Dénoncer avec fermeté les violences et le harcèlement de rue est l'objectif de la marche "Ensemble en jupe" du samedi 24 octobre 2020, à Strasbourg. En parallèle les deux organisatrices invitent hommes et femmes à trouver des solutions pour mettre fin à ce fléau.
Une marche pour dénoncer les violences et le harcèlement de rue faites aux femmes sera organisée le 24 octobre à Strasbourg. "Nous ne faisons partie d'aucune association féministe, ni Marie, ni moi" prévient Sophie, l'une des deux initiatrices de cette manifestation. "C'est simplement un ras-le-bol citoyen qui nous fait réagir. Par moment j'ai l'impression que certaines choses n'ont pas changé dans les derniers vingt, trente ou quarante ans. J'ai le souvenir que lorsque j'étais à l'école primaire, certains petits garçons soulevaient les jupes des filles et que pas grand monde ne s'en offusquait. Aujourd'hui ma propre fillette a deux ans, je m'interroge sur la première fois où elle aura à faire à ce type de comportement".
Aucun doute, l'irrespect du corps d'autrui ce n’est pas nouveau, mais il faut en finir. Sous prétexte de certains vêtements qu’elles portent, des femmes et des jeunes filles se font insulter aujourd'hui ou harceler dans la rue. La lutte pour le droit des femmes est vieille de plusieurs siècles, mais certaines étapes la font avancer de façon plus significative. Le mouvement de fond #MeToo et diverses levées de boucliers contre la discrimination sexuelle, changeront-ils enfin les comportements scandaleux de certains hommes et garçons ? Beaucoup le souhaite, mais le combat reste toujours et encore indispensable.
La marche n'est que la partie visible de l’iceberg
"La marche du 24 octobre qui partira de la place Kléber à 15 heures n'est que la partie visible de notre projet" explique Sophie. "Elle va durer deux heures, mais c'est une façon d'attirer l'attention sur un problème de société". En parallèle nous voulons vraiment proposer aux citoyens de trouver des solutions. En rassemblant les idées du plus grand nombre, l'idée de Sophie et Marie est ambitieuse : grâce à une réflexion collective, elles imaginent par exemple "faire de la prévention en milieu scolaire, apprendre aux garçons et aux filles à respecter leur corps et celui des autres. Dire aux petites filles qu’elles ont le droit d’avoir des objets similaires à celles des garçons et inversement. Leur enseigner, par exemple, que les couleurs ne sont pas genrées. Noël approche et je sais déjà que dans les magasins on va trouver les jouets bleus pour les garçons et roses pour les filles".Alors Sophie et Marie avancent des idées pour améliorer les relations hommes-femmes. Pendant la marche, des crieurs et des crieuses liront à haute voix des témoignages de femmes victimes de violences dans la rue. Des témoignages que les citoyens peuvent laisser à une adresse mail. Tous les témoignages seront anonymes, dans cette démarche, personne n'est mis en avant, tout citoyen doit pouvoir se sentir concerné. Ceux qui le souhaitent pourront également partager leurs idées et proposer des solutions sur une plateforme dédiée aux initiatives.
Appliquer la méthode des 5D, pour ne plus être démunis
Selon un sondage Ipsos d'avril 2019, réalisé pour Loréal Paris, 86% des gens qui sont témoins de harcèlement de rue ne savent pas comment réagir ou ont peur de le faire. Ils sont démunis. Les deux initiatrices de la marche et de la coopération citoyenne autour de ce thème proposent par exemple d'appliquer la méthode des 5D. "C'est une méthode avec cinq mots qui commencent par la lettre D" explique Sophie.- Distraire, par exemple en demandant l’heure à la victime ou en bousculant l'agresseur
- Déléguer, si on ne se sent pas capable d'intervenir soi-même, on va voir un vigile, si on est dans magasin par exemple
- Documenter, prendre des photos, des vidéos qui pourront servir à la victime pour dénoncer la situation
- Dialoguer, pas forcément intervenir pendant l'agression, mais aller voir la victime, lui proposer de l'aide
- Diriger, intervenir auprès de l’agresseur et le mettre devant les faits ; il est possible pour cela d'agir à distance. Dans un bus par exemple, dire à haute voix "Vous n’avez pas compris ? Elle vient de vous dire cinq fois non, elle ne veut pas .... prendre les autres personnes présentes à témoins. Souvent quand une personne réagit, plusieurs se mettent à réagir.
Un combat à mener ensemble, hommes et femmes réunis
Et Sophie conclut en citant un comédien belge, Felix Radu, un homme donc : "S'il faut nommer l'ennemi, ce ne sont pas les hommes, c'est la bêtise". Bref, un combat que les hommes et les femmes doivent mener ensemble contre la bêtise. Chaque homme peut penser que c’est sa sœur, sa mère, sa copine, sa fille qui pourrait être victime de harcèlement de rue.D'ailleurs le harcèlement de rue peut arriver aux femmes et aux hommes. Ce n'est probablement qu'en s'unissant, que ces comportements inacceptables peuvent être contrés. Reste à ne pas tomber dans une peur pour les hommes, comme ne plus oser demander l’heure à une femme, ne plus marcher sur le même trottoir qu'une femme. Savoir trouver le bon équilibre, un exercice à réaliser ensemble. Le changement est amorcé, aux citoyens de poser ensemble de nouvelles pierres à l'édifice.