C'est comme une crème solaire, appliquée sur des milliers de troncs d'arbres, dans l'Eurométropole de Strasbourg : un traitement testé en Alsace va être exporté partout en France, où les arbres risquent de souffrir des futures canicules.
Ce n’est pas de la peinture blanche et pas non plus de la chaux, souvent appliquée sur les troncs des fruitiers, pour lutter contre les insectes ravageurs. « Les villes qui la découvre la plébiscite, mais la recette restera secrète » précisent d’emblée les deux importateurs alsaciens du produit. C’est un produit qui n’est pas toxique comme la chaux et qui ne cause pas de tort à l’environnement selon eux. Il a été testé à Strasbourg et à Nancy et maintenant qu’il a fait ses preuves, il y est appliqué à grande échelle.
"Ici, seule la partie exposée au soleil, suite à la coupe d'un arbre voisin, a été traitée" explique Christophe Brua, naturaliste et co-déposant de ce produit de protection innovant "Ça lui offre une couche protectrice, un peu comme une crème solaire, qui va rester pendant environ cinq ans. Les lichens et le lierre pourront à nouveau y pousser et le protégeront à leur tour du soleil. Pas besoin de repeindre plus tard."
Depuis 2003, les canicules sont plus fréquentes et parfois surtout plus longues, en France. Le soleil qui darde alors ses rayons brûlants devient une menace pour les arbres et leur survie. Or les arbres, on le sait, produisent l’oxygène dont nous avons besoin pour respirer et offrent des îlots de fraîcheurs dans les villes. Sous un arbre à grande couronne, il peut faire trois ou quatre degrés de moins. Regroupés, les arbres font même baisser la température dans les milieux urbains.
A quoi sert ce blanchiment ?
Sous l’effet de la chaleur intense, la température de l’écorce des troncs augmente et finit par éclater. Un arbre sans écorce pour protéger la sève qui circule en périphérie du tronc meurt. Jusqu'ici on utilisait des canisses, de la toile de jute ou du roseau pour protéger les arbres contre la chaleur. Car la chaleur excessive du soleil peut faire grimper la température de l'écorce du double de ce qu'elle peut supporter. Des thermomètres à laser ont relevé une différence de vingt degrés entre un tronc protégé (mesuré à 25 degrés) et un tronc nu (mesuré à 45 °celsius). Les méthodes utilisées jusqu'à présent sont abandonnées au fur et à mesure pour des raisons de difficultés d'installation sur la hauteur totale des troncs et l'obligation d'utiliser des matériaux de fixation. La technique est donc aussi préférée par les responsables d'aires de jeux qui accueillent des enfants et les directeurs d'écoles pour leurs cours de récréations.
Testée pendant cinq ans sur quelques troncs, le blanchiment a fait ses preuves et il est utilisé désormais sur les 33 communes de l’Eurométropole de Strasbourg. Il a également déjà été appliqué sur les arbres de l'agglomération de Nancy et le long du Canal du Midi. Sa première vocation est de protéger l'arbre contre le soleil brûlant, mais il permet aussi de repérer rapidement la présence d'insectes ou autres nuisibles indésirables. Simplement parce qu'ils deviennent visibles, sur fond blanc.
Quels arbres sont concernés ?
A priori tous peuvent être concernés, mais ce sont d’abord les tout jeunes qui, comme les bébés, ont des peaux plus fragiles. L'Eurométropole de Strasbourg a opté pour ce traitement et on le voit apparaître notamment tout le long des nouvelles voies de tramway qui viennent d'être posées. Il permet au jeune arbre de grossir sans être entravé, comme c'était le cas auparavant avec les canisses par exemple.
"C’est comme une crème solaire pour protéger les arbres des coups de soleil" -Christophe Brua, co-fondateur de l’entreprise qui a mis le produit Elaf-flex sur le marché.
Une expérience qui va être exportée ailleurs en France
Si on ne protège pas les arbres des canicules à venir, ils vont dépérir et devront être remplacés. Ce qui représente un coût d'achat non négligeable et des dépenses élevées de main d'oeuvre. Les deux importateurs en sont bien conscients. Toutes les villes sont désormais confrontées aux chaleurs excessives pendant plusieurs semaines, quasiment chaque année. Ils seront donc présent à la convention des maires de France, Porte de Versailles à Paris, en Novembre, où ils présenteront leur "produit miracle" aux élus et où ils participeront également au prix de l'innovation, puisqu'ils l'ont déposé sous la marque Elaf-flex.
"Le point de départ de l'utilisation de ce produit, puis son application à grande échelle, s'est fait dans le parc de l'Orangerie à Strasbourg et dans l'agglomération de Nancy. Nous avons un recul de cinq ans sur son utilisation et nous pouvons le diffuser sur l'ensemble du territoire, notamment sur les arbres plantés le long du Canal du midi, classé au patrimoine mondial de l'Unesco" explique Jean-Christophe Cluzel, co-fondateur de Elaf-Solutions, basé à Illkirch-Graffenstaden.
Seul inconvénient. Il n'existe pas de machine pour couvrir les troncs. Il faut le poser à la main sur un arbre après l'autre. Cela a aussi un avantage, celui qui l'applique au pinceau peut cibler la pose précisément en fonction de l'exposition de l'arbre et éventuellement y apporter des modifications si son environnement se modifie.