La desserte ferroviaire de l'EuroAirport Bâle-Mulhouse devrait voir le jour possible dès 2034. Le comité de pilotage du projet a validé le budget, malgré une très forte augmentation des coûts. Car sa création s'inscrit dans un projet tri-national bien plus vaste.
Actuellement, pour atteindre l'EuroAirport Bâle-Mulhouse en transports en commun, il faut se rendre en train jusqu'à la gare de Saint-Louis (Haut-Rhin), puis prendre une navette de bus pour les derniers kilomètres. D'ici à une dizaine d'années, on pourra y accéder directement en train, en 15 minutes depuis Mulhouse, et en 10 minutes depuis Bâle.
Ce chantier d'une dérivation de 6 km de long depuis la voie ferrée Bâle-Mulhouse était dans les limbes depuis des années. Il peut enfin entrer dans une phase plus active. En effet, son comité de pilotage transfrontalier, présidé par la préfète de la région Grand Est, Josiane Chevalier, a validé les études d'avant-projet, et surtout l'accord de principe sur le financement global, malgré la prévision d'un surcoût assez conséquent.
"C'est une satisfaction pour la région, et pour la zone transfrontalière" se réjouit Christian Debève, conseiller régional et président de l'association EAP Express, qui réunit depuis 2010 des collectivités publiques françaises, allemandes et suisses concernées par ce projet. "Les financeurs ont trouvé un accord. Quand il y a un surcoût, il faut que tous les partenaires continuent, sinon le projet s'arrête."
Un projet bien plus large incluant un RER
D'ici à une dizaine d'années, selon les estimations, un tiers des passagers de l'EuroAirport s'y rendront donc en train. La nouvelle desserte sera aussi destinée aux salariés de l'aéroport, "environ 6 000 personnes, la plus grosse zone en personnel du Haut-Rhin, rappelle Christian Debève. Ils vont pouvoir, eux aussi, profiter d'une offre ferroviaire pour venir travailler dans des conditions de confort très agréables."
Mais le bénéfice, à terme, sera encore bien plus important. Car cette demi-douzaine de kilomètres de rails supplémentaires ne constitue qu'un maillon d'un chantier beaucoup plus vaste : celui du futur RER de Bâle, dont l'une des branches se dirigera aussi vers l'Euroairport, côté suisse. Un projet destiné à modifier en profondeur la mobilité de cette région tri-nationale.
"Nos amis et partenaires allemands et suisses s'organisent pour l'horizon 2035 à 2050 pour mettre tout le circuit de mobilité à niveau, explique le président d'EAP express. Et nous, de l'autre côté de la frontière, on avait le choix, au propre comme au figuré, de regarder passer les trains, ou d'être acteurs de cette nouvelle organisation ferroviaire. Ça va changer la vie d'un certain nombre de personnes, dont les 35 000 frontaliers qui subissent les horaires pendulaires et les bouchons."
On avait le choix, au propre comme au figuré, de regarder passer les trains, ou d'être acteurs de cette nouvelle organisation ferroviaire.
Christian Debève
"Il y a aussi un projet de service express métropolitain autour de Mulhouse, ajoute Thibaud Philipps, vice-président de la région Grand Est en charge des transports. En connectant les deux, ça permettra de densifier l'offre et d'avoir une meilleure desserte dans tout le secteur."
Un budget pratiquement doublé
Le financement de la future desserte de l'aéroport depuis la ligne ferroviaire Bâle-Mulhouse, réévalué et récemment validé, est passé des 250 millions d'euros prévus en 2018 à 475 millions à l'horizon 2035, soit quasiment le double.
Ceci s'explique par deux facteurs bien distincts. "L'augmentation du budget est surtout liée au dispositif d'inflation, précise Thibaud Philipps. Des clés de recalcul ont été mises en œuvre pour prendre en compte les futures inflations." Même si, de son côté, Christian Debève préfère nuancer : "C'est une projection, car on est partis sur des bases d'inflation forte. Or actuellement l'inflation se réduit, donc il y aura probablement une diminution des coûts", espère-t-il.
La seconde explication, c'est que ce budget englobe bon nombre de travaux complémentaires. Outre la nouvelle liaison ferroviaire, "il y aura aussi tout un tas d'améliorations pour le réseau existant, détaille le vice-président de la région Grand Est. Notamment une refonte complète de la gare de Saint-Louis, qui va vraiment bénéficier d'un réaménagement complet et d'une rénovation de ses quais […]. Il y a pas mal d'éléments qui viennent en faire un projet plus cher."
Heureusement, les financeurs sont nombreux. La Suisse, à hauteur de 151 millions d'euros, sera le plus gros contributeur, car les Helvètes représentent la moitié des usagers de l'Euroairport. "La France participe aussi de façon importante, Etat, Région et autres collectivités", précise encore Thibaud Philipps. L'Allemagne mettra également la main au porte-monnaie, ainsi que, vraisemblablement, l'Union européenne, "auprès de laquelle l'Etat français a déposé un dossier." Et l'aéroport lui-même prendra en charge un certain nombre d'investissements, pour reconfigurer le terminal et le parvis d'accueil.
Les acquisitions foncières, préalables au chantier de construction de la desserte ferroviaire, devraient débuter prochainement. Les travaux proprement dit devraient commencer d'ici à la fin de cette décennie, pour une date limite à l'horizon 2034-2035 pour la mise en service.