Ce n’est pas un secret: quand il fait chaud, il fait deux à trois degrés de moins sous le feuillage d’un arbre qu'à côté, en plein soleil. En plus, les arbres digèrent la pollution que nous rejetons dans l'air. Alors Strasbourg plante des arbres et crée plus d'espaces végétalisés.
Oui, le végétal rend l’air plus respirable et les grandes métropoles ont commencé à le comprendre ou sont en train de le comprendre. Prendre en compte l’environnement dans les aménagements urbains devient même tendance. Tant mieux, parce que c’est une nécessité. L'Eurométropole de Strasbourg a mis en place différentes actions et plans pour rendre la vie en ville plus respirable. "Il devient de plus en plus clair qu’il faut une gestion intégrée, avec une vision globale, incluant l’air et sa pollution, le réchauffement climatique et la santé des citoyens", explique l’adjointe au maire, Christel Kohler, en charge de la nature en ville.
La végétation répond au triple enjeu: qualité de l’air, réchauffement climatique, santé des citoyens.
-Christel Kohler, adjointe à l'environnement-
Les arbres comme rempart contre la pollution
Contrairement à l’homme, qui suffoque dans les gaz carboniques, les arbres et les végétaux à feuilles (les cactus fonctionnent autrement) ont besoin de molécules de carbone, d'hydrogène et d'azote pour vivre et se développer. En un mot, ils utilisent nos rejets de gaz carbonique pour croître. Comment ça fonctionne? Les plantes chlorophylliennes absorbent le CO2 de l’atmosphère et grâce à la lumière, le transforment en composés carbonés organiques (sucres et cellulose) qui constituent leur nourriture. C’est le processus de photosynthèse, durant lequel la plante rejette de l’oxygène dans l’atmosphère, l’oxygène qui nous est indispensable pour vivre.Pour mémoire, le dioxyde de carbone, ce gaz à puissant effet de serre, est issu des combustions naturelles, comme les volcans et les incendies naturels de forêts, et des combustions provoquées, comme les activités industrielles et domestiques: nos voitures, avions, cargots etc. sont des pollueurs en chef.
En France, on déplore chaque année 67.000 morts provoquées par la pollution de l'air. Strasbourg fait partie des villes où le taux de morbidité, lié à la pollution de l'air, est trop élevé. "Il faudra pouvoir rapidement envisager une sortie du diesel à Strasbourg", selon l'adjointe en charge de la nature en ville. Ça ne va plaire à tout le monde, mais il semble impossible de rester les bras croisés.
Les arbres comme remparts contre la chaleur
L'Eurométropole de Strasbourg a opté pour la plantation de nombreux nouveaux arbres et la révision du "traitement" des arbres existants. Dans son plan 1000 arbres pour Strasbourg, l’idée est d’utiliser les deux grandes capacités des arbres: celle de "digérer" la pollution des voitures, des camions et des industries et celle de rafraîchir la ville, grâce à leur houppier ou couronne. "Notre objectif est de créer une canopée à l'échelle de la ville" explique Christel Kohler. Mais pour cela, il faut une vraie stratégie car "certaines essences d’arbres captent plus de polluants que d’autres, certaines contribuent à un meilleur rafraîchissement que d’autres, et nous devons aussi éviter les arbres allergènes, car 20% de la population française souffre d’allergie."
Une nouvelle stratégie "arbres"
Au vu de l'évolution du climat, il faut une réelle stratégie de l'arbre en ville et dans ses faubourgs. "En mauvaise santé ou en fin de vie, les essences sont moins efficaces et de surcroît peuvent devenir un danger. Il faut donc prévoir le remplacement de ces arbres (place Broglie par exemple et boulevard de la Victoire) ce qui représente toujours un traumatisme pour les populations. Il faut donc les préparer, leur expliquer qu’il faut couper pour replanter et bien sûr, on ne peut pas planter des arbres énormes, sinon ils ne prendraient pas racines. Nous devons aussi jongler entre les essences locales et l’anticipation. Il nous faudra planter des arbres venus du sud, de sorte à ce qu’ils résistent mieux aux températures élevées."Les plus petites plantes ont aussi leur rôle à jouer
Parmi les initiatives en faveur de plus de végétalisation en ville, celle qui appelle la contribution des citoyens, Strasbourg, ça pousse. Initiée en 2017, elle a déjà permis de créer 300 mètres carrés de verdure supplémentaire en ville. Plus de cent projets ont été mis en oeuvre et il est toujours possible de participer.
