Strasbourg : les responsables de la mosquée Eyyub Sultan retirent leur demande de subvention auprès de la Ville

La maire de Strasbourg Jeanne Barseghian annonce que les responsables de la mosquée Eyyub Sultan ont retiré leur demande de subvention. Le financement de 2,5 millions d'euros accordé par la Ville au cours d'une délibération houleuse le 22 mars 2021, avait provoqué une intense polémique. 

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La maire de Strasbourg annonce que les promoteurs du projet de la nouvelle mosquée Eyyub Sultan ont finalement décidé de retirer leur demande de subvention. La demande de l'association turque Millî Görüs avait été accordée sous condition au cours d'une délibération houleuse le 22 mars dernier, pour un montant de 2,5 millions d'euros.  Depuis, la polémique n'a cessé d'enfler. Mais le retrait de l'association Millî Görüs permet à Jeanne Barseghian de jouer l'apaisement.

"Je prends acte de ce retrait et la Ville ne versera donc pas en l'état de subvention pour la poursuite de la construction de la mosquée (....) Je mesure l'incompréhension et l'émoi que cette polémique a causé chez nombre d'entre vous et j'entends répondre ici à votre besoin légitime d'explications" écrit-elle sans une lettre ouverte publiée vendredi, avant d'apporter des précisions supplémentaires au cours d'une conférence de presse. Les autres collectivités, la Région Grand Est et la Collectivité Européenne d'Alsace, ayant décidé de ne plus soutenir le projet, c'est tout le plan de financement que l'association devra revoir. Suite à cette situation nouvelle, Millî Görüs a fait part de sa décision de ne plus solliciter la subvention de la Ville. La maire a reçu le courrier le 15 avril 2021, et précise que la délibération du 22 mars 2021 portant sur cette subvention est désormais sans objet.

Fin de polémique? Pas sûr

Pour autant, pas sûr que ce retrait suffise à éteindre la polémique. Car la maire de Strasbourg persiste et signe. Elle n'a fait, selon elle, que s'inscrire dans la continuité d'un projet entamé par ses prédécesseurs, conformément aux dispositions en vigueur, et insiste-t-elle, sans jamais avoir été alertée par l'état sur le risque de manquement aux règles républicaines de cette association. "Aucun élément concret ne m'a d'ailleurs été transmis à ce jour. Si cela avait été le cas, aucun projet de subvention n'aurait été présenté en conseil municipal."  pointe-t-elle dans sa tribune.

Lettre de Jeanne Barseghian by France3Alsace on Scribd

Et elle ajoute durant la conférence de presse que non seulement elle n'aurait pas été alertée, mais qu'elle observe dit-elle,  les liens étroits entretenus entre les services de la préfecture et Millî Görüs, et notamment son président Eyup Sahin, qui est aussi président du CRCM Alsace, le Conseil régional du culte musulman avec lequel l'état coopère rappelle-t-elle sur des thématique de jeunesse et de sécurité notamment.

"Pour le moins, la position de l'Etat français par rapport à cette association ne me paraît pas claire et ne m'a pas permis non plus d'avoir des éléments précis. C'est vrai qu'il y a eu le 23 mars (c'est à dire au lendemain de la délibération strasbourgeoise) un tweet, puis un appel de monsieur Darmanin [ministre de l'Intérieur, ndlr] et de madame la préfète pour me dire pour me dire qu'ils déféraient notre décision du conseil municipal au tribunal administratif, mais je n'ai eu aucun élément. J'ai envoyé un courrier au président de la République, j'ai adressé un courrier à madame la préfète, je n'ai eu aucun élément tangible", assène-t-elle 

De son côté, la préfète du Bas-Rhin et du Grand Est, Josiane Chevalier, affirme avoir, "personnellement" et "à plusieurs reprises", exprimé des réserves auprès de la Ville au sujet de cette subvention. La préfecture a d'ailleurs effectivement saisi le tribunal administratif sur ce sujet.

A Strasbourg, au conseil municipal, ce dossier empoisonne également les relations entre la majorité et les partis d'opposition. Les élus LR et LREM, en particulier, se montrent particulièrement critiques.

Le dossier n'est pas clos

Si la décision de Millî Görüs peut apporter un répit, le sujet sur le fond, lui, est loin d'être réglé, et Jeanne Barseghian semble décidée à s'y atteler. "Je suis attentive aux nombreuses questions qui entourent les relations spécifiques aux cultes sur notre territoire. C'est la raison pour laquelle j'engagerai, dans les prochaines semaines, un travail constructif avec les représentants des groupes politiques au conseil municipal, les représentants des cultes et d'autres acteurs locaux, pour rendre plus transparentes et équitables les procédures d'attribution de financement et de soutien aux cultes." dit-elle.

La maire indique avoir échangé d'ores et déjà avec les représentants des différents cultes, qu'elle recevra à nouveau d'ici la fin du mois. Elle compte également travailler avec les associations, mais aussi les universitaires, et bien sur les groupes politiques et les services de l'état réfléchir à un cadre plus précis et plus transparent concernant le financement des lieux de cultes, construction ou rénovation, quelle que soit la religion, et sans remettre en cause les spécificités régionales de concordat et de Droit local. C'est une étape importante et un travail au long cours qu'elle souhaite mener d'ici la fin de l'année 2021.

Plus largement, elle estime qu'en marge de ce dossier controversé, au vu des nouvelles exigences, il faut remettre à plat et mieux préciser les conditions d'attribution de subventions aux associations, qu'elles soient religieuses ou pas, dans une recherche d'équité "Je pense qu'on doit avoir une vigilance, à partir du moment où on attribue des financements publiques à des structures ou des projets, je pense qu'il faut qu'on puisse respecter un certain nombre de principes et de procédures et que les règles du jeu soient les même pour tous"

Quant à la mosquée Eyyub Sultan, dont le gros œuvre est quasiment achevé, la question de l'achèvement des travaux reste posée, avec un plan de financement aujourd'hui déstabilisé, et donc probablement la nécessité de trouver des financements supplémentaires. "Ca, en tant que maire de Strasbourg, c'est évidemment un point d'attention pour moi, parce que je dois suivre l'évolution d'un chantier extrêmement conséquent (....) un grand chantier à ciel ouvert, ça pose aussi des questions de sécurité"

Ce sont en réalité plusieurs chantiers qui attendent désormais d'être conclus : celui de la mosquée en tant que tel, celui d'une procédure clarifiée pour l'attribution de subventions publiques, et celui d'une cohésion à retrouver autour de problématiques sensibles, nourrissant des sentiments d'incompréhension, d'indignation, mais aussi de stigmatisation. 

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