Le 14 avril 2023, un homme est vu par un témoin en train de tabasser et de piétiner un sac dans lequel se trouve son chat, Louna. Mis en garde à vue puis placé sous contrôle judiciaire, l'homme a été jugé ce mardi 5 septembre au tribunal correctionnel de Strasbourg. Il a été reconnu coupable et condamné à 6 mois de prison ferme et 3 avec sursis pour sévices et actes de cruauté envers un animal.
"Vous ne regardez pas les photos, Monsieur ?" C'est lorsqu'elle a brandi les photos de son chat Louna tuméfié et éborgné que la présidente du tribunal correctionnel de Strasbourg a suscité une réaction chez le prévenu. Un regard qui se détourne, un signe de la tête : non, il ne regardera pas.
Ce mardi 5 septembre avait lieu le procès de cet homme qui avait été vu à Strasbourg le 14 avril 2023 par un témoin en train de tabasser et de piétiner son chat enfermé dans un sac. Il avait tenté de prendre la fuite avant que d'autres personnes ne l'arrêtent et ne le contraignent à attendre l'arrivée de la police. Le rapport médical sera sans appel : mâchoire brisée, perte d'un œil, multiples factures du crâne. L'expert a jugé qu'il y avait manifestement eu "des coups répétés et ciblés sur la zone crânienne".
Face à ces preuves, le prévenu n'a pas dévié de sa version des faits déjà donnée lors de sa garde à vue. "J'ai donné un coup de pied, c'est vrai, car le chat était très agressif, il me griffait et me blessait", s'est-il justifié devant un tribunal bondé. Cinq associations de protection animale se sont constituées parties civiles, alors que la chanteuse Nicoletta s'était émue du cas de Louna et avait demandé "une peine de prison" pour son propriétaire.
Un manque d'explications sur les raisons de sa violence
"Personne n'est dupe des mensonges de cet homme, il ne s'agissait pas d'un seul coup de pied, mais bien d'un acharnement, a estimé Denis Reins, avocat de la SPA Strasbourg, l'association qui avait pris en charge l'animal puis l'avait transféré dans une clinique spécialisée. Aujourd'hui, cet animal doit être nourri avec une sonde. On a l'habitude des cas de maltraitance animale à la SPA, mais là, on a clairement franchi une étape dans l'ignoble". Le procureur, lui, a déploré des "regrets à demi-mots qui n'ont pas le goût de la sincérité". "Je cherchais une explication à ces actes aujourd'hui, mais je n'en ai pas eu. De par mon métier, je vois tous les jours des cas violences, de meurtre, d'accidents de toute sorte, mais ça ne m'a pas empêché d'être choqué par ce que j'ai vu là. Quel homme doit-on être pour faire ça ? Quelle valeur donne-t-on à la vie ?"
Au cours de ces plaidoyers très durs, le propriétaire de Louna est resté prostré dans son blouson noir et blanc, le regard constamment tourné vers ses pieds, hochant à peine la tête pendant les traductions de son interprète (il est d'origine arménienne et ne maîtrise pas bien le français).
"Avez-vous quelque chose à ajouter, Monsieur ?", demande la présidente. Non, de la tête, les yeux comme irrémédiablement tournés vers le sol. De la honte ? C'est ce qu'a fait ressortir son avocate, qui n'a "pas contesté les faits" et reconnu que "jamais Louna n'aurait dû se trouver dans cet état". "Mais nous sommes face à quelqu'un qui n'a pas de casier judiciaire, qui a trois enfants, un poste en CDI et qui s'est bien intégré. Il a clairement pris conscience de la gravité de son acte, et c'est le but de la procédure judiciaire."
Une peine au-delà de la sanction requise par le procureur
Le tribunal a donc finalement condamné l'homme à 6 mois de prison ferme et 3 avec sursis pour "sévices et actes de cruauté" envers un animal. Le procureur avait requis 8 mois de prison de ferme. La présidente a confié que le tribunal était "inquiet" de la violence du propriétaire de Louna à l'égard "d'un animal captif et sans défense", et a assorti la peine d'un suivi psychologique obligatoire.
"Ça va au-delà de la peine requise par le procureur, nous sommes satisfaits, confie Denis Reins, avocat de la SPA Strasbourg. Il faut que ça fasse réfléchir les autres, que les propriétaires d'animaux réfléchissent et se disent : ah oui, mon animal est un être sensible et si je lui fais du mal, je serai puni. "