"Je dois refuser du monde" : les coiffeurs du sud de l'Alsace manquent de main-d'oeuvre

La corporation des coiffeurs est inquiète dans le secteur des Trois Frontières, dans le sud de la région alsacienne. Depuis plusieurs mois, la profession fait face à un manque de main-d'oeuvre. Salaires plus élevés en Suisse ou en Allemagne, crise des vocations : les raisons sont multiples.

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"J'envoie des gens vers la concurrence et je dois refuser du monde. Ça ne peut pas continuer comme ça, à bosser seule dix à onze heures par jour", se plaint Catherine Weingaessel, gérante d'un salon de coiffure à Hégenheim. En vingt ans de métier, c'est du jamais vu pour cette professionnelle, qui exerce dans la région des Trois Frontières, à quelques hectomètres seulement de la frontière avec la Suisse


"Je suis seule alors que j'ai du travail pour plus de deux personnes"

"Tout récemment, une salariée a changé de crèmerie, et l'autre est en maladie à la suite d'une opération, explique-t-elle. Je me retrouve seule alors que j'ai du travail pour 2,5 personnes." Huit salons du secteur sont à la recherche d’un, voire deux salarié(s), à temps plein ou à temps partiel. Recruter devient compliqué. Et la tendance s'aggrave depuis deux ans.

Il n'y a pas un jour sans que je partage une offre d'emploi
-Véronique Bacher, présidente de la corporation des coiffeurs dans la région des Trois-Frontières

"Il n'y aucun personnel qui se présente, même si Pôle emploi envoie des gens chez nous", ajoute-t-elle. En cause notamment, "le salaire", aux dires de Catherine Weingaessel. Avec 4.000 francs suisses, l'équivalent de près de 3.700 euros nets gagnés par mois du côté de Bâle en Suisse, il devient compliqué de lutter pour les établissements alsaciens, où la paie navigue autour des 1.400 euros mensuels. 

Cependant, que les salaires soient meilleurs en Suisse ou en Allemagne, ça ne date pas d'hier. Si, dans ce secteur, ce paramètre amplifie la fuite des professionnels, le métier souffre aussi d'une crise des vocations, d'après Véronique Bacher, qui tient son salon à Saint-Louis.


Un métier qui n'est pas valorisé

"Tout le monde n’est pas bilingue. Le problème, c’est surtout qu’on pousse les jeunes à faire des études, constate-t-elle. L'apprentissage, dans la tête des gens, c'est pour les jeunes qui sont en échec scolaire. On ne valorise pas ces métiers, dont celui de coiffeur. C'est dramatique."

Si la présidente de la corporation évoque "un beau métier", la profession présente aussi son lot de contraintes, ce qui freine en particulier les jeunes. "Les jeunes ne veulent plus travailler le samedi matin, renchérit Catherine Weingaessel. Souvent aussi, les gens vident leur sac chez le coiffeur, et les jeunes n'ont plus envie de s'embêter. Sauf qu'on peut aussi passer de bons moments et que certains clients sont aussi très joyeux."

Un cri du coeur, entre un shampoing et deux coups de ciseaux, qu'on n'entend que rarement de la part des coiffeurs, au contraire par exemple du secteur de l'hôtellerie restauration, souvent cité lorsqu'il s'agit d'évoquer la pénurie de main-d'oeuvre.
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