Plus de 2 000 représentants des communautés alévis et kurde venus de France, d'Allemagne, de Suisse et d'Autriche ont défilé dans les rues de Strasbourg et se sont rassemblés devant le conseil de l'Europe pour dénoncer le régime du président turc Erdogan.
C'est une nouvelle offensive militaire lancée le 20 janvier dernier par le régime turc qui attise la colère des Kurdes et Alévis d'Europe : la Turquie a lancé des opérations contre la région syrienne d'Afrine pour chasser de sa frontière la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG), une organisation classée "terroriste" par Ankara mais alliée de Washington dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI).
"L'opinion publique en France et en Europe reste trop silencieuse face à la guerre lancée par Erdogan" explique une représentant de la communauté des Alévis à Strasbourg, "Et ce silence est meurtrier" ajoute-t-il. C'est pour éveiller les consciences occidentales, alerter sur la "sale guerre" lancée par le régime du président Erdogan envers la province d'Afrin et le nord de la Syrie que les manifestants, rassemblés à Strasbourg à l'appel de sept fédérations alévis d'Europe, ont voulu se faire entendre.
"La position de la France et de l'Europe sont lâches aujourd'hui", ajoute le représentant alévi. "Pour elles, ce qui se joue sur le terrain, ce n'est plus leur guerre. Et la France demande même qu'on garde ses rejetons venus s'entraîner au jihad. Pour en faire de futurs terroristes ?" Alévis et Kurdes qui défilaient ce samedi se disent également choqués de la récente invitation (début janvier) du président turc à l'Elysée.
Sur le terrain, les combats s'intensifient
Sur le terrain, l'offensive de l'armée turque, qui est entrée ce samedi dans sa troisième semaine, s'est intensifiée ces derniers jours avec des raids aériens et de violents combats frontaliers qui provoquent des milliers de déplacés. Deux personnes ont été tuées et seize autres blessées vendredi dans la chute de roquettes en provenance du nord de la Syrie sur la ville de Reyhanli, selon le gouvernorat de la province.Le Premier ministre turc Binali Yildirim a précisé vendredi, lors d'un discours télévisé, que 82 roquettes avaient été tirées sur les villes frontalières turques depuis le début de l'offensive. En comptant les victimes de vendredi, sept personnes ont perdu la vie dans ces attaques en Turquie.
Les autorités turques ont par ailleurs interpellé vendredi treize personnes accusées d'avoir soutenu sur les réseaux sociaux un texte opposé à l'opération militaire menée en Syrie, portant à plus de 300 le nombre d'arrestations pour "propagande terroriste". Dès le début de l'opération, M. Erdogan a appelé à l'uniténationale et assuré que ceux qui manifesteraient contre l'offensive paieraient un "prix très élevé".
Qui sont les Alévis ?
Les Alévis représentent une branche hétérodoxe de l'islam chiite. Cette minorité religieuse regroupe environ 15 millions de personnes en Turquie. Ils suivent des préceptes religieux très éloignés de l'Islam classique : ils ne fréquentent par exemple pas les mosquées, ne font pas le pélerinage, n'ont pas d'interdit alimentaire, pratiquent la mixité et revendiquent leur propre culture. On trouve beaucoup de leurs membres parmi les sympathisants kurdes, au sein des mouvements d'extrême gauche, au sein de syndicats et parmi les proches du Parti républicain du peuple (CHP) opposé à Erdogan.
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