La SNCF supprime les trains Intercités Strasbourg-Paris: tant pis pour les usagers du Grand Est

Les trains Intercités Strasbourg-Paris baptisés "100% éco" n'existeront bientôt plus. Lancés en 2015 par la SNCF pour concurrencer les bus Macron, ils reliaient les samedi et dimanche Strasbourg à Paris en un peu plus de 4 heures mais à petit prix. Dommage... pour les usagers.

Ils avaient été lancés avec fierté en décembre 2015. Les Intercités Strasbourg-Paris 100% éco. Le moyen idéal pour la SNCF de faire face à la concurrence redoutable des bus Macron en tous genres (Isilines, Flixbus, Ouibus et compagnie) et du covoiturage. Le principe était simple: voyager plus longtemps mais moins cher. Le 19 mai 2019, c'est fini. Sans annonce, sans rien.
 

Contraignants mais peu chers

Le confort y était certes modeste voire désuet mais les économes y trouvaient leur compte. Sous réserve d'avoir un bon livre. 4h30 de trajet pour un billet oscillant entre 15 et 35 euros contre un peu moins de 2 heures et 80 euros en moyenne pour le TGV. Une question de choix. Quand on l'avait. 
Les Intercités 100% éco ne circulaient que deux fois par semaine, uniquement le week-end. Un aller-retour le samedi, un autre le dimanche et basta. Les réservations n'étaient possibles que via internet. Et encore il fallait savoir chercher. Sur le quai aussi. Des restrictions vraiment low-cost, un manque de visibilité, qui expliquent peut-être aussi la chute des réservations aujourd'hui.


Pas assez rentables

A priori, le dernier aller-retour de l'Intercités 100% éco aura lieu dimanche 19 mai. A priori, car sur le site de réservations Oui sncf, seul le trajet Strasbourg-Paris du dimanche apparaît. Pas celui du samedi. Bug ou mort prématurée: on ne sait pas. Jointe par téléphone, Anne Corbet, à la direction régionale Grand Est SNCF, pense tout simplement que "le train doit être complet."
 

Complet? Etrange. Car c'est justement le faible taux de remplissage de l'Intercités qui est mis en avant pour expliquer sa suppression. "A l'époque de la création de cet Intercités, l'offre Ouigo n'existait pas. Aujourd'hui, la demande a fortement basculé sur les Ouigo qui permettent de relier plus vite, dans les mêmes conditions que le TGV, de gare principale à gare principale, Strasbourg à Paris à bas coût." 

Tant et si bien que l'Intercités n'est plus rentable pour la SNCF. "Il est hors convention d'Etat, personne ne le finance. On ne va pas continuer à proposer deux offres sur la même ligne dont une qui n'est pas rentable. On supprime aussi l'Intercités 100% éco Bordeaux Paris. C'est la même logique." D'autant que la SNCF ne jure à présent que par le Ouigo, une affaire imbattable: "Ce sont vraiment des bas-coûts pour les tout petits bugets, comparables aux prix de l'Intercités." Nous verrons que, comme souvent, ce n'est pas aussi simple.

L'Intercités fera donc son dernier trajet (samedi ou dimanche?) sans aucun regret ni homélie de la part de la SNCF. Aucune communication en vue ni alerte aux voyageurs. Pas même sur le site internet où les cases couleurs disparaissent tout bonnement. Page blanche. " On ne va pas communiquer à chaque fois qu'on modifie une ligne." Même pour une suppression définitive? " Il n'y a aucun souci. Il fallait de toute façon réserver en ligne donc les voyageurs y trouveront  facilement des alternatives Ouigo".  
 

Dommage pour les usagers

Nous l'avons évoqué, les choses ne sont pas aussi simples que cela. Pour les usagers s'entend. Car le Ouigo n'est pas tous les jours avantageux. "Avec le yield management et les options payantes, le Ouigo est rarement au prix de l'Intercités, il atteint parfois les 100 euros", nous explique François Giordani, président la Fnaut Grand Est (Fédération nationale des associations d'usagers des transports). Nous avons fait le test. 89 euros le dimanche 2 juin.

 
Dimanche 19 mai : comparatif des prix
- TGV :  82 euros
- Ouigo : 45 euros prix de base + 2 euros avec prise (oui quand même) + 5 euros avec une grande valise soit 52 euros
- Intercités : 40 euros avec toutes les valises que vous voulez

 






Conlusion: le compte n'y est pas .. toujours. Autre chiffre problématique: le taux de remplissage. Selon les comptages de la Fnaut, le dimanche 7 avril, 300 personnes sont montées dans l'Intercités Eco en gare de Strasbourg (sur une capacité de 500, soit 60% de remplissage). Il devait donc être probablement assez bien rempli après son arrêt à Nancy. "La SNCF ment tout simplement", s'énerve François Giordani. 
 
Et notre homme n'a pas fini de s'énerver. Il est dans son rôle me direz-vous. " Et que vont faire les voyageurs de Luneville ou Sarrebourg qui prenaient l'Intercités le week-end pour aller à Paris ? Ils devront faire des changements et prendre le TGV. Ce sera beaucoup moins pratique et beaucoup plus cher." Et qui l'eût cru: beaucoup plus long.
 
Fabienne Keller, sénatrice du Bas-Rhin, ne dit pas autre chose. "Ces Intercités desservent aujourd'hui non seulement Strasbourg et Nancy mais également Lunéville, Sarrebourg et Saverne qui ne sont pas desservis par le TGV en provenance de Paris. Dès lors, la suppression de ces Intercités signifie à la fois une augmentation du prix et une rupture de charge nouvelle pour les usagers de ces destinations". Pour conclure son communiqué, elle "regrette profondément cette suppression qui vient réduire la qualité du service tout en augmentant son coût." Et paf.

D'autant qu'avec cette disparition, il n'y aura plus aucun Intercités 100% éco ou pas dans le Grand Est. Le vide total. Voyez plutôt.

Carte Intercites au 1er janvier 2019 by France3Alsace on Scribd

 

Et après ? 


La suite n'est pas vraiment en bonne voie. François Giordani a envoyé plusieurs courriers aux élus locaux. En vain. Seule pour l'instant Fabienne Keller a réagi. La Fnaut demande à la SNCF de maintenir le service jusqu'à ce qu'une solution concertée soit trouvée. Cette dernière pourrait prendre la forme d'un élargissement au week-end des dessertes TER Strasbourg-Nancy-Paris qui circulent du lundi au vendredi et que la Région Grand Est a mis en place en décembre dernier, sur ses deniers. 

" J'ai suggéré cela à la Région pour combler le trou du week-end mais on m'a répondu que sans l'aide de l'Etat cette solution coûterait cher. Ce n'est pas d'actualité. Peut-être en décembre à l'occasion du service annuel 2020, où la SNCF revoit les changements d'horaires, de services ou de dessertes avec ses différents partenaires. La Région pourrait le décider. " C'est le moment de croire au Père Noël.
 
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité