Implants Essure : "combien de femmes sont encore en souffrance ?", cette association se mobilise pour informer partout en France

L'association RESIST rassemble les femmes confrontées à de lourds effets secondaires et de fortes douleurs après la pose d'implants de stérilisation. Elle souhaite une prise en compte nationale de ce problème et au minimum un courrier d'information à toutes les femmes implantées. Elles sont plus de 200 000 en France à avoir posé ces implants prévus pour être définitifs. Plus de 30 000 femmes ont déjà été explantées.

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C'est le combat de David contre Goliath. La petite association RESIST a peu de moyens, mais elle a un réseau. Alors chaque année, sa présidente Emilie Gillier parcourt la France et organise des cafés-rencontres avec des femmes explantées et implantées. L'occasion de se soutenir les unes les autres, de partager les histoires vécues et surtout des informations sur leur point commun : deux implants de 4 cm, à l'origine de douleurs, de problèmes médicaux lourds et d'une longue errance médicale.

Tout commence par une visite chez le gynécologue. Désirant une contraception définitive, ces femmes se voient proposer des implants en ambulatoire plutôt qu'une ligature des trompes qui nécessite une courte hospitalisation. Chacun des implants est composé "d'une spirale externe en nitinol (alliage nickel-titane), d'une spirale interne en acier inoxydable recouverte de fibres de polyéthylène téréphtalate (PET), de deux anneaux repères en platine et d'une soudure argent-étain", détaille le site internet de l'association.

Des métaux et du plastique qui vont parfois provoquer des allergies (aucune recherche d'allergie n'est faite avant la pose), vont se répandre dans l'organisme et commencer une intoxication. Et c'est là que les récits divergent. Certaines femmes n'ont aucuns symptômes, d'autres beaucoup. Certaines éprouvent des douleurs dans la sphère gynécologique, d'autres des problèmes de peau, des troubles digestifs, psychiques ou de motricité très handicapante, certaines souffrent de dépression, et certaines cochent toutes les cases.

Le cas de Johann, en errance médicale pendant huit ans

C'est le cas de Johann Lefranc qui a porté des implants Essure de janvier 2014 à mars 2022. Huit ans de douleurs, de handicap moteur, de troubles digestifs et de graves problèmes psychiques. "Je me suis amusée, enfin ce n'est pas le bon mot", souligne-t-elle dans un sourire, "à imprimer la liste des symptômes répertoriés par RESIST, elle fait une page et demie. Et moi, je cochais la moitié. J'ai dû acheter une canne à 42 ans, je rencontrais des difficultés à marcher sur le plat alors qu'avant, je faisais des randonnées en montagne. À la fin, j'avais même du mal à rester debout." 

Outre les problèmes de peaux et de digestion ("j'étais devenue intolérante à tout, c'était très compliqué de manger"), elle souffre de graves troubles psychiques. La quarantenaire dynamique et enjouée a cédé la place à une personne irritable, fatigable au moindre bruit, et aux états dépressifs soudains. On lui diagnostique un trouble bipolaire, on lui prescrit quantité de médicaments qui amplifient les troubles.

Et elle a failli en mourir. "J'ai fait une tentative de suicide, alors même que j'avais le rendez-vous pour l'explantation. Mais c'était devenu invivable pour moi. Je ne voulais pas mourir, mais je ne voyais plus d'issue parce que personne ne pouvait me soigner. J'ai épuisé tout mon entourage, je m'étais fâchée avec mes enfants. Les implants Essure m'ont volé huit ans de ma vie." Elle dit s'en être sortie grâce au soutien de son mari et de quelques médecins qui prennent le temps de l'écouter.

C'était devenu invivable pour moi. Les implants Essure m'ont volé huit ans de ma vie

Johann Lefranc

Explantée en mars 2022, elle revit. Deux semaines après, elle refait déjà des randonnées en montagne, abandonne sa canne. Après deux années de récupération physique et psychique, elle sait qu'elle gardera des séquelles. "Je prends encore une canne si je visite un musée, et je prends maintenant des probiotiques et des compléments alimentaires pour essayer de refaire ma flore intestinale, c'est encore compliqué, mais ça va tellement mieux. J'ai récupéré à 80%. Pour la fatigabilité, c'est encore difficile, je rentre du travail et je dors, je n'ai presque pas de vie sociale", explique cette femme souriante et dynamique, contente d'avoir pu garder son travail malgré de nombreux arrêts maladie.

