L'association des riverains de l'aéroport de Bâle-Mulhouse a saisi le président de la République d’une demande d’application de la législation européenne en matière de lutte contre le bruit. Les propositions de l'EuroAirport sont jugées insuffisantes et inopérantes par les riverains.
En matière de lutte contre le bruit, les riverains de l'aéroport de Bâle-Mulhouse estiment ne pas avoir été entendus, jusqu'à présent. L'association des riverains de l'aéroport (l'ADRA), par la voix de son président, Bruno Wollenschneider, se dit obligée de recourir, aujourd'hui, à des moyens juridiques. Sous l’égide de l’Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA), l'association a saisi tout récemment le président de la République et le Premier ministre d’une demande d’application de la législation européenne en matière de lutte contre le bruit. "On espère que l’Etat se réveillera et qu’il finira par se rendre compte de ses obligations", justifie Bruno Wollenschneider, la saisine ayant pour but de faire appliquer la loi par le législateur.
La loi dont il est question est un règlement de l'Union européenne, connue sous le nom de "règlement UE 598/2014", appliquée depuis 2016. Elle impose aux aéroports des Etats membres, où sont opérés plus de 50.000 mouvements d’aéronefs de plus de 34 tonnes par an, de réaliser une étude d’approche équilibrée en vue de réduire les nuisances sonores. Neuf aéroports en France sont concernés dont celui de Bâle-Mulhouse.
Réduire les nuisances, selon la direction de l'EuroAirport
L'EuropAirport a rendu sa copie. Elle est consultable en ligne sur le site de la préfecture du Haut-Rhin dans sa version intégrale (305 pages) ou en version abrégée (13 pages). Le conseil d’administration de l’aéroport prétend faire de la réduction des nuisances une priorité, dans un objectif de développement durable. La procédure, menant à des effets concrets, doit aboutir d'ici un an, en 2022. C'est la DGAC (direction générale de l'aviation civile) qui est chargée de porter le résultat de l'étude auprès de la Commission européenne. Un arrêté ministériel devra permettre la mise en place des restrictions d'exploitation conduisant aux réductions du bruit.
Plusieurs scénarios ont été présentés dans cette étude. Le scénario retenu par la direction de l'EuroAirport va plutôt dans le sens d’une interdiction des décollages programmés pour les vols commerciaux entre 23 h et minuit ainsi que l’interdiction de décollage et d’atterrissage pour les avions les plus bruyants entre 22 h et 6 h. Ce report des départs programmés impliquerait, selon la direction, le report de 1.442 mouvements d’avions par an pour un gain de six à onze décibels.
Le bruit augmente d'année en année
Insuffisant selon l'ADRA. Pour être efficaces, les mesures de réduction des nuisances sonores doivent imposer l'arrêt des vols, y compris les vols de fret, de 23 heures à 6 heures. Ce qui ne serait pas économiquement viable, selon la direction de l'EuroAirport. "Les mesures proposées par l'aéroport de Bâle-Mulhouse ne font pas baisser les nuisances. Elles sont insuffisantes et inopérantes. Nous demandons un repos nocturne intégral", souligne le président de l'ADRA qui ajoute que les plans de prévention de bruit dans l’environnement (PPBE), présentés précédemment par l'EuroAirport n'ont pas fait baisser le bruit, "pire, en 2019 le bruit a augmenté et surtout de nuit avec les vols de fret qui sont très bruyants".
Des défaillances pointées par l'ADRA
De plus, l'ADRA pointe plusieurs défaillances dans l'élaboration de l'étude d'approche équilibrée:
- le non respect des délais. L’étude a été réalisée avec quatre années de retard à Bâle-Mulhouse (pas du tout dans les autres aéroports français) ;
- les cartes stratégiques de bruit, nécessaires pour identifier un dépassement des valeurs limites de bruit, n’ont pas été révisées et publiées ;
- le choix de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) pour mener les études, est contestable car l'organisme est juge et partie.
Trois mois de consultation publique
Une consultation publique a été mise en place jusqu’au 11 mai, dans trois pays simultanément, France, Allemagne et Suisse. Chacun peut y accéder, sur place à la mairie de Saint-Louis, sur rendez-vous, ou en ligne sur le site du ministère de la Transition écologique. Sur ce point, Bruno Wollenschneider est plutôt pessimiste: "L'Etat s'assoit sur les enquêtes publiques à 99%".
Pour conclure le président de l'ADRA ne voit plus que le recours juridique pour faire entendre la voix des riverains. Si le gouvernement ne répond pas à la saisine d’ici deux mois, l'association fera un recours devant le Conseil d’Etat.