Procès de l'accident du TGV d'Eckwersheim: "nous avons été parfaitement transparents et collaboratifs", se défend la SNCF lors de son interrogatoire

En cette première journée d'interrogatoire de la SNCF, mandatée pour réaliser les opérations de conduite durant les essais, le cas de la formation du conducteur et la coordination avec l'entreprise en charge des essais ont été évoqués.

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Dans le cadre de la sixième semaine d'audience dédiée aux interrogatoires, c'est au tour de la SNCF d'être appelée à la barre. Durant deux jours, le tribunal va tenter de comprendre le rôle qu'a joué l'entreprise dans le déraillement de la rame d'essai du TGV Est en novembre 2015

Prévenue des faits de "blessures et homicides involontaires par maladresse, imprudence, négligence ou manquement à une obligation de sécurité", la SNCF était notamment en charge de la conduite du train au moment de l'accident. Une responsabilité qu'a souvent rappelée Systra, sa filiale en charge des essais, pour se défendre au moment de son interrogatoire en début de semaine.

À la barre, le représentant de la SNCF est Pascal Villard, DRH du matériel au moment de l'accident et travaillant pour le groupe depuis 40 ans. Comme le veut le déroulé du débat, la présidente invite l'interrogé à s'exprimer spontanément : c'est souvent un moment où des mots sont adressés aux victimes. Il n'en est rien pour le représentant de la SNCF. "Au moins il n'y a pas d'hypocrisie", réagit une partie civile. 

La SNCF en charge de la conduite et des mesures

Pas d'hypocrisie c'est ce qui semble ressortir des débats. Sur la question du contrat signé entre Systra (en charge des essais) et Eurailtest (sous-traitant en charge de la conduite via l'Agence d'essai ferroviaire, une agence appartenant à la SNCF), il "est clairement indiqué que la sous-traitance ne porte que sur les prestations de mesure", indique la présidente. "Oui, c'était une prestation de mesureur, et de conduite, complète le représentant de la SNCF. Je pense que les choses étaient parfaitement claires."

À l’issue de l'instruction, trois fautes avaient été retenues contre la SNCF. En premier lieu, des défauts de communication et de coordination entre les équipes de Systra et l'Agence d'essai ferroviaire (AEF) concernant la conduite. "La transmission des documents fait bien partie de la mission contractuelle de l’AEF", reconnaît le représentant de la SNCF.

Un document "qui aurait permis d'éviter la catastrophe"

Concernant ladite documentation, la juge renvoie en particulier à un référentiel de conduite produit par l'AEF : "les experts ont dit que si cette consigne avait été transmise à Systra cela aurait permis d’éviter la catastrophe". Dans ce référentiel, on retrouve un certain nombre de griefs à prendre en compte : interphonie défaillante, brief trop court, une équipe de conduite pas assez entendue, des notes de conduite qui arrivent trop tard.

"Systra n’a pas la compétence de la conduite, donc est-ce que ce n'était pas à l’AEF de faire en sorte que tous ces items problématiques ne se reproduisent pas sur cette campagne et de faire le lien avec Systra ?", interroge la présidente. Le représentant de la SNCF se défend, "vous avez raison c’est à l’AEF de faire le lien, mais sur les points que vous avez cités je ne vois pas les défaillances ou les écarts dans le cadre de nos essais."

Les essais sur lesquels on travaillait n'étaient pas si complexes

Pascal Villard

Représentant de la SNCF

Concernant le renforcement de l'équipe de conduite (deux conducteurs et un cadre traction), la présidente pointe une défaillance concernant le second conducteur "qui ne semblait pas dans son rôle : pourquoi ne pas avoir insisté auprès de Systra sur l'importance de ce second conducteur ?". "Cela figurait dans notre documentation, ce n'était pas à Systra d'organiser l'équipe de conduite, c'était au cadre traction d'organiser le travail entre les deux conducteurs", assène-t-il.

"Nous avons été parfaitement transparents et collaboratifs, conclut-il. On est toujours sur une notion de confiance entre les uns et les autres ?", demande la présidente. "Je ne sais pas mais si on ne se fait pas confiance on n'avance pas. Les essais sur lesquels on travaillait n'étaient pas si complexes."

Absence de formation pour les conducteurs d'essai

Une conduite pas si complexe non plus ? La présidente s'étonne qu'il n'y ait pas d'habilitation spécifique pour les conducteurs de TGV d'essai.

"Pour le cas des essais dynamiques, il n’y a pas de geste métier spécifique. Il y a du savoir-faire à avoir pour tenir le palier, cela demande du métier, de la concentration, mais il n’y a pas de compétences spécifiques à avoir. C’est savoir conduire, et bien conduire un TGV", explique-t-il. Agacée, la présidente rappelle à quel point les missions d'un conducteur de TGV commercial étaient différentes de celles d'un conducteur d'essai. "Encore une fois ce sont les mêmes gestes de conduite, dans des éléments de contexte différents", répond-il.

L'interrogatoire doit se poursuivre vendredi 26 avril. La SNCF encourt une amende de 225 000€. 

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