Un album de Tintin traduit en champenois pour se réapproprier la langue

Il était temps. L’ex-région Champagne-Ardenne était la dernière à ne pas avoir son album de Tintin traduit en langue régionale. C’est désormais chose faite, grâce à la pugnacité des membres de l’association La Maison du Folklore de Champagne à Ailleville (Aube). Sortie de Los oreries d’lai Castafiore (Les Bijoux de la Castafiore)  mi-novembre.

Tout a officiellement démarré début janvier. La traduction tant attendue d’un album de Tintin en langue champenoise. "Le projet a germé ces deux dernières années, mais la traduction en elle-même a pris six mois. Normalement, il faut cinq à dix ans", souffle avec fierté Brice Roborel de Climens, président de l’association. Une prouesse que saluent les éditions Casterman, emballées par ce projet inédit en Champagne-Ardenne.

C'est l'album le plus traduit en langues régionales. Il existe 80 versions des Bijoux de la Castafiore.

Brice Roborel de Climens

Après discussions et sondages, c’est Les Bijoux de la Castafiore qui a été retenu : "c’est l’album le plus franchouillard, les mots sont faciles à traduire. Ces raisons en font d’ailleurs l’album le plus adapté en langues régionales en France, 80 versions existent", ajoute le président. Coût du projet : 30 000 euros, subventionné à hauteur de 21 000 euros par la Région Grand Est et l’Union Européennes.

Los oreries d’lai Castafiore, pour découvrir la langue régionale

Grâce aux recettes de l’album de Tintin, Brice souhaite profiter de la loi Molac ce 2021 (qui permet entre autres d’apprendre les langues régionales dans les écoles) pour toucher un public jeune, et créer un « support pédagogique et interactif ». Une bande dessinée racontant l’histoire du chat Popy et d’un rat s’exprimant en champenois sera distribuée dans les prochaines années dans les établissements de l’académie de Reims. "L'idée c'est que les enfants puissent découvrir le champenois. Il ne faut pas oublier que l'apprentissage des langues régionales est interdit depuis la 3ème République".

'Dans l’absolu, des gens qui parlent couramment le champenois, il n’y en a plus', se désole Brice Roborel de Climens. Ce n’est pas tout à fait vrai. Certains résistent et continuent de faire vivre la langue du mieux possible. Notamment ceux de l’association, c’est grâce à ces passionnés si la parution de Tintin en champenois a été possible. Comme l’Ardennais Bernard Poplineau, le président d’honneur Dominique Richard, le rédacteur en chef Jean-Louis Daudier mais aussi tous les bénévoles de la section Renaissance de la langue champenoise.

Un travail acharné pour que les 62 pages de la bande dessinée trouvent une autre aura. "Le champenois est varié, il existe plusieurs variantes. Ici nous avons voulu mettre en avant le patois de la Côte des Bar", ajoute Brice. Logique, puisque la Maison du Folklore est basée à Ailleville (Aube), en plein coeur de ce territoire viticole du sud-est du département. L’impression du tome est aussi made in Champagne-Ardenne, et actuellement en cours à l’Imprimerie de Champagne de Langres. Il est tiré à 3 000 exemplaires. Il n’y en aura pas pour tout le monde.

Un glossaire pour les mots difficiles à traduire

En lisant « agace », « su s’joque » ou encore « entousse » ( traduction en français « pie », « perchoir à pie » et « entorse »), le lecteur, bien que curieux de découvrir ce patois, pourrait être un peu perdu. Alors pour l’aider, un glossaire de 17 pages sera à retrouver à la fin de l’album, pour "les mots vraiment incompréhensibles. Mais l’idée c’est d’essayer de trouver par soi-même !" s’en amuse Brice. Défi lancé aux futurs bouquineurs. Le kinésithérapeute ostéopathe de profession souhaite, à travers ce projet et son association, défendre l’identité champenoise.

Notre but est simple : défendre la Champagne, les Champenois et l’identité champenoise.

Brice Roborel de Climens

Créée en 2017, l’association rassemble aujourd’hui 1 000 adhérents en Champagne-Ardenne. "Notre but est simple : défendre la Champagne, les Champenois et l'identité champenoise." Pari osé mais pari tenu pour Brice, qui n’a de cesse de multiplier les idées, en plus de les concrétiser. Ateliers, musique traditionnelle, jeu interactif, concours de danse folklorique, magazine trimestriel, les projets s’enchaînent dans le "Petit Moscou" (surnom d’Ailleville) afin de sensibiliser sur l’importance de conserver ce patrimoine.

Et si cela ne lui suffisait pas, Brice a une autre ambition, dédiée à sa commune de 220 habitants : celle de devenir le plus beau village de l’Aube. Pour cela, il a déjà réalisé 14 chantiers de restauration de bâtiments, en utilisant des techniques anciennes. Une motivation sans faille pour que ce village de vignerons du XIXème siècle, quelque peu laissé à l’abandon au fil des années, retrouve de sa superbe.

Los Oreries d’lai Castafiore, sortie mi-novembre. Prix : 13,50 €.

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