L'écrivain Marcel Nuss est décédé mardi 13 février. Touché par une maladie génétique qui le rendait tétraplégique, il était une figure du militantisme pour la reconnaissance d'une vie sexuelle pour les personnes handicapées en France.
Condamné à rester toute sa vie en fauteuil, il faisait de son handicap une force. Et quelle force. Marcel Nuss a consacré sa vie à améliorer celle des personnes handicapées. Ce militant alsacien a notamment lutté pour la reconnaissance d'un droit à l'accompagnement sexuel.
Il fonde l'Association pour la promotion de l'accompagnement sexuel (Appas) en 2015. Elle est à ce jour le seul organisme qui forme en France des accompagnants sexuels et les met en relation avec des personnes à mobilité réduite.
Mardi 13 février, le jour de ses 69 ans, Marcel Nuss est décédé dans son domicile à Montpellier. Écrivain, poète, conférencier, mais aussi père de famille, il laisse derrière lui un héritage fort dans la lutte pour les droits des personnes handicapées.
Une vie dédiée aux autres
Marcel Nuss était atteint d'une amyotrophie spinale, une maladie héréditaire qui entraîne une fonte des muscles. À ses 17 ans, il se retrouve presque entièrement paralysé. S'il souhaitait devenir avocat, son handicap le pousse à revoir ses plans. Il prend très vite le chemin du militantisme, toujours à la recherche du progrès. "Je pense qu'à force d'être enfermé dans un corps, on a un sens très aigu de la liberté", confiait en 2015 l'Alsacien à l'AFP.
En 2002, Marcel Nuss se rend, avec cinq autres personnes handicapées, devant le ministère pour faire une grève de la faim. L'objectif est alors d'obtenir la prise en charge d'un accompagnement jour et nuit. L'action est médiatisée, à tel point qu'elle parvient à l'oreille de Ségolène Royal, ministre déléguée aux Personnes handicapées de l'époque, qui reçoit les grévistes. Ces derniers obtiennent rapidement la reconnaissance officielle du "droit à l'autonomie des personnes lourdement dépendantes".
Cela ouvre la voie, trois ans plus tard, à l’adoption de la Prestation de compensation du handicap (PCH). "C’est de ce combat que viendrait la reconnaissance des aidants familiaux", considère Brigitte Jaggy, mère d'une fille polyhandicapée et proche de Marcel Nuss. Une première victoire pour le Strasbourgeois, sûrement pas la dernière.
La sexualité pour tous
Son combat le plus prenant reste sans nul doute celui du droit à une vie sexuelle chez les personnes handicapées. En France, les gouvernements successifs l'assimilent à de la prostitution. Pas pour Marcel Nuss. En 2007, il co-fonde le Collectif handicaps et sexualités (CHS). Il y défend le droit à une assistance sexuelle. Il fonde par la suite l'Appas, dont il était le président jusqu'à son décès. La première formation est donnée en 2015 à Erstein dans le Bas-Rhin.
C'est justement avec une accompagnatrice sexuelle, Jill, de 30 ans sa cadette, qu'il se remarie en 2015. Elle le suit dans tous ses combats, notamment pour la légalisation de l'assistance sexuelle.
Le thème de la sexualité revient régulièrement dans ses ouvrages. En 2014, il publie "Libertinage à Bel amour", un roman érotique où il décrit les fantasmes sexuels présents chez une personne handicapée. Un an plus tard, il rédige "En dépit du bon sens", une biographie où il dépeint son épanouissement sexuel malgré son plurihandicap.
Peu à peu, la question de la sexualité chez la personne handicapée revient sur le devant des discussions. "Il a montré que le handicap n’est pas une fatalité", raconte Brigitte Jaggy. Si l'assistance sexuelle n'est toujours pas légalisée en France, elle tend à le devenir. En témoigne la saisine en 2020 de Sophie Cluzel, alors secrétaire d'État au Handicap, qui militait pour une reconnaissance de l'assistance sexuelle.
En 2023, le Conseil national consultatif des personnes handicapées publie des propositions sur la vie intime, affective et sexuelle des personnes en situation de handicap, où figure notamment l’expérimentation de l’assistance sexuelle. Des avancées dont le crédit revient, en partie, à Marcel Nuss.