Le pouvoir d’achat est au centre de toutes les préoccupations du moment. Certains n’ont pas d’autre choix que de cumuler deux emplois pour boucler les fins de mois. C’est le cas de Sophie Walter. Cette mère de famille livre des baguettes en fin de nuit et occupe un poste d’assistante de direction en journée.
Son réveil sonne à 3h15. Sophie Walter, une mère de famille de Wangen dans le Bas-Rhin, saute dans ses vêtements et part pour la boulangerie Banette de Marlenheim. C’est là qu’elle a rendez-vous pour charger sa camionnette électrique en baguettes, pains au chocolat et autres croissants.
Quarante clients à satisfaire avant 6h du matin entre Marlenheim et Wangen : telle une petite fée, elle glisse ce qui agrémentera le petit déjeuner des clients dans une boîte installée en bordure des jardins. Cela fait deux ans qu’elle travaille à tiers-temps pour Baguette Box, une société spécialisée dans la livraison à domicile de pains et viennoiseries. "J’ai postulé à l’issue d’une période de chômage. 50 jours sans revenu, c’était devenu intenable", raconte-t-elle.
Il y a deux mois, elle décroche un temps plein en CDI d’assistante de direction à l’Union départementale des pompiers du Bas-Rhin. Elle fait désormais partie des double actifs : selon les chiffres de 2018 de l’Insee, ils seraient près de 2,3 millions en France.
Un parcours en pointillé
Sophie Walter, 46 ans, a d’abord travaillé dans l’Education nationale comme, selon elle, "bouche-trou" : J'habitais dans le Bas-Rhin mais tous les remplacements que j’ai fait c’était dans le Haut-Rhin. Je connais à peu près tous les villages", reconnait-elle en riant.
Et puis sont arrivés les enfants et, avec eux, l’impossibilité de tout gérer à la fois. Elle prête main-forte à son mari dans le vignoble. Il est à la tête d’une petite exploitation de deux hectares de vignes sur les hauteurs de Wangen. "Dans les vignes, il y a du travail tout le temps. Notre production, nous la vendons à une coopérative. Ces dernières années, les prix ont chuté d’un tiers. Cela devient limite rentable". D’ailleurs, son mari est lui aussi un double actif puisqu’il travaille comme magasinier chez John Deere.
Il y a quelques temps, Sophie Walter se retrouve à devoir prendre en charge financièrement les frais de la maison de retraite de sa grand-mère. Un coup dur et une urgence à trouver de quoi remplir les caisses. Le contrat en tiers temps qu’elle décroche chez Baguette Box, cumulé à d’autres tiers temps aléatoires à l’hôpital et dans les centres de vaccination Covid, lui permettent alors de faire face.
Un peu d’oxygène
Elle gagne aujourd’hui 1.700 euros en cumulant les deux emplois : "Cette double activité était essentielle au départ. Aujourd’hui, elle me permet d’être un peu plus à l’aise".
Pour l’instant, elle garde Baguette Box car cette pluriactivité lui permet d’absorber les mauvaises surprises (une machine à laver qui flanche en période hors soldes) et d’anticiper les dépenses (elle a déjà financé le permis de conduire de sa fille et thésaurise pour son fils).
A terme, elle souhaiterait pouvoir se concentrer sur son poste d’assistante de direction : "Avec l’âge vient l’envie de se poser un peu", reconnait-elle. Mais, avant de quitter Baguette Box, elle compte former celles et ceux qui la remplaceront dans la livraison des pains et des viennoiseries.
Pluriactif : une situation d'avenir ?
En 2018, selon les données de l’Insee, plus de 2,3 millions d’actifs français cumulaient deux ou plusieurs emplois. Et selon une étude réalisée par Opinion Way pour Horoquartz, cette tendance pourrait devenir une véritable norme : 29% des salariés français seraient prêts à cumuler deux emplois.
Si ce mode de travail est le plus souvent subi pour des raisons financières, pour une partie de la population, il résulterait parfois d'un choix assumé.