"Cabossés par la vie" ou au parcours "plus ordinaire", ces enfants partagent un tour en avion et apprennent à accepter les différences

Chaque année, dans plusieurs villes françaises, l'association Rêves de Gosse offre à des enfants, ordinaires comme en situation de handicap ou d'exclusion, un tour en avion. Le but : favoriser une société plus inclusive. À Strasbourg, première ville retenue cette année, une journée de rêve s'est déroulée à l'aéroport d'Entzheim.

C'est le grand jour. Pour la première fois, Aaron et son copain Onur s'installent dans un petit avion. "Moi j'ai pas peur" assure le jeune garçon, vendredi 10 mai. Décollage réussi, ils prennent leur envol, et passent une vingtaine de minutes à tutoyer les nuages. Quelques cris, pour libérer l'angoisse, quelques virages en bonus, et c'est déjà le retour.

Les pieds à nouveau bien ancrés sur la terre ferme, les mots leur manquent. Mais les yeux qui scintillent, et le sourire jusqu'aux oreilles parlent pour eux. "Je suis content, en avion, c'était bien !" s'exclame Onur. "J'ai eu peur de tomber, mais c'était super bien" renchérit Aaron.

Tout l'après-midi, les vols s'enchaînent à l'aéroport de Strasbourg-Entzheim. À tour de rôle, 130 enfants peuvent ainsi faire leur baptême de l'air avec des copains qu'ils ont appris à connaître durant l'année. Des enfants valides, et des enfants en situation de handicap, malades ou placés par décision de justice.

Toucher le ciel du bout des doigts, c'est sympa

Julien Malbranque, pilote.

"On a des enfants de tous les horizons, qui ont parfois de grosses maladies, confie Julien Malbranque, le pilote de l'association Rêves de Gosse, initiatrice de l'événement. Ensemble dans l'avion, ils rigolent, admirent le paysage et profitent du vol. L'inclusion, l'acceptation des différences, dans un avion, on voit que ça marche."

"Car l'humain n'est pas fait pour voler. Et quand on se retrouve en vol, c'est toujours des étoiles dans les yeux, et des sensations qu'on ne retrouve pas tout seul. Quand on est jeune et qu'on n'a pas des opportunités pour voyager, toucher le ciel du bout des doigts, c'est sympa." 

Des journées de vol depuis 28 ans

Des journées de ce genre, l'association Rêves de Gosse en réalise depuis 28 ans. Son but est de contribuer à changer le regard des enfants – et des adultes – sur le handicap. A mieux accepter les différences, et montrer qu'une société inclusive est tout à fait possible.

Chaque année, l'association initie ces tours aériens à travers neuf villes de France qui ont fait acte de candidature. Et cette fois, en 2024, la tournée a commencé par Strasbourg, avec le soutien très actif de la Protection judiciaire de la jeunesse et de la Jeune chambre économique.

Les enfants ont reçu le message cinq sur cinq. Maud raconte comment, avec d'autres, elle a "survolé des collines, ça a été un peu turbulent, mais ça allait." Elle estime que "Rêves de Gosse, c'est une association qui fait que des enfants extraordinaires, handicapés, rencontrent plein de monde, et voient comment se passe le monde avec les enfants ordinaires."

Manavi, elle, "pense que l'association est bien pour connaître d'autres personnes." Même si son expérience en avion lui a fait "très peur" au début. "Mais ensuite, dans les airs, je me suis dit que je n'ai plus besoin d'avoir peur, philosophe-t-elle. Parce qu'on ne peut plus faire marche arrière."

Venu à Entzheim pour l'occasion, Jean-Yves Glémée, le président fondateur de Rêves de Gosse, se souvient avec émotion des débuts de son association, et du chemin parcouru : "C'est une très belle aventure qui maintient en bonne forme, assure-t-il. Je pilotais sur le Toulouse-Saint-Louis-du-Sénégal, sur les traces de l'aéropostale, de Mermoz, Saint-Ex, etc. J'ai vu beaucoup de misère en Afrique. Et avec un collègue, on s'est dit qu'on allait mettre notre passion de l'aviation au service de ces enfants."

La rencontre entre des enfants ordinaires et des enfants cabossés par la maladie ou par la vie

Jean-Yves Glémée, président-fondateur de Rêves de Gosse

Pour lui, le maître-mot reste la rencontre. "La rencontre entre des enfants qui ont un parcours ordinaire et des enfants qui ont un parcours extraordinaire, qui sont cabossés par la maladie, l'autisme, la leucémie, ou cabossés par la vie. Et on ne peut pas dissocier ces deux mondes quand on fait ces manifestations."

Son objectif est de "faire briller les yeux de ces enfants ordinaires et extraordinaires. En leur permettant de laisser au sol les entraves qu'ils ont sur la terre. C'est le plus important."

L'essentiel se joue en amont

Mais ce tour en avion n'est que le point d'orgue d'un processus pédagogique de plusieurs mois. En effet, dans un premier temps, les villes sélectionnées par l'association Rêves de Gosse doivent organiser des rencontres inclusives entre des enfants "ordinaires" et "extraordinaires". Ainsi, depuis décembre dernier, la Jeune chambre économique de Strasbourg a-t-elle contribué à mener un projet pédagogique avec des élèves d'instituts spécialisés et d'écoles de l'Eurométropole.

"On a fait ce projet avec toute une classe et c'était très chouette, assure Aline, l'une des enseignantes participantes. Diverses activités, dont des ateliers de cuisine, ont renforcé les liens entre les enfants. Un très beau lien a pu se construire avec mes élèves."

"C'est une belle année, avec plein de choses partagées avec des enfants différents, approuve Perrine, une maman d'élève. Ça les ouvre sur le monde, pour accepter des gens pas comme eux, sans en avoir peur (…) Et ce vol, c'est vraiment un rêve qu'ils vivent là. Monter en avion, partager tout ça, c'est chouette."

Même enthousiasme chez les papas. Même si Julien, "super content" pour son fils, avoue malgré tout "une petite appréhension" de le voir monter dans un avion sans lui. Mais Hassan, lui, prévoit déjà le retour, et prédit qu'il "va en entendre parler longtemps, à la maison. Car cette journée, leur fera des souvenirs, et des rêves."

Après ce début strasbourgeois, l'équipe de Rêves de Gosse va s'envoler de ville en ville, jusqu'à Perpignan, le 18 mai prochain. Pour offrir, comme chaque année, du bonheur à 1 500 enfants.

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