L'un des projets "résidence de journaliste" mis en oeuvre dans l'académie Nancy-Metz, a abouti ce jeudi 20 juin avec le vernissage d'une exposition de photos "portraits de la grande ruralité", réalisée par la classe de 5e A du collège les Etangs à Moussey, dans l'ancienne usine Bata.
Dans l'usine de leurs parents et grand-parents, les élèves de 5e du collège les Etangs (Moussey, 57 770) présentent leur exposition de photos dédiées à la grande ruralité. A l'occasion du vernissage de l'exposition ce jeudi 20 juin, nous avons eu l'occasion de rencontrer des élèves et une équipe pédagogique enthousiastes, et d'échanger avec Sebastien Leban, photoreporter qui a mené le projet et fait découvrir son métier aux collégiens. Comme eux, nous nous sommes laissé toucher par le lieux insolite et les portraits simples, mais poignants, des temoins du paysage social mosellan.
Une experience éducative unique en lorraine
S'écarter du traitement conventionel du programme scolaire, c'est le risque qu'a voulu prendre la DRAC et la DAAC de l'Académie Nancy-Metz, à l'initiative du projet "Résidence de Journalistes".C'est ainsi que trois journalistes radio et deux photoreporters ont mené dans 6 collèges de l'académie (dont deux en moselle) une enquête "mobilisant les publics du territoire" sur le thème de "la frontière" ou bien de la "Grande ruralité".
Au collège Les Etangs, c'est le photoreporter Sébastien Leban qui a été sélectionné pour travailler trois mois avec les élèves et les sensibiliser aux médias, mais pas seulement. Cette expérience entre en effet dans le cadre des projets PES (Parcours éducatif de Santé) du collège, PEAC (Parcours d’Éducation Artistique et Culturelle) et EMI (Éducation aux Médias et à l’Information). Si la sensibilisation aux médias est une priorité nationale, il s'agit aussi pour la principale Madame Djénoui, de « mettre en relief toutes les compétences que les éleves auront assimilés dans un tel projet"
Ces compétences qui feront d’eux des citoyens éclairés, des adultes capables d’avoir de l’empathie et de l'ouverture d'esprit, tout en sachant ce qu’il se passe chez eux.
- Madame Djénoui, principale du collège les Etangs
Les professeurs, du français au sport, ont en effet mis leurs disciplines au service des élèves et de leur enquête: les élèves, pour traiter leur sujet, ont du se prêter à la pluridisciplinarité!
S'appropier de nouveaux outils
Du 14 mars au 20 Juin 2019,Trois mois de dur labeur!
- Sébastien Leban, photoreporter
Pour le photoreporter Sébastien Leban et Manon Walter, étudiante en design à l'ENSAD de Nancy, le défi de faire d'une classe de collégiens des reporters en herbe est de taille. "Permettre aux élèves de s'exprimer, face à un sujet qui leur est tellement familier", c'est leur priorité.
Pour cela, Manon a imaginé une grande frise sur laquelle les élèves, à grands coups de marqueurs et de post-it, peuvent faire un débrief et réflechir aux notions clés du sujet. Les élèves sont ensuite équipés d'appareils photos jetables, et apprennent à s'en servir:
Prendre des selfies à la volée (et à la pelle) est une chose, mais pour saisir son sujet, la photo se prépare, et se retravaille. Etalage, éditing, affinage et enfin mise en scène: chaque cliché doit raconter une histoire. Pour cela, les apprentis-journalistes se renseignent sur leur territoire, mais aussi sur l'usine qui fut le coeur de leur ville jusqu'en 2001: après avoir regardé un documentaire, ils vont eux même sur le terrain visiter les bâtiments, avant d'approfondir le sujet en classe.Aucun élève n'avait eu un appareil photo dans les mains
- Sébastien Leban, photoreporter
Porter un regard nouveau pour dessiner son portrait et celui des autres
La première salle de l'exposition, constituée d'une galerie de portraits photo et d'une description de chacun des élèves rédigée par un autre camarade, annonce la couleur: les collégiens ont appris à porter un oeil exterieur et respectueux sur les autres, comme lorsqu'ils fixent leur objectif sur un sujet. Pour chacun d'entre eux, cela signifie également se confronter à la vision que les autres ont de leur personne.Découvrir l'autre, mais aussi soi-même, c'est en effet tout l'objet de devenir journaliste.
Alors, pour la première fois, ces élèves de Moussey doivent "regarder leur vie comme un sujet à explorer" et adopter un regard nouveau à leur quotidien et leur environnement.
Pour cela, il est demandé aux élèves de revenir sur les lieux qu'ils connaissent et de les cartographier. Mais leurs règles de topographies ne sont pas communes... En effet, ce ne sont sont plus ni des rues, ni des bâtiments qui décrivent ces lieux, mais des sourires, des sentiments et des souvenirs, qui tracent des "cartes sensibles".Le Grand reportage, ça commence en bas de chez toi.
- Sébastien Leban, photoreporter
La grande ruralité au coeur de bataville
Sur les murs de la vieille usine, les vaches et les paysages mosellans ont pris la place des fenêtres.Mais de salle en salle, ce sont biens les portraits, celui d'une ancienne couturière de Bata, d'un pompier ou encore d'un chômeur, qui ont réinvestis les lieux desaffectés. Leurs vies, racontées en toute sobriété par leurs enfants après eux, répondent non seulement à la thématique de la grande ruralité, mais dressent le tableau d'un territoire, celui du paysage mosellans, et en particulier celui de Bataville.
La mise en oeuvre de l'exposition a entre autre permis aux élèves, mais aussi à leurs familles (dont la vie tournait pour une majorité autour de la cité ouvrière), de mettre en perspective un héritage, et de reconquérir un patrimoine commun.
La sortie du collège de l'exposition fut entre autres permise par les associations partenaires du projet, la FAA (Fabrique Autonome des Acteurs) de Bataville et l’association Caranusca, qui oeuvrent justement à faire de l'ancienne manufacture de chaussures, un lieu de creation et d'exposition pour les artistes."Exploiter l'espace de l'usine de bataville est une chance. On a pu faire une vraie scénographie"
- Manon Walter, étudiante en design à l'ENSAD
L'exposition des 5e A, quand à elle, est ouverte tout le Week-end du 22 et 23 Juin de 15h à 18h, puis en visite groupée tout l'été, sur inscription à l'email suivant: fabriqueautonome@gmail.com
Appel aux candidatures
Le projet "résidence d'artiste" fut donc un succès salué par la DRAC, qui sera reconduit l'année prochaine dans l'académie Nancy-Metz, mais aussi étendue au Grand-Est.Un appel à candidature sera bientôt lancée par la DRAC pour les futurs journalistes qui iront en résidence dans les établissements scolaires. Pour eux, c'est également l'occasion de revenir pour se consacrer à un territoire qu'ils connaissent, tout en retrouvant aussi un regard d'enfant.