Ce sont des témoignages directs de femmes victimes de violences intrafamiliales. Elles témoignent face caméra ou de dos et font le récit glaçant de ce qu'elles ont vécu et ce qu'elles continuent d'affronter. Face à elles, des psychologues de l'association Aide aux habitants du Bas-Rhin, qui les accompagnent dans leur reconstruction. "Tout près d'elles", un documentaire de Réjane Varrod à voir sur france.tv.
C'est une histoire de femmes : des femmes qui souffrent, des femmes qui aident. Les premières ont été victimes de violences conjugales. Les secondes les assistent dans leur reconstruction. Elles écoutent, conseillent et prennent en compte la souffrance de ces compagnes, épouses, mères, meurtries par la violence intrafamiliale. L'association Aide et intervention à domicile du Bas-Rhin a mis en place le dispositif Psy Mobile qui se rend aux domiciles de ces femmes. Une façon de prouver que leur témoignage compte.
Voici trois bonnes raisons de regarder sur france.tv "Tout près d'elles", un documentaire sans commentaire de Réjane Varrod.
1. Pour découvrir un dispositif innovant
Bien sûr, il existe un numéro de téléphone d'urgence, le 3919. Bien sûr, les associations d'aide aux victimes de violences conjugales sont nombreuses. Celles qui offrent un hébergement d'urgence, celles qui proposent une aide juridique ou psychologique et celles qui apportent tout un panel d'aides. Mais le dispositif Psy Mobile, initié par l'association SOS Aide aux habitants du Bas-Rhin procure un type d'aide supplémentaire aux victimes. Une sorte de cocon protecteur.
Comme son nom l'indique, les psychologues de ce dispositif sont mobiles, elles se rendent au domicile des femmes battues. Après un premier contact effectué à l'initiative de la personne victime, c'est l'association qui prend le relais et qui vient à elles. Une manière de montrer activement la prise en compte de la parole et de recréer un climat de sécurité dans le logement de la personne traumatisée.
Marine, une des psychologues de l'équipe, explique : "l'accompagnement à domicile, c'est aller vers la personne. Les violences conjugales, ça apporte beaucoup d'insécurité, ç'a un impact profond sur la personne qui se sent anéantie. Elle est vidée, elle n'est plus là. (...) C’est très difficile pour elle de s'extérioriser. Nous, on crée un lien de proximité et on les aide à se redonner une consistance chez elles, dans leur environnement."
L'aide se rend disponible dans le lieu de résidence de la victime. Elle n'a plus à sortir, faire l'effort de chercher du réconfort. Un plus rare et précieux.
2. Parce que les témoignages sont saisissants
Elles n'ont pas de noms ces femmes qui témoignent face à la caméra de Réjane Varrod. Elles n'appartiennent pas à une classe sociale particulière. Elles sont toutes différentes, uniques, mais elles pourraient être vous, nous pourrions être à leur place. Elles évoquent dans le détail les agressions qu'elles ont subies. D'abord sous l'effet du traumatisme puis, au fil des rencontres avec les psychologues, avec plus de recul et de netteté sur l'ampleur de leur situation dramatique.
Certaines d'entre elles ont choisi de témoigner de dos. Qu'elles se montrent ou non, toutes mentionnent la honte. Honte d'avoir attendu avant de porter plainte. Honte de la situation elle-même. Honte que leurs enfants aient été témoins de leur martyr. "Si on ne veut pas que ça se sache, on fera en sorte que ça ne se sache pas. Le déni, c'est ça qui m'a perdue" déclare l'une d'elles. Non seulement elles sont victimes, mais ce sont elles qui portent le poids de la responsabilité des actes violents de leurs conjoints. La manipulation de leurs persécuteurs est passée par là. Toute une emprise que les psychologues doivent déconstruire avec elles.
Au fur et à mesure, elles parviennent à se détacher de l'être qui les a fait tant souffrir et qu'elles continuaient à préserver au début de leur démarche. Un long chemin vers le rétablissement de leur amour-propre.
3. Pour nous mettre dans les pas de ceux qui écoutent
Réjane Varrod, la réalisatrice, nous met littéralement à la place de celles qui écoutent. Nous assistons au cheminement de toutes ces victimes qui se dévoilent face à l'écoute active des psychologues. Aucun détail des atrocités subies ne nous est épargné. Chaque sentiment ressenti, chaque épreuve supplémentaire.
Ainsi, la compassion s'installe avec cette mère qui en veut plus à son mari de l'avoir frappée en présence de son tout petit, que de l'avoir frappée tout court. Lors d'une soirée durant laquelle il s'était alcoolisé, le père de famille se soulage au milieu de la cuisine. Son fils part prévenir la maman. Devant la situation, une dispute éclate et le père frappe sa femme. "Je savais que le petit nous voyait. Ce qui m'a fait prendre conscience [de l'anormalité] c'est cette phrase du petit — je l'ai encore dans la tête - "maman, papa est en train de faire pipi dans la cuisine". Il a vu ça et je ne vois pas qu'il voit autre chose". Le révélateur à travers les yeux de son enfant.
Et comme le père de cette autre femme, nous ressentons la colère devant la situation vécue par sa fille. Avec lui, nous avons envie de crier, de nous révolter. "Tu préfères mourir ? Alors ne porte pas plainte" afin de créer un électrochoc salutaire.
Écouter ces femmes, apprendre à reconnaître les microsignes de leurs calvaires, les aider à libérer leur parole, voilà aussi une des raisons de voir ces témoignages.
En 2021 :
- 122 femmes ont été tuées par leur partenaire ou ex-partenaire
En 2020 :
139.200 femmes ont été victimes de violences commises par leur partenaire dans des procédures enregistrées par les services de police ou de gendarmerie.