Nouvelle convocation au Tribunal administratif de Strasbourg ce mercredi 10 juillet, pour deux cents migrants et les associations qui les aident. Les convocations pour audience se suivent et les conséquences se répètent : les campements sont démantelés et se reconstituent.
Une soixantaine de migrants et des associations humanitaires ont repris le chemin du tribunal administratif de Strasbourg ce mercredi 10 juillet 2024. Parmi eux, beaucoup de familles avec des enfants.
Tous viennent du campement du Krimmeri, en face du stade de la Meinau. Il s'est constitué en novembre 2023. Les personnes qui s'y sont installées fuient leurs pays, la misère et la guerre. Elles y ont passé l'hiver dans des conditions continuellement dénoncées par les associations humanitaires.
Le 19 avril, le campement a été démantelé sur ordre de la préfecture et demande de l'Eurométropole de Strasbourg. Certains migrants ont été hébergés un temps dans des gymnases et centres d'accueil ponctuel, d'autres ont migré quelques mètres ou kilomètres plus loin, et sont finalement revenus au même endroit. Ils attendent que leurs dossiers de demande d'asile ou de réfugiés soient traités et ne connaissent pas d'autre endroit où aller.
Médecins du monde, la Fondation Abbé Pierre et Les Petites roues, dénoncent une situation inhumaine. "Depuis 11 semaines, ces personnes, parfois gravement malades, vivent sous tente dans des conditions sanitaires indignes et dans une promiscuité alarmante. Elles n’ont qu’un point d’eau, ce qui est inadapté pour 200 personnes. Les toilettes, sans entretien régulier, sont insalubres. De plus, en l’absence d’interprètes, l’accès à l’information est défaillant, et l'accompagnement des personnes dans l’exercice de leurs droits très difficile."
Un schéma récurrent indigne
"Ces situations se répètent à Strasbourg depuis plusieurs mois, voire plusieurs années" soulignent les associations. "Familles à la rue sous tente, demande d’expulsion par l’Eurométropole de Strasbourg, expulsion et orientation vers un gymnase pour une orientation vers des places d’hébergement inadaptées ou en rotation. Les mêmes personnes et familles se retrouvent à la rue. Ce cercle indigne doit cesser !"
Les représentants des associations humanitaires sont las de ces situations qui n'apportent pas de réelles solutions aux personnes concernées. Préfecture et Eurométropole de Strasbourg se renvoient la question, mais " il faudrait des solutions pérennes", insiste Sabine Carriou, présidente de l’association Les Petites Roues. Pour les avocats des associations : "Des mesures politiques d’envergure s’imposent à l’ensemble des collectivités municipales, métropolitaines, et départementales, mais également et surtout à l’Etat, qui a la compétence première en matière d’accueil inconditionnel des personnes à la rue en vertu de l’article L. 345-2-2 du Code de l’action sociale et des familles, et des personnes réfugiées en vertu de l’article L. 561-14 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile."
Besoin d'une action conjointe rapide
Associations, professionnels de l’enfance, enseignants, militants et bénévoles déplorent "le manque de dialogue, de coordination et de perspectives avec les institutions concernées." Dans leur communiqué, ils demandent de façon urgente :
- Un diagnostic social conjoint Ville de Strasbourg, l'Eurométropole de Strasbourg, la Collectivité européenne d'Alsace et les Services de l'Etat dans les plus brefs délais, afin d’évaluer individuellement les situations des personnes et proposer un hébergement ou un logement adapté aux besoins des personnes.
- La Ville de Strasbourg doit permettre l’accès sans délai à des conditions d’accueil dignes sur les lieux de vie informels : accès à l’eau, toilettes en nombre proportionné aux nombres de personnes sur site, nettoyage quotidien du lieu de vie et des toilettes, ramassage des déchets, et systématiser l’usage d'interprètes, afin d’informer de façon libre et éclairée les personnes.
- Un accès au logement pour les personnes réfugiées, des collèges demandant à la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) la mise à disposition durant l'accueil des réfugiés provenant d’Ukraine.
Membres d'association et migrants se disent fatigués par ces situations qui n'évoluent pas, "mais la voix des avocats présents ce jour à l'audience doit servir à cela pour que les personnes puissent trouver des places d'hébergements d'urgence dans un premier temps, bénéficier d'un accompagnement social et d'avoir une place en hébergement social." souligne, la présidente de l’association Les Petites Roues qui apporte aussi son aide de psychologue à ces personnes en situation incertaine et précaire.
"Finalement, l'audience de ce jour était davantage axée sur la problématique de l'hébergement d'urgence que sur l'expulsion en elle-même." indique Sabine Carriou. "Les avocats ont déploré devoir passer par un RMU ( Référé Mesures utiles) pour que des personnes puissent accéder à un hébergement." Le juge fera connaître sa décision au début de la semaine prochaine.