Charles III à Versailles : le plateau de fromages du dîner royal est composé par un maître-affineur alsacien

A l’occasion de sa première visite officielle en France en tant que roi d’Angleterre, Charles III sera notamment convié à un grand dîner au château de Versailles le mercredi 20 septembre. Les fromages servis lors de ce repas royal ont été sélectionnés par le maître-affineur alsacien Bernard Antony, installé à Vieux-Ferrette (Haut-Rhin).

Le maître-affineur ne cache pas sa fierté. "C’est pour nous un grand privilège d’avoir été choisis par l’Elysée", réalise Bernard Antony, à la veille du grand dîner donné au château de Versailles en l’honneur du roi Charles III dans le cadre de sa première visite officielle en France depuis son accession au trône d’Angleterre.

C’est à 500 kilomètres des grilles du palais, dans des caves de Vieux-Ferrette - petit village du Sundgau (Haut-Rhin) de 676 habitants qu’ont été affinés les fromages qui seront servis au monarque, à la reine Camilla, au président de la République Emmanuel Macron et à leurs 180 convives.

Bernard Antony a sélectionné trois fromages : un pélardon des Cévennes, un comté de grande garde et un stilton – variété de bleu - au lait cru. "On a choisi ces fromages pour leur couleur : le pélardon est d’un joli blanc et le comté présente un blanc ivoire qui va bien avec l’assiette en porcelaine de Sèvres sur laquelle ils seront servis, nous explique le maître-affineur. Quant au stilton, il nous apparaissait évident de présenter un fromage anglais. Nous l’avons fait venir du comté de Nottinghamshire."

Trois spécialités au lait cru. Bernard Antony y tenait, pour rendre hommage au grand défenseur des fromages français qu’est le roi Charles III. Lors d’une précédente visite en 1992 à Paris, celui qui n’était alors que prince de Galles avait prononcé un discours plaidoyer en réponse à la Commission européenne qui souhaitait réglementer leur exportation. "Dans une société bactériologiquement correcte, que deviendront le brie de Meaux, le crottin de Chavignol ou le beu d'Auvergne?", s’interrogeait en français le futur roi.

Dans un avenir libre de microbes et génétiquement programmé, quel espoir reste-t-il pour la Fourme d'Ambert démodée, le gruyère de Comté mal formé ou l'odorant Pont-l'Evêque?

Le prince Charles, en 1992 à Paris.

"C’est peut-être grâce à ce discours (voir un extrait ci-dessous) et à Charles III que le stilton et les fromages au lait cru existent toujours", commente Bernard Antony. Ce plaidoyer a été très important, ça a fait bouger l’image de nos produits, suscitant du respect pour les producteurs artisanaux."

Le "fromager des stars"

Le roi Charles III et la reine Camilla ne seront pas les premières personnalités à déguster les fromages sélectionnés et affinés par Bernard Antony. Avant eux, la reine Elizabeth II en avait elle-même eu l’occasion, lors d’un voyage en France en 1994.

Celui qui était au départ épicier ambulant est aujourd’hui surnommé « le fromager des stars ». Réputé dans le monde entier, il fournit de grandes tables étoilées de par le monde – certains des fromages actuellement dans ses caves doivent être expédiés au Japon. L’Elysée fait partie de ses clients réguliers. Le prince Albert II de Monaco également.  Il y a aussi eu Pierre Perret, Gilbert Montagné ou encore Line Renaud, devenus depuis des amis.

Une notoriété dont « l’éleveur de fromages », comme il se définit lui-même, ne se vante pas. C’est avec beaucoup d’émotion et une pointe d’excitation qu’il se prépare à partir à Paris pour assister au diner royal auquel il est convié avec son fils Jean-François, qui gère l’entreprise avec lui, et sa femme. "L’Elysée a prévu d’envoyer une voiture venir nous chercher à notre hôtel" confie-t-il avec une pointe de fierté.

Il ne sait pas encore s’il aura l’occasion de parler au roi Charles III. Si cela se présente, "je le remercierai à nouveau pour son discours de 1992". Et il lui remettra son livre, "Fromage" (aux éditions Ducasse) "parce que je sais que c'est un véritable amateur".

À Versailles, le pélardon, le comté et le stilton seront servis avec une pointe de gelée de mirabelles. "Une demande de la présidence", nous précise le maître fromager. Une gelée confectionnée à Sierentz (Haut-Rhin) par le chef Laurent Arbeit. Quant au dessert, il sera réalisé par le chef pâtissier-chocolatier Pierre Hermé, originaire de Colmar (Haut-Rhin). L’Alsace sera donc dignement représentée à la table du roi, dans le prestigieux cadre de la galerie des glaces.