Quasi deux mois que la saison de la chasse est lancée pour le plus grand plaisir de ses pratiquants, sur des charbons ardents cependant. Déjà, la calculatrice est de sortie pour dénombrer les accidents et la secrétaire à l'écologie a lancé cette semaine une vaste concertation pour mieux sécuriser cette pratique ancestrale. Rencontre avec des chasseurs du côté d'Offwiller dans le Bas-Rhin, heureux mais cernés.
Bernard Pfister ne raterait une saison de chasse pour rien au monde. Adossé contre un arbre à son poste de tir, il participe ce samedi 29 octobre à une battue dans la forêt d'Offwiller, dans le Bas-Rhin, avec une trentaine d'autres chasseurs.
Tout à coup, une série de détonations retentit. "Ah, c'est sérieux, ça doit être un sanglier, quatre balles d'affilée", commente Bernard Pfister, qui a tiré son premier ongulé, il s'en souvient, un matin de juin 1954.
Un terrain de jeu de 1.800 hectares mais très réglementé. Chacun a montré patte blanche et son permis de chasse, son assurance, son gilet fluo et s'est vu longuement rappeler les règles élémentaires de sécurité. Pas question de passer pour des fous furieux de la carabine.
Pas question non plus d'envenimer une situation déjà tendue entre les différents usagers de la forêt. "Si je croise un promeneur alors qu'une battue est en cours, je vais lui expliquer les dangers et qu'il est préférable qu'il revienne une ou deux heures plus tard lorsque la chasse sera terminée, assène Bernard Pfister. On est vraiment pour le partage des lieux".
Objectif zéro accident
La société centenaire de chasse LOR (Lichtenberg Offwiller Rothbach) revendique son statut de société de chasse la plus ancienne de France. Et assure ne pas avoir recensé le moindre accident sur ses terres en un siècle d'existence.
C'est d'ailleurs l'objectif affiché du gouvernement, le zéro accident. "Mon objectif est clair, martèle Bérangère Couillard, secrétaire d'Etat à l'écologie, je veux tendre vers le zéro accident dans les années à venir et cela passera par un meilleur respect des règles, une information plus importante auprès des riverains et un meilleur partage de l’espace."
Et pour cela, le ministère a lancé le 25 octobre une vaste concertation avec les fédérations de chasse, les associations d'usagers de la nature et les élus locaux. Avec à la clé, des mesures concrètes prises par décrets ou arrêtés d'ici la fin de l'année ou au plus tard début 2023.
Parce que si le nombre d'accidents est en baisse régulière depuis 20 ans, 167 dont 31 mortels pour la saison 2001/2002 contre 90 dont 8 mortels pour 2021/2022, c'est encore trop. D'autant que 90, c'est déjà 10 de plus que la saison dernière.
Vers une demi-journée sans chasse?
Des pistes pour mieux sécuriser cette pratique sont donc envisagées. A commencer par la création possible d'un délit d'alcoolémie, avec interdiction de chasser au-delà d'un taux à 0,5g/litre de sang. L'alcool serait en effet à l'origine de 9% des accidents de chasse. "Cela fait des années que les boissons alcoolisées sont bannies de nos battues, c'est dans le règlement", tient à préciser Bernard Pfister.
Autre piste abordée : instaurer une demi-journée sans chasse et pourquoi pas le dimanche, cette journée n'est pas un sujet tabou, a d'ailleurs précisé Bérangère Couillard.
L’intégration de la règle de l’angle de tir de 30° dans les schémas départementaux de gestion cynégétique est également sur la table, c'est-à-dire la généralisation de l’interdiction du tir quand la proie se trouve dans un angle de 30 degrés sur la gauche et la droite du chasseur pour éviter de blesser d'autres chasseurs, qui sont le plus souvent les victimes des accidents de chasse.
Là encore la société de chasse LOR est formelle. "Cette règle fait partie de nos pratiques, cet angle est tabou, et si on le fixe bien, il est facile à respecter", explique Bernard Pfister. Qui va pouvoir profiter de la chasse jusqu'à la fermeture fixée au 28 février 2023.