L'antenne Strasbourgeoise de l'association SOS Amitié fête ses 60 ans d'existence en 2024. Lors d'un séminaire organisé ce dimanche 1ᵉʳ décembre, les bénévoles ont réfléchi aux évolutions de leur mission à l'ère 2.0.
De la cabine téléphonique à TikTok, en passant par la messagerie en ligne, la façon d'apporter du soutien aux personnes en souffrance a-t-elle changé ? Du haut de ses 60 ans d'existence, l'antenne Strasbourgeoise de SOS Amitié le confirme : si les canaux d'expressions changent, les souffrances restent les mêmes.
À Strasbourg, ils et elles sont 55 bénévoles à se relayer pour prêter une oreille attentive aux problèmes des appelants, entre dépression, pensées suicidaires, rupture difficile ou sentiment de solitude. Ce premier dimanche de l'Avent était l'occasion pour l'équipe de mettre à jour leurs connaissances d'Internet pour mieux s'adapter à leur public.
"Nous sommes dans une démarche de réflexion permanente sur notre activité. Nous sommes conscients que la société évolue et que les attentes des personnes qui nous appellent ne sont pas les mêmes qu'il y a soixante ans, il est important de rester en phase avec elles", analyse Jacques Trautmann, président de SOS Amitié Strasbourg.
Cela passe par apprendre comment fonctionnent les réseaux sociaux et ce qu'ils peuvent changer dans les relations affectives aujourd'hui, notamment chez les jeunes.
Arrivée du cyberharcèlement
L'une des participantes à l'atelier avoue ne pas maîtriser toutes les spécificités d'Internet. Mais elle évoque des problématiques qui ont émergé ces dernières années lors des appels ou par messagerie : le cyberharcèlement ou bien "se faire ghoster". C'est-à-dire la fin abrupte de toute communication avec une personne, sans aucune explication.
"En dix ans d'écoute, j'ai vu l'impact des réseaux sociaux sur les appels, témoigne la participante à l'atelier. Au bout de 20 minutes de conversation, on se rend compte que le meilleur ami dont ils parlent, ils ne l'ont jamais rencontré en vrai. Mais Internet n'est pas forcément un problème, ça peut être la solution", ajoute-t-elle, convaincue.
Se faire des amis virtuels, pourquoi pas après tout ? "On parle d'amitié digitale car avec le téléphone tout est à portée de doigts", détaille l'intervenant de la journée.
Internet c'est une nouvelle manière de tisser des liens humains, ça ne remplace pas les autres manières mais cela s'ajoute. Et les relations qui s'y créent peuvent être authentiques et enrichissantes si elles reposent sur une communication sincère et une confiance mutuelle.
Un intervenant du séminaire SOS Amitié Strasbourg
Internet est un outil accessible 24h/24, une bonne nouvelle pour des personnes en souffrance affective, ou victimes de violences diverses, qui peuvent y trouver refuge. Mais le contenu visionné sur les réseaux sociaux peut être problématique, entre promotions de l'anorexie ou contenus masculinistes. "C'est dangereux pour les ados influençables", car cela ne fait qu'alimenter la machine de leur souffrance.
Les jeunes n'aiment pas le téléphone
Autre conséquence du développement des réseaux sociaux, les jeunes générations n'aiment plus trop passer par les appels téléphoniques. Si les 15-24 ans représentaient toujours 26% des appelants en 2022, les moins de 25 ans sont encore plus présents sur la messagerie instantanée de l'association. Ils et elles représentaient 35% des messages en 2020.
Grâce à la barrière de l’écran, les jeunes se sentent souvent plus en confiance pour évoquer leur mal-être. "On apprend à faire de l'écoute par écrit, sans la voix et avec une autre temporalité, sur le fond et la forme", explique l'une des bénévoles, avant d'ajouter que "c’est différent mais pas moins efficace."
"Être présent pour les personnes en souffrance, ça n'a pas changé" et cela reste même "trop d'actualité", alerte le président de SOS Amitié Strasbourg, Jacques Trautmann.
En effet, les chiffres avancés par l'association témoignent d'une augmentation des personnes en souffrance ces dernières années. 2023 établit un record pour l'ensemble de la France : plus de 3,5 millions d'appels ont été reçus sur l'année.
Cependant, pour environ 10 000 coups de fil chaque mois en France, seulement 3 000 appels peuvent être pris. Le nombre d’écoutants reste largement insuffisant pour répondre à une telle demande et SOS Amitié recherche en permanence de nouveaux bénévoles.
Le numéro commun à la France entière : 09 72 39 40 50
L'antenne Strasbourgeoise : 03 88 22 33 33