Depuis le 1er janvier 2023, les logements classés G selon leur diagnostic de performance énergétique (DPE) sont interdits à la remise en location. C’est le début d’une chasse aux passoires thermiques qui a pour but de lutter contre le réchauffement climatique. En Alsace, 17% du parc immobilier sont concernés.
Sur les 30 millions de résidences principales que compte la France au 1er janvier 2022, environ 1,5 million de logements (5 % du parc) seraient peu énergivores (étiquettes A et B du DPE).
À l’opposé, environ 5,2 millions de logements (17 % du parc) seraient des "passoires énergétiques" (étiquettes F et G du DPE). L’étiquette D est la plus fréquente (32 % du parc), les étiquettes C et E représentent respectivement 24 % et 22 % du parc.
La date de construction du logement, sa taille, sa localisation, le caractère individuel ou collectif de l’habitat et le statut d’occupation figurent parmi les caractéristiques influant sur les performances énergétiques.
Le diagnostic de performance énergétique
Le diagnostic de performance énergétique, communément appelé DPE, est obligatoire à l’occasion de la vente d’un logement ou d’un bâtiment, de la location d’un logement ou d’un bâtiment d’habitation, ainsi que pour les bâtiments neufs. Établi par un diagnostiqueur certifié, le DPE est effectué à l’initiative et aux frais du propriétaire du logement. Il est valable 10 ans.
Les logements classés F et G, les plus énergivores, exposent leurs habitants à des risques de précarité énergétiques. Ces logements, ou plutôt ces « taudis » comme dirait Olivier Klein, le ministre de la Ville et du logement, sont dans le viseur des politiques publiques.
Ils devraient progressivement disparaître du paysage locatif au fil des mesures à venir. Depuis le 1er janvier 2023, il est désormais interdit de remettre à la location des logements consommant plus de 450 kWh d’énergie finale par m² et par an. Cela concerne les logements classés G, à l’exception de ceux qui sont chauffés avec de l’électricité. En 2025, l’ensemble du parc locatif estampillé G sera interdit. Suivront en 2028 les logements classés F et en 2034 les logements classés E.
Vendre ou rénover
Vendre ou rénover ? Les propriétaires sont confrontés à un choix cornélien. À Eckbolsheim, dans le Bas-Rhin, l’agence B&H Immobilier n’a pour le moment qu’un seul bien classé G proposé à la vente : un deux pièces sans isolation datant de 1974.
Frédéric Bernhard, coprésident de la FNAIM 67 explique : "Nous n’en sommes qu’aux prémices de l’interdiction. Nous avons pour le moment des appartements qui ont été retirés de la location en attendant d’envisager de faire des travaux. Nous avions pris les devants depuis la loi "Climat et résilience" en juillet 2021 en les informant par de multiples notes. Mais visiblement, ils attendent d’être confrontés au problème pour prendre des décisions".
Certains biens sont toujours occupés par des locataires. "Les propriétaires attendent donc la fin du bail pour statuer. Pour ceux qui choisiront de mettre en vente plutôt que de rénover, l’agent immobilier met en garde : les conditions financières ne seront pas les mêmes, d’autant qu’à compter du 1er avril 2023, il y a l’obligation d’un audit énergétique dans le cas d’une transaction immobilière. L’acheteur sera informé dès la première visite de la nature et du coût des travaux à réaliser. La somme estimée du montant des travaux servira de base à la négociation".
Si certains procrastinent encore, d’autres n’hésitent pas à se lancer dans les travaux. C’est le cas de la famille Courallet-Gross à Illkirch-Graffenstaden. Propriétaires depuis deux ans d’une maison avec jardin classée E, elle a dû trouver des solutions pour faire face au coût exorbitant des deux dernières factures de gaz.
Elle a fait appel à Oktave, le service régional de rénovation performante de l'habitat. Après avoir fait un tour d’horizon des points d’amélioration, un contrat sur-mesure a été signé. La conseillère d’Oktave a fait un mix de plusieurs aides pour leur permettre de faire baisser la facture totale des 60.000 euros de travaux.
Julia Courallet explique : "On fait l’isolation extérieure, la pompe à chaleur, les deux portes d’entrée, la VMC. Les travaux ont commencé et on voit déjà la différence !"
Christine Alegre, la conseillère d’Oktave, reconnaît que l’évolution de la règlementation impacte fortement son activité : "Depuis l’année dernière, on a beaucoup de demandes de gestionnaires de biens ou de propriétaires bailleurs. Ils s’inquiètent de ne plus pouvoir louer leurs logements dans les années à venir. Ils nous demandent de faire un bilan énergétique et des préconisations de travaux à réaliser pour pouvoir sortir leurs logements des passoires énergétiques".
La particularité de la situation strasbourgeoise
Avec 17% de passoires thermiques (logements classés F et G), l’Alsace est dans la moyenne nationale. Selon le classement énergétique des résidences principales en G, le Haut-Rhin compte plus de 5.000 logements indécents et le Bas-Rhin, plus de 6.400.
À Strasbourg, 35% du parc immobilier est concerné. La capitale européenne compte deux quartiers classés au patrimoine mondial de l’Unesco : la Grande Ile depuis 1988 et la Neustadt depuis 2017. Si la situation est enviable d’un point de vue patrimonial, elle l’est nettement moins d’un point de vue énergétique.
Impossible d’envisager de toucher aux façades sans accord de la Direction régionale des affaires culturelles et des architectes des bâtiments de France. Il existe des solutions alternatives pour renforcer l’isolation (système de double-fenêtre, isolation par l’intérieur, etc.) mais elles sont beaucoup plus chères.