Il faudra "débétoniser" par endroits
Planter plus d'arbres et créer des espaces verts nécessite parfois une déminéralisation. En clair, certains endroits bétonisés dans le passé doivent être "débétonisés". Mais réduire les surfaces minérales, où la chaleur se réfléchit comme un miroir, n'est pas possible partout. Il y a les réseaux sous-terrains, les canalisations et même des parkings qui empêchent par endroit une végétalisation conséquente. Seuls des mini-aménagements de surface sont alors réalisés. Au coeur de Strasbourg par exemple, se trouve le point le plus chaud de la ville. En été, il fait jusqu'à 5 degrés de plus au milieu de la place Kléber qu'au parc des Contades, distant de quelques centaines de mètres à vol d'oiseau.L'enjeu vaut les investissements, mais de toute façon, il n'y a pas le choix
L'investissement pour "Strasbourg, ça pousse" est de 300.000 euros. L'objectif 1000 arbres dans la ville, coûtera 1,5 million d'euros, et pour ses 5000 jardins familiaux, la ville a investi 700.000 €. Mais l'Eurométropole n'a pas le choix. "Selon les mesures qui nous sont fournies par Athmo 67 (ex. Aspa), la pollution est en diminution à Strasbourg, mais la situation reste critique pour les oxydes d’azotes, pour lesquels nous sommes en dépassement et pour les particules fines, nous sommes au-dessus des valeurs maximales indiquées par l'OMS".Le plan climat 2030 de Strasbourg
Comme l'Etat a son plan Climat 2040, (le Premier ministre Edouard Philippe a tweeté à ce sujet fin mai 2019), Strasbourg a son plan Climat, mais avec un cap fixé à 2030.
Transition écologique : nous devons aller plus loin. pic.twitter.com/xLJ223gsfj
— Edouard Philippe (@EPhilippePM) 28 mai 2019
Dans son plan climat 2030, "On ne peut pas attendre 2040" dit l'adjointe au maire, Christel Kohler, l'Eurométropole prévoit, au milieu d'autres points, comme la réduction de consommation d'énergie, de mieux végétaliser la ville, d'augmenter le nombre de toitures végétalisées, d'inciter encore plus les habitants à la mobilité moins polluante, en favorisant le vélo notamment, avec 500 kilomètres de pistes et voies cyclables et les transports en commun (à quand la gratuité du tram, pendant toute les périodes de grosses chaleurs?).
Concernant les véhicules dans les zones à faible émission, limitées actuellement aux livraisons, la mesure va s'étendre à tous les véhicules. En profiteront les populations les plus fragiles, comme les enfants, les personnes âgées, celles qui sont atteintes de troubles respiratoires, mais aussi tous les habitants. Le PLU (plan local d'urbanisme), tiendra désormais compte de l'orientation des constructions. Les nouvelles écoles devront être "détournées " ou éloignées des grands axes de circulation pollués.
Les cours d'eau aussi sont de véritables contributeurs à un air plus frais et respirable en été. La piétonnisation début 2019 du quai des Bateliers, au bord de l'Ill, la rivière qui traverse la cité, doit encourager les habitants à mieux profiter du bord de l'eau en pleine ville. Un nouveau et grand parc à l'entrée de Koenigshoffen est un projet qui doit mettre en valeur là aussi les cours d'eau et la végétation.