Strasbourg : plongez dans la vie d'un atelier photographique alsacien de la première moitié du XXème siècle

L'exposition Chambre Noire, à voir jusqu'au 31 mars 2023 à La Trézorerie, propose de découvrir un ancien atelier photographique entre 1880 et 1945. Plus d'une centaine de clichés et leurs négatifs au gélatinobromure d'argent vous plongent dans une Alsace aux nombreux rebondissements historiques.

"La valeur de la photographie nous raccroche à des possibles". C'est par ces mots qu'Alain Berizzi, collectionneur, aborde sa nouvelle exposition nommée Chambre Noire, à découvrir jusqu'au 31 mars 2023 à la Trézorerie de Strasbourg. Elle plonge les visiteurs au cœur d'un ancien atelier photographique qui a vu défilé de nombreux Alsaciens entre 1880 et 1945, une période historique importante pour la région. 

Au total, 167 clichés d'antan sont présentés aux visiteurs. Plus insolite encore, leurs négatifs au gélatinobromure d'argent sont posés sur une table lumineuse permettant de les admirer. Cette technique consiste en une plaque de verre recouverte d'une couche de gélatine refermant le dépôt d'argent qui constitue l'image. 

Grâce à ses négatifs, il est possible de tirer numériquement les clichés et de dévoiler leurs secrets de fabrication. C'est-à-dire que les photos de l'exposition permettent d'observer l'envers du décor et les fonds artistiques que mettaient en place l'atelier. 

L'atelier Lorson, une trouvaille historique 

Cette exposition est un bijou de curiosité né d'un hasard presque déroutant. En juillet 2022, Alain Berizzi découvre, chez un antiquaire rue du Vieil-Hôpital à Strasbourg, une série de plaques de verre photographique. Il décide de les acheter et de mener son enquête pour savoir d'où elle venait. "Je me suis lancé dans une analyse historique de ces clichés. C'était un passage obligé pour un grand nombre de personnes au XIXe et début du XXe siècle, on plonge donc dans leur quotidien et vie de famille", sourit le collectionneur. 

Avant de se lancer dans une exposition, il décide de préparer un livre à propos de sa découverte. "J'ai lancé une campagne Ulule, puis j'ai commencé la rédaction tout en incluant la centaine de photos que j'avais", raconte Alain Berizzi. Quelques jours avant de l'achever, il obtient près de 70 autres photos du même atelier qu'un autre brocanteur avait en sa possession, permettant de compléter sa collection. 

La photo était signée Emile Lorson, c'est ainsi que j'ai découvert l'atelier à l'origine des photos que j'expose

Alain Berizzi, collectionneur et gérant de l'exposition

La publicité faite autour de son projet le met en relation avec un particulier qui possède l'image d'une jeune femme. Vêtue d'une robe noire, elle pose devant un décor ressemblant étrangement à ceux des autres clichés. "Le fond utilisé et les décors étaient les mêmes", explique le collectionneur.

Alain Berizzi arrive, quelques semaines après, à situer l'endroit exact où se trouvait l'atelier. Au dos de l'une des photos qu'on lui apporte, il lit "Atelier E. Lorson, 2 rue de la Mésange, Strasbourg".

En recherchant l'adresse sur internet, il trouve trois cartes postales sur lesquelles le nom de l'atelier apparaît au deuxième étage d'un bâtiment. "L'atelier n'existe plus, mais l'immeuble est encore là. L'enseigne Hermès y avait un magasin au rez-de-chaussée pendant longtemps", constate le collectionneur. 

Un murmure du temps

Les nombreux négatifs, exposé à La Trézorerie, ont failli passer à la benne à ordure, littéralement. En 1945, la famille Lorson lâche l'atelier et de nouveaux propriétaires tentent de redonner vie au lieu en l'appelant Studio Lorson. Après quelques années, l'atelier est abandonné et les plaques de verre en gélatinobromure d'argent sont abandonnées dans une benne à ordure. 

Alors que le bruit court dans les rues de Strasbourg, plusieurs habitants, dont leur famille s'est fait prendre en photo dans l'atelier, récupèrent les négatifs et les gardent précieusement. "C'est comme ça que j'ai pu retrouver des clichés chez des particuliers", affirme le gérant de l'exposition. 

Ces 167 photographies sont uniques. Elles représentent des moments de vie importants, des communions, des portraits de nouveau-nés, de familles, mais aussi des vestiges du passé qui ont marqué l'Alsace. "J'ai récupéré des portraits de soldats de la Wehrmacht, mais aussi des jeunesses hitlériennes, montre le collectionneur, il était important de les exposer pour montrer ce qu'a été l'histoire de notre région". Alain Berizzi choisit toutefois de les poser sur une table éloignée des autres portraits, afin de ne pas les glorifier. 

Avec l'absence d'histoire concrète derrière chaque cliché exposé, le visiteur est invité à imaginer et à se plonger dans une époque révolue. Lors de la soirée de clôture de l'exposition, qui aura lieu le 31 mars à 18h45, des professionnels imagineront six monologues de personnages présents sur les photographies. L'occasion pour les spectateurs d'imaginer le film d'une famille alsacienne derrière une image figée depuis presque un siècle. 

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