A Strasbourg, les rues des quatre nouveaux quartiers porteront le nom de femmes d’exception. La ville y travaille. Il faut dire que la parité dans ce domaine laisse encore à désirer : en France, moins de 5% des rues portent le nom d’une personnalité féminine.
Les choses évoluent malgré tout peu à peu : Strasbourg planche sur la féminisation des rues, places et jardins des 4 nouveaux quartiers Coop, Port du Rhin, Citadelle et Starlette. Quand on sait que seulement 5% des rues en France portent le nom de femmes d’exception, on se dit qu’il y a du pain sur la planche.
Une commission qui se féminise
Strasbourg veut rattraper le temps perdu. Tout comme Nantes, elle fait partie des villes qui ont décidé de mettre en avant les femmes dans la dénomination des rues. Une volonté politique forte et dans l’air du temps, il faut bien le reconnaitre.
En France, moins de 5% des rues portent le nom d'une femme. Ce manque de représentation est problématique, c'est pourquoi la ville de @strasbourg s'est lancée dans la féminisation de plusieurs espaces publics ? pic.twitter.com/3fruQPfclD
— Marie Claire (@marieclaire_fr) May 19, 2020
A Strasbourg, depuis 1873, la commission de dénomination du nom des rues se réunit régulièrement pour proposer au Conseil Municipal des noms de personnalités à apposer sur les plaques de rues, ruelles et autre square. Une trentaine de personnes siègent dans cette commission présidée par Alain Fontanel, premier adjoint au maire. Parmi elles, on compte des élus, des historiens, des représentants des musées et des services techniques de la Ville.
Depuis 2011, cette assemblée a fait une place à la mission droits des femmes et égalité des genres. Une véritable avancée car, pendant des siècles, les noms de rue ont essentiellement honoré des grands hommes. Il suffit de jeter un rapide coup d’œil sur la carte de l’ellipse insulaire pour s’apercevoir que seule Louise Weiss a droit à son square. Un square, pas une rue, encore moins une avenue. Dont acte.
Des femmes d’exception pour 4 nouveaux quartiers
En France, il revient aux communes de nommer leurs espaces publics. La société publique locale deux rives, en lien direct avec la ville de Strasbourg, travaille sur l’aménagement urbain de 4 nouveaux quartiers : Citadelle, Starlette, Coop et Port-du-Rhin. La parité devrait y être respectée. « C’est une volonté forte de la Ville de Strasbourg, très engagée sur cette voie », précise Alice Frémeaux, directrice du développement de la SPL Deux Rives.
L’aménageur urbain va intégrer les propositions faites par la commission. « Chaque quartier a une âme et une histoire qui se refléteront dans les parcours de femmes qui ont été retenues », explique Alice Frémeaux.
Florence Arthaud ou Anita Conti, personnalités féminines en lien avec la navigation, l’océan et l’exploration auront droit de cité au quartier Citadelle, situé sur une presqu’île entourée d’eau.
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Le quartier Starlette mettra à l’honneur les femmes issues du monde économique, telles les cheffes d’entreprise Yvonne Foinant ou Georgette Schulé.
Pour la Coop, cette institution sociale et entrepreneuriale alsacienne, il a été décidé de rendre hommage aux femmes engagées dans l’action publique, politique ou syndicale, telles Eleanor Marx ou Huguette Malbos.
Où sont les femmes ?
Maurice Moszberger est l’auteur du Dictionnaire historique des rues de Strasbourg paru en 2002, enrichi et réédité en 2012. Membre de l’Association des amis du vieux Strasbourg, il fait partie de cette fameuse commission de dénomination du nom des rues. « Sur les 2.300 noms de rues recensées à Strasbourg, 164 sont dédiés aux femmes » précise-t-il.
Sur les 2.300 noms de rues recensées à Strasbourg, 164 sont dédiés aux femmes
- Maurice Moszberger, membre des Amis du Vieux Strasbourg -
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« En tant qu’alsacien et strasbourgeois, je cherche des alsaciennes illustres à proposer, mais elles ne sont pas si nombreuses ! » s'exclame l'historien. Jusqu’en 2012, date de l’édition complétée de son ouvrage, parmi les femmes honorées par une plaque de rue, on comptait une vulcanologue, une astronome, une aviatrice, quelques peintres et aristocrates, une tragédienne, une violoncelliste et beaucoup de saintes !
Les choses changent. Au fil des ans, il l’a bien remarqué : attribuer des noms de femmes à des rues ou des places devient tendance. « La présence d’associations militant pour les droits des femmes au sein de cette commission y est sans doute pour quelque chose », reconnait-il. Il s’amuse parfois de certaines propositions comme, récemment, le chemin Yoco Tsuno, du nom de cette héroïne de BD des années 1970.
Pour Benoît Jordan, conservateur en chef du patrimoine aux archives de Strasbourg, cette féminisation des noms de rues est évidemment un choix politique : « Si on dressait un état chronologique, on discernerait certainement des tendances : le quartier du Neuhof avec les villes qui ont accueilli les Strasbourgeois en 1939, ou bien les résistants... L’historiographie contemporaine met le focus sur les femmes, il est naturel de retrouver cette tendance dans le choix des noms de rue ».
A quand une avenue portant le nom d’une femme ?
Une fois qu’un nom de rue a été donné, il est très rare de le changer mais on peut les juxtaposer. « C’est ce qui a été fait récemment avec l’avenue de la Paix-Simone Veil », se souvient Benoît Jordan, conservateur en chef du patrimoine aux archives de Strasbourg.
« En tant que femme, on écope souvent des allées, des ruelles, des impasses ou des écoles », raconte en souriant Alice Frémeaux, directrice du développement de la SPL Deux Rives, "les avenues, c'est rarement pour les femmes". Dans les nouveaux quartiers strasbourgeois livrés d’ici deux ans, ce sera encore le cas et pour cause : les grands axes sont déjà nommés. Pas de chance.
