Le bâtiment, qui appartient à la même famille depuis sa construction au début de XIXème, a notamment vu naître la photographe strasbourgeoise Jacqueline Rau. C'est tout un bout de l'histoire de la Petite France qui s'est joué dans cette gigantesque bâtisse.
Qui s'est baladé un jour à la Petite France a pu admirer ce bâtiment aux couleurs pâles et aux interminables rangées de fenêtres. L'immeuble de près 1.400 m², à cheval entre la rue des Moulins et du quai du Woerthel, sera vendu aux enchères le 26 septembre à Paris. Impossible de le voir depuis la rue, mais derrière un épais mur de pierre, un immense et luxuriant jardin prolonge la propriété.
Construit au début de XIXᵉ siècle, il est situé dans un cadre pittoresque et idyllique, sur une fine bande de terre entre deux bras de l'Ill. Aujourd'hui composé de bureaux (au rez-de-chaussée), et de cinq appartements (au premier et au deuxième étage), il était autrefois occupé par la famille May.
Un immeuble du XIXᵉ
C'est Gaspard May qui fit construire l'immeuble en 1817. Il voulait y loger sa famille, après avoir racheté les moulins à proximité. "La maison est restée la propriété de cette famille de brasseurs puis de ses héritiers jusqu'à aujourd'hui", nous apprend le notaire chargé de vente, Emmanuel Volle.
L'une des descendantes de Gaspard May n'est autre que la photographe strasbourgeoise Jacqueline Rau. Dans un livre éponyme consacré à l'artiste, l'auteur, Sylvain Morand, raconte que sa passion pour la photographie lui vient de sa famille. Selon lui, sa mère, Eugénie May, prit plusieurs clichés des moulins en 1897, au moment de leur vente. Elle épousa le nouveau propriétaire, Rodolphe Rau, qui les transforma en Glacières.
La demeure de la photographe Jacqueline Rau
Après leur mariage, ils continuèrent, toujours selon Sylvain Morand, à pratiquer la photographie amateure, et c'est dans cet environnement que grandit Jacqueline Rau. Vers 1916, elle reçut un appareil photo qu'elle ne quittera jamais. Pendant des années, elle exposera un peu partout et sera la seule femme du photo club de Strasbourg.
À part ses expositions et ses voyages, elle vécut la majeure partie de sa vie dans la maison du quai du Woerthel. "Elle y a même laissé des collections de photos et des appareils", informe le notaire Emmanuel Volle.
Après sa mort, en 1994, la propriété a été transmise dans la famille. "Les vendeurs actuels sont les héritiers de Jacqueline, issus de plusieurs branches familiales, dont une aux États-Unis", ajoute Maître Volle.
2,6 millions d'euros
Les enchères sont prévues fin septembre à Paris, mais des visites sont programmées d'ici là, les 7 et 14 septembre. "Toute la communauté immobilière strasbourgeoise m'a appelé", assure le notaire.
"Pas mal de gens se positionnent car c'est un bâtiment emblématique de Strasbourg, situé dans un coin extraordinaire."
Emmanuel Volle, notaire
Mais encore faut-il en avoir les moyens. Les enchères démarrent en effet à 2,6 millions d'euros. Parmi d'autres, le groupe hôtelier Accor serait intéressé, ainsi que Scharf, propriétaire de l'hôtel Régent Petite France, situé juste en face de la maison.
Non loin de là, un autre immeuble, appartenant aux mêmes propriétaires, mais construit dans les années 1920, sera également vendu lors de cette session.