Fondée en 2020, bioSelvans souhaite aider les femmes atteintes du cancer du sein souffrant de brûlures post-radiothérapie. De ses tests au Chili jusqu'à Strasbourg, la start-up veut proposer sa crème au plus grand nombre mais a besoin de financements.
"On était un groupe de Français basés en Suisse et SEMIA, l’incubateur strasbourgeois, nous a contactés pour qu’on présente notre produit." C'est à ce moment que débute l'aventure pour Edward Starckmann, cofondateur de bioSelvans.
Au centre de ce projet se trouve une crème bien particulière. L'entreprise élabore un produit anti-inflammatoire assez puissant pour soulager les douloureuses brûlures des radiothérapies que peuvent subir les femmes atteintes du cancer du sein. "La problématique existe depuis longtemps mais n'est pas assez considérée", explique Edward.
Grâce aux subventions de la région et de la BPI (Banque public d’investissement), la start-up réalise de premiers tests au Chili, là "où la préparation magistrale est développée". Les résultats sont concluants et le produit est alors commercialisé dans le pays sud-américain. Néanmoins, l'objectif de bioSelvans reste inchangé, l'entreprise veut répondre au plus vite à la demande française.
À l'origine, une molécule prélevée dans le mélèze
Pour soulager au mieux les radiodermites, Edward Starckmann et son équipe cherchent un principe actif le plus anti-inflammatoire possible. Ils pensent alors à la dihydroquercetin (DHQ). Cette molécule, prélevée dans le bois des mélèzes, est connue des pharmaciens mais n'était utilisée qu'à petite dose sous forme de compléments alimentaires.
BioSelvans imagine donc son utilisation par voie cutanée. L'entreprise teste avec succès le principe actif sur 30 patients, dont 27 femmes souffrant de douleurs importantes post-radiothérapie et 3 hommes irrités au niveau du cou et de la tête. La crème convainc le dermatologue chilien en charge du projet, à tel point qu'il demande la mise en circulation expresse du produit pour répondre à la demande locale.
Le produit est enregistré comme cosmétique. Selon son cofondateur, cela permet à bioSelvans un gain de temps et d'argent considérable. "Si nous avions voulu enregistrer notre produit en tant que médicament, l'opération aurait pris dix ans et nous aurait coûté plusieurs millions d'euros." Les différentes subventions proposées par l’incubateur et la région sont néanmoins limitées pour développer la crème en France.
Une opération de crowdfunding lancée
Pour l'heure, la start-up strasbourgeoise doit s'approvisionner en Russie pour obtenir sa molécule DHQ. Le pays est un des rares à produire le principe actif naturellement. "Ça nous dérange car on aimerait rendre cette crème la plus propre possible, en la produisant localement", confie Edward. BioSelvans souhaite ainsi synthétiser la molécule en France, plus précisément à Clermont-Ferrand, où se trouve une entreprise spécialiste en la matière.
Mais pour ce faire, elle a besoin de financements à hauteur de 150 000 euros. "Cette somme nous permettrait d'enregistrer la crème en France mais aussi de pouvoir synthétiser la molécule localement." Une cagnotte en ligne a été lancée pour soutenir le projet. La start-up doit commander 10 000 tubes, soit le nombre minimum requis par le fabricant, pour véritablement lancer sa crème anti-inflammatoire sur le marché français.
D'autres traitements proposés sur le marché
Si l'élaboration d'une crème à base de dihydroquercetin est une première pour le marché français, plusieurs produits existent actuellement pour soulager les radiodermites. Des solutions hyaluroniques comme le Ialuset, ainsi que des produits homéopathiques comme la pommade au Calendula peuvent être prescrits.
La crème de bioSelvans, en tant que cosmétique, n'est pas remboursable par la sécurité sociale. Pour le cancérologue Jean-Philippe Wagner, cela pourrait être un frein à son développement. "Les patients cherchent très souvent des produits pris en charge à 100%", explique-t-il. "Actuellement, seuls deux produits sont remboursables, le Ialuset et le Dexeryl". Mais Edward Starckmann l'assure, sa crème répond à une demande bien réelle et trop peu mise en avant.
Pour rappel, chaque année, plus de 50 000 nouveaux cas de cancer du sein sont diagnostiqués en France. Dans 90% des cas, la radiothérapie est prescrite comme traitement. Ce dernier, bien qu'éprouvant, fait passer le risque de rechute de 30 à 3%.