Pour cette 37e édition des journées européennes du patrimoine, 344 manifestations sont organisées dans le Bas-Rhin, 148 dans le Haut-Rhin. Une offre légèrement à la baisse cette année mais de quoi faire tout de même. Masqué évidemment. Reportage à Strasbourg.
Près de 500 manifestations sont organisées ce week-end pour cette 37e édition des journées européennes du patrimoine en Alsace. Une offre de 30% à la baisse par rapport aux années précédentes mais une offre riche tout de même.
Si les visites en off, plus intimistes, ou plus bricolées ont disparu du programme, mesures sanitaires très contraignantes obligent, les parcours en plein air ou à vélo ont le vent en poupe. Les grandes institutions culturelles tirent, elles aussi, leur épingle du jeu. Le public était au rendez-vous. Nous aussi. A Strasbourg.
Le palais épiscopal
Il fallait s'y prendre à l'avance et réserver pour avoir le luxe de découvrir ce lieu qui, pour la toute première fois, ouvrait ses portes au public aujourd'hui. Le palais épiscopal. Pour les autres, ce sera pour une autre fois : les visites affichaient déjà complet au petit matin.
La visite dure 1h30 et le temps passe vite. On y apprend l'histoire de ce lieu si particulier, appartenant à moitié à l'Etat et à moitié au diocèse. Le palais épiscopal, anciennement Hôtel du Grand Doyen, était la résidence des évêques avant la Révolution. Dès 1803, il est envisagé d'affecter l'ancien Hôtel du Grand Doyen au logement de l'évêque concordataire, ce qui oblige l'État à le racheter à l'aubergiste Busch.
En 1855, Mgr Raess prend ses quartiers dans l'ancien Hôtel du Grand Doyen et depuis, tous ses successeurs y ont résidé, jusqu'à ce jour. On peut d'ailleurs y admirer la galerie de portraits.
Cet hôtel citadin, premier hôtel à la française de Strasbourg possède un grand escalier qui constitue le principal chef-d'œuvre de la construction. Pour les visiteurs, un peu intimidés, mettre les pieds sur ces marches, c'est un peu s'élever vers dieu. Ou du moins ses humbles serviteurs. "On s'est inscrit très tôt pour avoir la chance de venir. On est venu à la toute première visite ce matin. On ne regrette pas. La beauté des salles, et surtout voir la vie qui les anime. Car le lieu est toujours habité, c'est ça qui est intéressant."
Le chanoine Jean-Luc Lienard, vicaire général du diocèse ne dit pas le contraire : "Evidemment on se plie au protocole sanitaire obligatoire mais c'était important pour nous de montrer que ce palais ce n'est pas juste de simples pierres mortes mais une chose précieuse qu'on nous a transmise et dans laquelle on vit et on travaille."
Tout HEAR
Changement de décor. Direction la HEAR. Haute école des arts du Rhin, anciennement école supérieure des arts décoratifs de Strasbourg. Ici aussi les visites se font en petit groupe et sur inscriptions. Le bâtiment dont on peut voir de la rue, la façade décorée de céramiques, fut érigé en 1892. Marqué par de grandes baies vitrées, il est conçu pour accueillir le maximum de lumière. L'art n'aime pas rester dans la pénombre. Les frises polychromes qui ornent la façade marquent bien l'appartenance de l’école au Jugendstil (équivalent allemand de l'art nouveau). A noter : les décorations de l'école ont été réalisées par les premiers élèves selon les esquisses de leurs professeurs.Des élèves qui font, du coup, presque, partie des meubles. Certains d'entre eux, des (jeunes) anciens, commentent les visites avec leurs yeux, leurs souvenirs, leur art. " Ce que j'apprécie ici c'est que, contrairement à un musée, ici, ça vit. C'est du vivant. C'est une étudiante en fin de cycle qui nous a fait la visite avec ses mots à elle. C'est d'autant plus intéressant" explique un visiteur.
Ce que j'apprécie ici c'est que, contrairement à un musée, ici, ça vit. C'est du vivant.
Une école prestigieuse, sélective, qui pour ce week-end, ouvre ses portes au plus grand nombre (dans le respect des gestes barrières). Et c'est ce qui plait à cette jeune fille, l'envers du décor. "La façade art déco me donnait envie d'y entrer depuis longtemps. Là c'était l'occasion. Je découvre un monde inconnu, des instruments insolites, les dessous de l'art en quelque sorte."
Rendez-vous en terre inconnue au coin de la rue : c'est bien le principe de ces journées européennes du patrimoine. Surtout en ces temps troubles pour le monde de la culture. Christelle Creff, directrice régionale des affaires culturelles, ne s'y trompe pas. "Alors que les sites patrimoniaux ont vu leur fréquentation chuter, il est grand temps de redécouvrir le patrimoine de proximité, notre cadre de vie finalement. Comme les Français ont privilégié l'été dernier les vacances en France, ils peuvent, pas ces journées faire vivre le patrimoine local." Et même en persistant un peu, le reste de l'année, participer à sa sauvegarde en achetant un billet d'entrée.