En 1987, sa chanson "Yaka dansé", six mois dans le Top 50, lance sa carrière internationale. Aujourd'hui, Christian Fougeron ("Christian de RafT") rend hommage à son Alsace natale. Son single, réalisé avec un label indépendant strasbourgeois, Try and Dye recorders, sort le 24 septembre.
"Cette chanson, je l'écris depuis vingt, vingt-cinq ans" avoue Christian Fougeron. "Elle a évolué au fil temps. J'ai changé les accords, la mélodie, le texte, souvent." Et puis, un jour, elle a trouvé sa forme définitive :"Il y a un an, en plein confinement, j'ai décidé de la terminer. De la mener à son terme, une bonne fois pour toutes."
Véritable Strasbourgeois, Christian Fougeron est né dans la capitale alsacienne, et y a fait ses études, "une maîtrise en sciences économiques." Puis il a enseigné durant deux ans en tant qu'instituteur. "J'ai toujours tout fait pour pouvoir faire de la musique" reconnaît-il. "Des études et un boulot qui laissent du temps." Batteur, puis chanteur et guitariste dans plusieurs groupes, il a ensuite fondé avec Pierre Schott le duo RafT.
Sa chanson "Yaka dansé" reste 6 mois au Top 50
La gloire arrive en 1987, avec la chanson "Yaka dansé" dont il est l'auteur-compositeur-interprète : disque d'or, 2e du Top 50, un million d'exemplaires vendus jusqu'à aujourd'hui. Le duo tourne beaucoup, puis se sépare. Mais Christian Fougeron conserve le nom "Christian de RafT". Il sort un album en 1994 et un autre en 2012, malgré beaucoup de remises en question et "une longue traversée du désert". Et depuis, "il tourne beaucoup" sur des scènes tant françaises qu'internationales. Excepté, bien entendu, durant les premiers temps de la crise sanitaire.
Coq au matin et le soir aigle, dans le ciel, les vautours... / La cigogne se fait colombe quand reviennent les beaux jours.
C'est là qu'il a peaufiné "Mes Alsaces", cette chanson portée en lui depuis un quart de siècle, et née de ses innombrables voyages. "Quand on visite et découvre beaucoup de choses, on s'aperçoit que chez soi, ce n'est pas si mal" reconnaît-il. "J'avais envie d'écrire là-dessus." Mais rapidement, le texte se fait cri d'amour pour sa terre d'origine, et concentré narratif de ses dualités, qui expliquent le pluriel du titre : "De lignes bleues en orées noires pour mieux cacher sa plaine / Le doux pays aux deux histoires conte sa double peine. / Coq au matin et le soir aigle, dans le ciel, les vautours… / La cigogne se fait colombe quand reviennent les beaux jours !"
"C'est une région qui a une histoire particulière, avec des choses douloureuses que ma famille a vécues" explique Christian Fougeron. "Je suis né en 1958, et j'entendais encore parler de la guerre, de l'occupation, des Malgré-nous. Donc c'était une façon de faire une synthèse de tout ça." Et pas question pour lui d'utiliser l'autodérision. Car il a le sentiment que "souvent, les Alsaciens se moquent d'eux-mêmes, par peur qu'on le fasse à leur place." Quoique tissé de subtils jeux de mots, le texte garde donc une certaine gravité : "Quand toujours on perd à la guerre, quel que soit l'uniforme / De bon côté de la frontière, il n'est que dans la forme. / Si parfois le ton est cassant, c'est d'être malgré nous / Jugés coupables à notre accent quand les gorges se dénouent."
Des arrangements "dans le style du folk américain"
Mais la chanson prend réellement vie quand Christian Fougeron la fait écouter à son ami Fred Tavernier, membre du label indépendant strasbourgeois Try and Dye records. "Ce serait drôle qu'on sorte un single pour s'amuser" propose alors celui-ci, qui reconnaît avoir immédiatement flashé sur le texte : "C'est un super morceau, j'aime les paroles (…) Forcément, étant aussi Alsacien, j'ai des affinités. Il est à la fois romantique et mélancolique, et je trouve ça fabuleux."
C'est un super morceau (...) à la fois romantique et mélancolique. Je trouve ça fabuleux.
Mais Fred Tavernier avoue que "l'idée était aussi de se faire plaisir." Lui avec ses guitares, et son comparse Cédric Machi à la batterie, proposent à l'auteur-compositeur-interprète "une évolution dans les arrangements" qui lui convient. "L'objectif de Christian, c'était un style de valse lente genre folk américain des années Bob Dylan" explique Fred Tavernier. Qui a donc cherché d'autres artistes pour pouvoir ajouter un accordéon, de l'orgue, une basse et des chœurs.
"Fred et Cédric ont apporté des arrangements, une couleur" se réjouit Christian Fougeron. "On a enregistré ça chez Cedric, dans son home studio. Et Fred a produit avec son label." Pour lui, cette manière de travailler était inédite. "Quand pendant des années, on travaille seul chez soi à tout faire, on finit par croire à tort que c'est toujours bien" avoue-t-il. "Même à la période de RafT, avec Pierre Schott, on écrivait chacun nos chansons dans notre coin."
Mais cette fois, c'était une réelle collaboration. "Une vraie belle aventure humaine, en plus d'une aventure artistique" confirme Fred Tavernier. "On a pu travailler main dans la main, avec un objectif commun. Ça a été tout le temps dans l'envie, le plaisir." L'enregistrement a été suivi de la réalisation d'un clip agrémenté d'animations. Clip pour lequel Fred Tavernier a, de nouveau, "fait appel à des gens avec qui (il) travaille régulièrement."
La sortie – et ensuite ?
La chanson sortira officiellement le 24 septembre, uniquement sous forme dématérialisée, en même temps que le clip sur Youtube qui sera relayé sur les réseaux sociaux du label, de l'artiste et des partenaires. A quelques jours de l'échéance, Christian Fougeron est serein : "On verra ce que ça donne. L'idée serait "de s'y retrouver financièrement, avec les droits d'auteur, avec des médias qui paieront à la Sacem", mais pour lui, l'essentiel était "de sortir cette chanson." Et il rend hommage à Fred Tavernier d'avoir "mené ce projet à bien, surmonté les obstacles et trouvé les moyens de financement pour limiter les coûts de fabrication."
On verra ce que ça donne (...) L'essentiel était de sortir cette chanson.
Dans l'immédiat, aucun album n'est dans les tuyaux pour faire suite à ce single. "On a mis un an à faire une chanson" rit Christian Fougeron. "Pour un album complet, il noud en faudrait dix." Mais comme il a déjà pas mal d'autres chansons en stock, le jour venu, il ne serait pas contre : "S'il y a un bon accueil (du single), pas de souci pour la suite."
De son côté, Fred Tavernier est pris actuellement par un projet personnel : "Outed, un duo de chansons françaises", dont un clip est nominé aux Hopl'awads. Mais cette première réalisation commune s'est tellement bien passée que lui aussi pourrait envisager de remettre ça : "Si Christian me dit : Fred, tu veux avancer ? je ne dirai pas non" avoue-t-il. Affaire à suivre.