Alors que ce mercredi 8 janvier signait officiellement l'ouverture des soldes d'hiver, et que les cartes bleues chauffent encore, certains gardent la tête froide. C'est le cas d'Emmaüs France qui appelle carrément à boycotter cet évènement mercantile. Le directeur de la communauté strasbourgeoise est, lui, plus mesuré.
Ce sont des messages que l'on voit fleurir de plus en plus sur les réseaux sociaux : des appels à boycotter les soldes, officiellement ouvertes mercredi 8 janvier. Consumérisme à outrance, dégâts écologiques, attrape-couillons, les raisons sont nombreuses et plutôt valables. Emmaüs France, engagé depuis longtemps dans le recyclage et l'anti-gaspillage, y est allé de son post, et pas avec le dos de la cuillère (de seconde main).
L'occasion aussi, au passage, de rappeler qu'Emmaüs, c'est "500 boutiques" en France où les prix sont bas toute l'année.
Prise de conscience
À Strasbourg, Dominique Freund, directeur d'Emmaüs, est plus mesuré, même si les soldes ne sont pas forcément une bonne chose pour la solidarité. "Chaque année, à l'époque des soldes ou des braderies, nous sentons une baisse de 10 à 20% de notre fréquentation. Cela n'a pas forcément d'incidence sur nos comptes, tout dépend de ce qu'achètent nos clients, mais la fréquentation est moindre, c'est très net".
Ceci dit, la concurrence s'arrête là. Emmaüs Strasbourg avec ses millions d'objets en vente (2700 tonnes d'objets collectés chaque année), propose des prix imbattables. Encore moins cher que n'importe quel article bradé dans n'importe quelle enseigne. La solidarité en plus. "Les soldes, c'est tellement éloigné de notre modèle. Nous, nous sommes avant tout une salle de vente, de solidarité pour les gens qui ont très peu d'argent et ceux qui n'en avaient pas du tout. Notre devise, c'est que tout ce que nous proposons doit être accessible à toutes les bourses. On vend le plus possible certes, mais dans le souci de l'autre, pas pour faire des profits. On peut avoir les mêmes produits, mais ce n'est pas la même démarche, c'est même à l'opposé."
Et d'ailleurs, signe qui ne trompe pas, "quand la société va mal, Emmaüs va bien", en 2024, la communauté de Strasbourg a accueilli entre 4 000 et 5000 clients en moyenne. "Nous nous sommes aperçus que les mentalités changent doucement, il y a une prise de conscience collective que le consumérisme ne mène à rien et que la qualité, notamment des textiles, baisse notamment en ligne. Ils n'ont plus envie de ça."
Pas de moralisme
Signe aussi que les consommateurs ne jettent plus leurs affaires, ou ne les donnent plus, inconsidérément, les vêtements collectés par Emmaüs ont de moins en moins de valeur. "Les gens font plus attention à ce qu'ils achètent et surtout, ils revendent en priorité sur des sites spécialisés dans l'échange ou l'occasion, leurs objets et vêtements de valeur. Nous sommes devenus le dernier recours. C'est un changement important. Du coup, on se rapproche davantage directement des enseignes pour leurs stocks d'invendus ou les objets neufs, mais un peu abîmés, invendables. "
Ce n'est pas en faisant des leçons de morale qu'on change les mentalités.
Dominique Freund, directeur Emmaüs Strasbourg
Alors non, Dominique Freund ne jettera pas l'anathème sur les consommateurs pris dans les phares, éblouissants, des soldes. "Vous savez, chacun fait comme il veut, il y a de la place pour tout le monde, ce n'est pas en faisant des leçons de morale qu'on change les mentalités. Si les soldes profitent à des gens qui n'ont pas beaucoup d'argent et qui peuvent s'offrir enfin ce dont ils ont envie ou besoin, pourquoi les juger ? Et de toute façon, s'il n'y avait pas de marché du neuf, il n'y aurait pas non plus de marché d'occasion."
Sage adage. Les soldes, à consommer avec modération donc et surtout, en s'inscrivant dans un cercle vertueux : anti-gaspillage et recyclage. En faisant de la place dans vos placards pour vos nouveaux achats et en donnant le surplus, à Emmaüs par exemple...