% sur chaque transaction. De quoi proposer des tarifs intéressants pour les utilisateurs.
Julien Maury, qui utilise Spliiit pour ses abonnements Netflix, Disney + et Prime Vidéo, se dit totalement conquis par le concept. "Tout se fait sans prise de tête, vous vous inscrivez via l’application, et elle s’occupe de trouver des utilisateurs qui pourront avoir accès à votre compte." Grâce à ses co-abonnés, il assure que sa facture mensuelle a été divisée par deux. "Au total, j'économise 240 euros par an, ça nous paie un bon resto".
Les étudiants ciblés par la plateforme
Cet étudiant fait partie de la population ciblée par la plateforme. "Les 18-25 ans sont ceux qui vont être le plus intéressés par notre plateforme car ce sont eux qui en ont le plus besoin" explique Romain Pellarin, chargé de service client chez Spliiit. "Par exemple, aujourd'hui, pour suivre le foot, il faut 4 abonnements, ça représente une somme de 1000 à 1500 euros par an. Ce n'est pas tenable pour un étudiant".
Pour attirer ce public, la start-up mise sur les réseaux sociaux: "pour parler aux jeunes, il vaut mieux communiquer sur Instagram que sur une chaîne de télévision" ajoute Romain Pellarin. "Mais notre meilleure pub, c'est le bouche-à-oreille".
Leader européen du partage d'abonnement
Le nombre d'inscrits, en tout cas, ne cesse d'augmenter. Début avril, la plateforme a dépassé le million d'utilisateurs. "Nous sommes aujourd'hui leader européen dans notre domaine, sachant que nous avons une dizaine de concurrents partout dans le monde" affirme Jonathan Lalinec.
Ce fondateur rêve d'expansion à l'international alors que 65% de la clientèle est française. "On est déjà très présents en Italie et en Espagne. On voudrait se développer en Allemagne et en Amérique du Sud."
Toutefois, selon Jonathan Lalinec, pas question pour l'entreprise de quitter la technopole de l'Aube où 6 salariés travaillent : "On a gagné un concours au tout début de Spliiit qui s’appelle le Plug and Start, c’est pour ça qu’on a implanté notre siège social là-bas, on a eu beaucoup d’aides de la région Grand Est depuis le début c’est pourquoi on ne voulait pas ne mettre qu’une boîte aux lettres sur place. Donc même si on se développe à l’étranger, on restera 100% français".
La start-up dans le viseur des géants du streaming
Toutefois, le développement de l'entreprise pourrait bien être stoppé par une procédure judiciaire. Depuis 2021, elle est dans le viseur des géants du streaming. " Nous avons été attaqués par une association qui regroupe les ayants droit de trois mastodontes: Disney, Netflix et Apple" explique Jonathan Lalinec. "Ils nous accusent de permettre aux utilisateurs de contourner les conditions d'utilisation de leurs services, notamment avec le terme de foyer".
Assignée en référé devant le Tribunal de Grande Instance de Paris pour "concurrence déloyale et parasitisme", l'entreprise Spliiit a gagné. "Le juge a estimé que le terme de foyer n’était pas défini dans le droit français". Alors qu'une nouvelle procédure est en cours depuis deux ans, Jonathan Lalinec se dit confiant: "après le premier procès, ces services ont changé leurs conditions générales d'utilisation en changeant le mot 'foyer' par 'adresse' et ils proposent désormais de partager un abonnement avec des options payantes. Cela va complètement dans notre sens".
Aucun doute à ses yeux quant à la décision de justice: "Spliiit était dans une zone grise à l'époque mais plus maintenant." Le jugement sera prononcé fin 2024.
Il existe par ailleurs d'autres sites qui permettent ce genre de partage :