Alors que le déconfinement approche, la rentrée aussi se profile pour les écoliers champardennais. Pas de dates fixes - tout dépendra des établissements - mais beaucoup d'incertitudes sur le déroulement de la rentrée : les parents d'élèves restent pour beaucoup opposés à une reprise.
Après des semaines d’incertitudes, le retour sur le chemin de l’école se concrétise. S'il y a quelques jours, la rectrice de l’académie de Reims a apporté davantage d’informations, les parents d’élèves interrogés semblent encore dubitatif sur un retour en cours.
D’après une consultation menée par le Grand Reims concernant 88 écoles – à l’exception de celles de la ville de Reims – seul 36 % des élèves du primaire et de maternelles seront envoyés en cours. C’est le résultat qui ressort auprès des 72 % de parents d’élèves qui ont répondu. Leurs retours serviront ensuite de base pour organiser les classes suivant le nombre d’élèves attendus.
« Pour moi, ce n’est pas une surprise », commente la présidente du Grand Reims, Catherine Vautrin. « Comparativement, on reste plutôt au-dessus d’autres grandes communes. » Une priorité pour l’édile : rassurer les parents sur l’importance des mesures sanitaire mises en place. « L’idée qu’on veut mettre en avant, c’est que nous prenons très au sérieux les mesures contres la propagation du Covid. Toutes les précautions sont prises, les établissements seront nettoyés quotidiennement, parfois plus dans les endroits de l’école qui le nécessitent, comme les toilettes. »
À Saint-Dizier, les chiffres sont pires. Au jour de la reprise, il n’y aurait que 27 % des parents d’élèves qui enverraient leurs enfants pour la réouverture des écoles, le 14 mai. « Nous avons constaté un certain décrochage scolaire, malgré l’enseignement à distance, regrette la maire de la commune, Élisabeth Robert-Dehault (LR). Il devenait primordial les élèves retrouvent leurs marques à l’école ».
Doute sur l’efficacité des mesures sanitaires
Pour Louise (le prénom a été modifié), le retour à la normale est un soulagement. C’est ce qu’elle souhaitait au plus vite pour son fils, scolarisé en 5ème à Epernay. « Dès le début, je m’inquiétais pour la qualité de son apprentissage ». En ligne, le suivi des cours n’est pas toujours évident, raconte-t-elle : « Rapidement, on s’est rendu compte qu’avoir une mauvaise connexion allait être un problème. Tout passe par une plateforme en ligne, c’est forcément pénalisant lorsqu’on y a plus difficilement accès. »Au-delà des soucis techniques, l’absence du professeur devient également un enjeu de taille pour Louise. Seul face aux leçons, son garçon se retrouve parfois démuni, se tournant alors naturellement vers ses parents. Et quand ces derniers ne peuvent pas l’aider, tout devient plus compliqué. « On n'est pas à l’aise sur toutes les matières, on ne peut pas toujours l’aider ici à la maison. On se sent un peu démunis. »
Du côté de Sophie, c’est tout l’inverse : « Pour moi, clairement, c’est non. » Mère d’un enfant scolarisé en CE2 à Maizières-la-Grande-Paroisse dans l’Aube, elle reste convaincue que tous les établissements ne seront pas en mesure de prendre le pli des mesures sanitaires. « Dans la pratique, je ne crois pas que ça sera applicable dans notre école. Rien que la distance d’1m50 voulu entre les tables, je n’y crois pas. Ça ne sera juste pas faisable pour des groupes de 15, dans nos salles. »
Malgré son travail, qu’elle exerce en dépit du confinement, elle assure préférer cette solution. « Rien que dans le commerce où je bosse, c’est dur de faire respecter les consignes de sécurité aux clients. Alors convaincre des parents de ne pas créer d’attroupement à la sortie de l’école, je n’y crois pas ». Son mari Jean-Philippe va plus loin : « On n'est pas au clair sur les risques que prennent les enfants. Pour l’instant, je suis d’avis d’attendre, voir même de ne pas reprendre jusqu’à la rentrée de septembre. »
Même craintes pour Mandy, mère d’une petite fille en maternelle, près de Sézanne. « Pour l’instant la rentrée, je ne lui en parle pas. J’attends encore d’en savoir plus sur les conditions de la reprise, j’aviserai ensuite. » Son principal motif de crainte : la disposition des enfants en classe, et surtout le moment fatidique de la récréation : « Ça va être compliqué de leur demander de ne pas jouer ensemble, de ne pas se toucher. Même en limitant les jeux, ce n’est pas facile d’expliquer à un enfant en bas âge de ne pas s’approcher de ses camarades. »
« Toutes les familles ne sont pas égales face au confinement »
Alors, faut-il renvoyer ses enfants à l’école ? Si la question divise chez les parents, elle est aussi clivante au sein de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE). Dans la Fédération de l’Aube, sa représentante Béatrice Bergeron s’y oppose vigoureusement : « Actuellement, nous ne sommes pas favorables au retour en classe avant septembre. » En cause, les nombreux « cafouillages » dans la communication du ministère de l'Éducation nationale, mais aussi la perplexité face aux annonces de précautions sanitaires. « Je reçois beaucoup d’appels de parents inquiets. On ne sait pas comment les établissements arriveront à éviter les risques de transmission. Surtout dans des classes où il est de coutume de s’échanger les feutres, ciseaux ou gommettes. »Moins tranché, le représentant de l’antenne marnaise de la FCPE, Yves Jacquot, s’inquiète d’un confinement des élèves trop prolongé. « Toutes les familles ne sont pas égales face au confinement. Et puis ça crée forcément des lacunes chez les enfants, qui vont y perdre sur leur programme scolaire. Il ne faut pas pour autant que les écoles rouvrent à tout prix. »
Même position, pour Béatrice Lutz, présidente de la Fédération des parents d’élèves de l’enseignement public de la Marne : « Il y a du mieux, les écoles ont finalement davantage de temps pour se préparer. Et puis, on a eu des garanties sur l’équipement des professeurs en masques et en gel. » Un point noir subsiste – que les trois parents engagés relèvent – le flou entourant l’ouvert la cantine. « Nous sommes très attachés à sa réouverture partout où c’est possible, c’est essentielle pour beaucoup de parents », déclare Béatrice Lutz. En la matière, les ouvertures dépendront, là encore, des établissements.
Si pour l’instant l’incertitude règne, les parents de Champagne-Ardenne vont continuer à être consultés par leurs communes. Dès la fin mai, un nouveau questionnaire sera envoyé aux familles du Grand Reims, pour mettre à jour le recensement des élèves présents. Reste à savoir si la fin du chômage partiel dans de nombreux foyers marquera un retour ferme pour les écoliers champardennais.