Aux côtés de plusieurs élus de grandes villes, la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian, a demandé ce 18 décembre 2022, au ministre du Logement Olivier Klein de tenir ses promesses et de loger tous les enfants qui dorment à la rue. La municipalité en dénombre près de 150 dans la capitale alsacienne.
"Plus que trois dodos pour tenir votre promesse", c’est avec ces mots que la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian a appelé, dans un communiqué publié ce dimanche sur Twitter, le ministre du Logement Olivier Klein à respecter ses engagements concernant le logement les enfants dormant à la rue.
À ses côtés, plusieurs élus de gauche ont eux aussi interpellé le gouvernement à ce sujet. Parmi eux, Mathieu Klein, maire de Nancy, Eric Piolle, maire de Grenoble, et Grégory Doucet, maire de Lyon. Ensemble, ils rappellent la volonté du ministre en septembre dernier que "cet hiver, il n’y ait pas d’enfants à la rue".
Alors que le plan grand froid pourrait être levé par la préfecture du Bas-Rhin au vu des températures plus douces, le gymnase Branly à Strasbourg et celui de Schiltigheim, qui permettaient d’accentuer le nombre de places d’hébergement d’urgence pour les sans-abris, pourraient bientôt fermer leurs portes. Plusieurs enfants devraient donc dormir dans les rues dès ce soir. Selon la mairie, ils seraient au nombre de 150 dans les rues strasbourgeoises.
"Il faut que ces effets d’annonces cessent un peu. Le gouvernement doit mettre en place une stratégie pour éviter que des enfants dorment dehors", indique Floriane Varieras, adjointe à la mairie de Strasbourg en charge des solidarités. "Il y a deux ans, Emmanuelle Wargon avait dit que l'hébergement ne se ferait plus par rapport à la température. Ce n'est toujours pas le cas".
Un plan massif d’hébergement pour enfants réclamé
Face à cette situation, il est demandé au ministre une "triple réaction". La première est un "plan universel d’hébergement d’urgence de l’ensemble des enfants". Ils souhaitent aussi une "augmentation durable des moyens alloués à l’hébergement d’urgence", et enfin la mise en place d’une "politique de rénovation et de réquisition de logements à la hauteur du mal-logement".
En parallèle, les élus de gauche en profitent pour rappeler que "l’hébergement d’urgence" est une responsabilité qui "incombe légalement à l’État" et non aux communes. Un constat qui n’est pas sans rappeler le conflit entre Jeanne Barseghian et la préfecture du Bas-Rhin ces dernières semaines.
Alors qu’un campement de migrants s’était installé place de l’Étoile à Strasbourg depuis plusieurs mois, la justice avait ordonné, le 5 décembre, d’évacuer le camp. Quelques jours plus tard, la maire EELV avait annoncé intenter "une action en responsabilité de l’Etat pour inaction et carence en matière de mise à l’abri de personnes".
Alors qu'elle dénonçait déjà une inaction de la part du gouvernement, la municipalité avait mis à disposition, dès septembre, le gymnase du quartier de la Meinau. Ouvert 24h sur 24h, il coûte près de 80 000 euros par mois à la Ville, selon Floriane Varieras. "L’État dit dépenser 49 millions, mais des familles sont encore à la rue. Il faut qu'ils investissent pour avoir une politique de l'accès au logement digne de ce nom", ajoute-t-elle, "En attendant, nous avons décidé de laisser ce gymnase ouvert peu importe la température extérieure".
Un manque de moyen face aux demandes croissantes
Malgré le redoux annoncé pour cette semaine, les associations d’aide aux sans-abris sont toujours en alerte. "Même si les températures remontent à 7°C, on annonce de la pluie. Vous croyez vraiment que c’est décent de remettre des familles à la rue dans des conditions pareilles ?", s’insurge Cécilia Quintiliani, membre du collectif "Pas d’enfant à la rue 67". En lien direct avec les écoles où les bénévoles recensent les cas d’enfants qui dorment à la rue, elle constate que depuis le mois d’octobre, il y a une explosion des signalements.
Les dons privés n’augmentent pas, ils restent constants. À l’inverse, le besoin, lui, ne cesse de s’accroître
Cécilia Quintiliani, membre du collectif "Pas d’enfant à la rue 67".
Pour lutter contre une situation qui devient "préoccupante", le collectif demande plus de moyens financiers et humains : "Les dons privés n’augmentent pas, ils restent constants. À l’inverse, le besoin, lui, ne cesse de s’accroître", explique Cécilia, "Une vie dans un gymnase ? Cela ne peut pas se pérenniser. Il peut y avoir des soucis d’ordre sanitaire, mais aussi de sécurité car les familles sont parfois en contact avec des personnes alcoolisées".
De son côté, le gouvernement n’a pas réagi à l’interpellation faite par certains maires. Olivier Klein a toutefois lancé, ce week-end, un appel aux chefs d’entreprise pour mettre à disposition des sans-abris leurs locaux inutilisés. Au niveau national, les rapports du Samu Social et de l'Unicef, près de 2000 enfants seraient actuellement à la rue, un chiffre qui a doublé par rapport à l’an passé.