Ces crèches occupent parfois jusqu'à la moitié des églises. A Hengwiller et Eschbach, depuis des décennies, des passionnés consacrent des jours et des jours à la construction de crèches, pour le plaisir des autres.
C'est toujours le même rituel. Vous glissez une pièce, dans une urne en forme d'ange et, par la magie de l'électricité, tout s'allume. C'est le cas tous les jours pour des dizaines de visiteurs qui viennent voir la crèche de Hengwiller, petit village à côté de Marmoutier. Chaque allumage est accompagné de "Oh" et "Ah" d'admiration.
Il faut dire que cette crèche a de quoi surprendre. Elle occupe toute la partie gauche de l'édifice. La structure repose d'ailleurs sur les bancs de l'église. Elle fait 7 mètres de haut et près de 10 mètres de long.
Edmond Kieffer prend systématiquement une semaine de vacances, fin novembre, pour monter la structure de la crèche monumentale. Son neveu, ingénieur dans la région parisienne, en fait de même. "Nous jouons! A midi, quand les cloches sonnent, nous nous regardons toujours avec étonnement. Nous ne voyons pas le temps passer", raconte Edmond, 67 ans. Je fais la crèche depuis que j'ai 5 ans, alors faites le calcul!".
Sapins, branches, mousses, sont collectés chez les habitants de la commune. Chacun y apporte ce qu'il voudrait y trouver. Là, un renard empaillé, plus loin une reproduction de la cathédrale Notre Dame de Paris... "Nos sujets ont de tailles différentes alors nous essayons de jouer avec la perspective". Edmond Kieffer place également des miroirs pour agrandir l'espace. Une rivière, copie du Winkelbach qui coule dans le village, est reconstituée sur le plateau. La crèche est au premier plan mais des maisons à colombage sont disséminées dans ce paysage naturel qui évoque les contreforts vosgiens. "Cette crèche représente ma foi, abonde Edmond Kieffer. Noël est le temps de la joie, de la sérénité. C'est ce que je retrouve chaque année en faisant cette crèche".
Même enthousiasme à quelques kilomètres au nord de Hengenbach, dans la commune de Eschbach. Tous les jours, après l'école ou pendant les vacances, les enfants du village entrent dans l'église avec fracas. "Une année, les enfants ont construit un barrage sur la rivière. Evidemment, l'eau a débordé sur la crèche et par terre. Mais bon, j'aurais peut-être fait pareil à leur âge, nous raconte Gabriel Kempf, le concepteur et constructeur de la crèche. Je fais ça depuis 2014. Je ne pouvais plus voir l'ancienne crèche. Et mon oncle qui la faisait jusque là, m'avait demandé de l'aider. Je lui ai dit: "d'accord je la fais mais à condition qu'on enlève la vieille crèche!". Et c'est ce qui a été fait. Les nouveaux personnages de la crèche ont été offerts par une habitante du village. Tout le reste, le décor, est l'oeuvre de Gabriel Kempf.
Cet électricien de métier passe des mois à réfléchir à la nouvelle mise en scène. Il profite de ses vacances pour étudier les techniques de construction ou la forme des tuiles dans d'autres régions françaises. C'est en se documentant qu'il s'est lancé dans la fabrication de tuiles gallo-romaines qui recouvrent le toit de l'étable, de la forge et du moulin. L'électricien qu'il est a également mis en place un ingénieux système de rouages hydrauliques qui entrainent les pales d'un magnifique moulin à aube qui entraine lui-même le soufflet de la forge.
"J'ai imaginé cette scène comme si le temps s'était figé. L'enfant Jésus est né, le forgeron s'arrête de travailler, le couvreur n'a pas fini son chantier, des tuiles manquent encore sur le toit de l'étable". Tous les détails sont soignés. L'implication de Gabriel Kembs dans la construction de la crèche est telle qu'il perd chaque année quelques kilos. Trop stressé par l'enjeu et la peur de décevoir le visiteur.
Mais qu'il se rassure, cette année encore, la crèche de Eschbach comme celle de Hengwiller apportent...l'enchantement.
Les églises de Hengwiller et Eschbach resteront ouvertes tous les jours jusque fin janvier.