Coronavirus : pour la réouverture des classes, Troyes et Reims, des cas d'école

En annonçant la réouverture des écoles le 11 mai, le Président de la République et son Premier Ministre ont pris les maires de court. Les écoles et les personnels seront-ils prêts ? Comment garantir la sécurité de tous ? Voici les premières pistes.

C'est un véritable casse-tête. Même si le ministre de l'Education a annoncé un "retour progressif à l'école" ce mardi matin, âge par âge, par petits groupes de 15, l'ensemble reste relativement flou. 
- la semaine du 11 mai : les grandes sections de maternelle, CP et CM2
- la semaine du 18 mai : 6ème et 3ème au collège, les classes de 1ère et terminale au lycée, les ateliers en lycées professionnels
- la semaine du 25 mai : "l'ensemble des classes pourraient rentrer" 

Voilà un calendrier qui laisse un peu plus de temps aux maires pour se retourner. Mais il faut bien l'avouer, les maires ont été surpris et pris de court lorsque le Président de la République, Emmanuel Macron et son Premier Ministre ont annoncé le début du déconfinement pour le 11 mai avec la réouverture des écoles. Les maires ne sont pas prêts. 

 


Quels risques ? 

Il y a à Reims 104 écoles et 15.000 élèves. Chaque établissement a ses particularités. Arnaud Robinet, maire LR de Reims, l'affirme: "je ne prendrai pas le risque d'ouvrir si les conditions de sécurité ne sont pas réunies. Je dois garantir la sécurité des élèves, des personnels de la ville, des parents et la sécurité des enseignants doit être garantie par l'Education Nationale. Ce n'est pas que le problème des masques, qui seront disponibles pour le personnel. Mais c'est tout ce qui est utilisé dans une classe : le matériel, les livres, il faudra tout désinfecter." A cela s'ajoute la problématique des tests. Sur qui devront-ils être pratiqués, avec quelle fréquence? Autant d'interrogations auxquelles ne peut pas répondre le maire de Reims.
 

Chaque école est différente

Le Premier Ministre a évoqué la possibilité d'un dédoublement des classes. Les élèves pourraient ne venir à l'école qu'une semaine sur deux."Celles qui font partie des Réseaux d'Education Prioritaires sont déjà dédoublées, mais pour les autres, il faut tout réorganiser. Il faut aussi qu'il y ait des enseignants disponibles", s'inquiète Arnaud Robinet.

L'organisation va bien au-delà des cours. Depuis des années, la ville de Reims propose aux parents qui travaillent d'accueillir les enfants le matin et le soir. Comment remettre ce service en place ? Même interrogation pour la restauration scolaire ou les activités péri-scolaire. "Pour faire fonctionner ces services, nous faisons appel à des vacataires; il faut aussi garantir leur sécurité", martèle le maire.

Pour le moment, c'est flou. On a besoin du cadre général.
- François Baroin, maire de Troyes


A Troyes, François Baroin a entrepris avec ses services d'estimer combien d'enfants seraient prêts à revenir à l'école : "J'ai demandé aux chefs d'établissements et aux parents qui est pour ou contre. Il s'agit de voir combien d'enfants seraient certains de venir. Il y aura des périodes glissantes. Pour le moment, c'est flou. On a besoin du cadre général." Il y a à Troyes 12 écoles maternelles et 11 écoles élémentaires.
 

Reims comme cas d'école

Arnaud Robinet, maire LR de Reims, travaille depuis plusieurs jours avec le médecin de la collectivité et la direction de l'éducation. Il doit également rencontrer les associations de parents d'élèves. Le temps presse. "Le Premier Ministre a précisé qu'il ferait connaître son plan de déconfinement complet le 5 mai; mais nous on ne peut pas attendre. On doit être prêt."

François Baroin, président de l'association des maires de France, lui-même maire LR de Troyes, comprend les interrogations des édiles. "Beaucoup de maires ne sont pas en situation de rouvrir le 11 mai. Ce n'est pas une question de taille de ville, c'est une question d'organisation et et de peur face à un virus qui va continuer à circuler. C'est bien sûr une des clefs pour un redémarrage économique, mais c'est aussi une des clefs pour la protection sanitaire de la population. Les maires s'interrogent sur la façon de protéger les enfants dans les écoles et sur les garanties sanitaires qu'ils doivent apporter. Ils ne sont pas prêts."
 

Si ce n'est pas possible, je le dirai.
- François Baroin, président de l'association des maires de France

 


Le Premier Ministre a également évoqué la possibilité de rouvrir les écoles par territoire, en commançant par les endroits les moins touchés."A Reims, nous sommes pris en étau entre l'Ile-de-France, l'Alsace et la Lorraine.Nous faisons des simulations pour voir si c'est possible de réouvrir le 11 mai, mais ce ne sera pas simple", reconnait Arnaud Robinet.

Dès la semaine prochaine, il doit transmettre ses propositions à l'AMF et à France Urbaine, l'association des maires des grandes ville."Pour le moment, nous n'avons pas de plan défini. Nous travaillons sur plusieurs scénarii. Mais si ce n'est pas possible, je le dirai," prévient le maire de Reims.

Si ce n'est pas possible, je le dirai.
- Arnaud Robinet, maire de Reims
 

La responsabilité des maires est-elle engagée ?

Les maires n'engagent pas leur responsabilité, dès lors qu'ils obéissent aux directives de l'Etat. "La décision du Conseil d'Etat confirmant l'annulation de la décision du maire de Sceaux de rendre les masques obligatoires a quelque peu réduit les pouvoirs et donc les responsabilités des maires, analyse Olivier Dupéron, politologue et directeur adjoint du centre de recherche Droits et Territoires. C'est une décision qui est plus politique que juridique. Désormais, les décisions des maires ne doivent pas aller à l'encontre de l'efficacité des actions de l'Etat. Cela signifie que l'Etat veut assumer toutes les décisions liées à la crise sanitaire. En cas de recours, la responsabilité reviendra à l'Etat".

Que se passerait-il si des contaminations avaient lieu dans des écoles ? Les malades pourraient-ils se retourner contre l'Etat ? "On peut imaginer que des recours soient constitués devant le tribunal administratif avec des demandes de dommages et intérêts , précise Olivier Dupéron. C'est alors la responsabilité de l'Etat en tant que personne morale qui serait engagée. Cela dit, c'est toujours très difficile à établir. Quant au pénal et à une "mise en danger de la vie d'autrui", c'est inenvisageable."

Les maires ne courraient donc aucun risque de voir leur responsabilité engagée, sauf s'ils n'obéissaient pas. "Le seul reproche qui pourrait leur être fait c'est de ne pas avoir appliqué les consignes", ajoute le politologue.
 
 

C'est à l'Etat de définir le cadre

L'Etat porte la responsabilité, c'est donc à lui d'annoncer ses décisions. Les maires, par le biais de leurs associations, AMF, France Urbaine, vont faire des propositions qui seront transmises au Ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, mais ce ne sera qu'à titre consultatif, rappelle François Baroin: "C'est d'abord au ministre de l'Education nationale de fixer le cadre de cette rentrée souhaitée par le président de la République à partir du 11 mai. On a compris même si ça n'a pas été dit, qu'il fallait que les enfants retournent à l'école pour que les parents puissent travailler. Beaucoup de parents ont peur, beaucoup d'enseignants s'interrogent. Nous sommes au service de l'Etat, dans cadre du protocole que sera défini par l'Education nationale. Nous faisons des propositions, mais nous ne sommes pas au premier rang dans les responsabilités."

Le Premier Ministre a promis son plan de déconfinement pour le 5 mai.

 
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