Soutien des explantées aux autres femmes

L'association RESIST fédère toutes ces femmes pour les informer. Valérie Bauer a fait des kilomètres pour venir ce jour-là au café-rencontre organisé par la présidente, Emilie Gillier. Sa prise de conscience est récente. Implantée en 2009, elle a fait plusieurs épisodes de troubles cérébraux de type AVC, qui n'en sont pas. "J'ai vécu une véritable errance médicale", explique cette commerciale.

"J'ai passé tous les examens imaginables, on a cherché des problèmes cardiaques, des maladies orphelines ou génétiques, et on ne me trouvait jamais rien. À la maison, on m'appelle "Mamie t'a mal où", j'ai des douleurs partout. Alors que ce n'est pas mon caractère. Alors, on finit par ne plus en parler autour de soi."

Elle va se faire explanter en mars prochain. La présidente de l'association lui explique l'importance de demander le respect du protocole mis en place par RESIST avec des médecins, pour enlever correctement ces implants. "C'est primordial de respecter le protocole, c'est-à-dire des imageries avant, et après, pour vérifier qu'il n'y a plus de traces de l'implant. Une explantation hors de ce protocole, ce sont des risques de casse et des répercussions sur leur santé future".

L'association ne pousse d'ailleurs pas chaque femme à se faire explanter, cela dépend de chacune et du calcul bénéfices/risques. Dans certains cas, il faut même enlever tout ou partie de l'utérus, voire des trompes. Selon Emilie Gillier, "95% des femmes explantées le recommandent à d'autres femmes. Et 75% des femmes explantées voient une amélioration durable deux ans après l'opération".

La toxicité des métaux et du plastique qui composent les implants a été établie. Une étude nationale devrait débuter dans quelques semaines, pour pouvoir enfin prouver le lien entre les implants de stérilisation et les symptômes des femmes. 

Comment informer les femmes implantées ?

Une reconnaissance en affection longue durée peut être demandée auprès des médecins, pour une prise en charge des pathologies liées aux implants, y compris après l'explantatio. Mais cette information, comme beaucoup d'autres, n'est pas assez connue des professionnels de santé.

Les informations circulent entre femmes, grâce à RESIST mais pas seulement. Aucune des femmes présentes lors de la réunion n'a eu d'informations de son gynécologue ou du centre qui a réalisé l'implant. Valérie Bauer a reconnu les symptômes en lisant un article de France 3 Alsace où nous avions donné la parole à Barbara Hamm, qui elle-même nous avait contactés après avoir lu cet autre article que nous avions publié quelques mois auparavant.

Pourquoi n'y a-t-il pas de communication par les centres qui réalisent les implants ?

Emilie Gillier, présidente de l'association RESIST

Un bouche-à-oreille qui ne suffit sans doute pas à toucher toutes les femmes concernées. "Pourquoi n'y a-t-il pas de communication par les centres qui réalisent les implants", se demande Emilie Gillier. "Ils ont les coordonnées des femmes concernées, qu'attendent-ils ? Certaines CPAM ont fait des courriers de sensibilisation, mais pas toutes, l'information circule de façon très inégale sur le territoire français."

"Toutes les femmes implantées en France n'ont pas accès au même degré d'information et de sensibilisation sur la question. Combien de femmes sont encore en souffrance ? Combien ont perdu pied ?" Le ministère de la Santé a fait une publication sur son site internet, encore faut-il tomber dessus.

Dans cet article, nous avons parlé d'une tentative de suicide parce que nous avons pensé que cette information permet de faire comprendre la gravité du mal-être et du poids de l'errance médicale vécue par une femme que nous avons rencontrée. Cette information vous a peut-être perturbée, ne restez pas seul.e avec ce ressenti. N'hésitez pas à contacter Suicide Ecoute, 01 45 39 40 00.

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