Pourquoi les médecins libéraux sont en grève jeudi 1er et vendredi 2 décembre

Bon nombre de cabinets de médecins libéraux, et notamment de généralistes, seront fermés les 1er et 2 décembre 2022. En cause : un mouvement de grève pour dénoncer un mal-être profond et multifactoriel. Explication de l'un des membres du collectif "Médecin pour demain".

Mieux vaut éviter de tomber malade ces deux prochains jours : de nombreux médecins généralistes et libéraux n‘ouvriront pas leur cabinet. Engagés dans un bras de fer avec la Sécurité sociale, ils veulent faire entendre leur colère et leur mal-être qui conduisent même certains à "déplaquer", autrement dit à faire autre chose.

Julien Rogowski a 30 ans. Il est médecin généraliste remplaçant dans le secteur des Trois frontières (Haut-Rhin). Ce qu’il vit depuis 3 ans qu’il exerce et ce qu’il voit des médecins qu’il remplace l’ont conduit à rejoindre le collectif Médecins pour Demain qui rassemble plus de 14.000 membres sur Facebook.

Il fera partie des grévistes ce jeudi 1er et vendredi 2 décembre 2022. Selon lui, 45% des médecins généralistes sont en burn-out. Le taux de suicide dans la profession serait trois fois supérieur que dans le reste de la population. Il nous explique les trois principales raisons de la colère.

La surcharge administrative

"Aujourd’hui, un médecin généraliste passe en moyenne entre une et une heure et demie par jour à remplir de la paperasse, des protocoles, des formulaires. On pourrait, à la place, voir six patients. Rien n’est fait pour nous simplifier la vie.

A cela se rajoute la multiplication des certificats : pour le sport, pour la crèche, pour des chaussures de travail et même pour jouer aux échecs ! A chaque fois, c‘est un rendez-vous, un papier à fournir et du temps en moins pour s’occuper des patients.

Idem pour les arrêts de travail court. Un patient qui a une gastro et qui a besoin de se reposer un ou deux jours doit évidemment fournir un arrêt de travail à son employeur. Ne pourrait-on pas imaginer un système de délivrance d’arrêt de travail court sur une déclaration de bonne foi comme il en avait été imaginé à l’époque du Covid ?"

Une perte de sens

"On voudrait déléguer les tâches administratives pour se recentrer sur nos tâches médicales. Or, la CNAM et l’ARS nous demandent exactement l’inverse. Les pharmaciens, les kinés ou les infirmières se retrouvent à faire ce que l’on faisait avant. On devient des médecins de second recours, alors qu’on était des médecins de premier recours.

Il y a une vraie souffrance liée à cette perte de sens du métier. Je le vois lorsque je fais des remplacements : les médecins sont exténués et moi, au bout de seulement 15 jours, je suis soulagé de rendre le cabinet".

Un manque de moyens

"La consultation de base est facturée 25 euros mais si on ajoute les différents actes (pose d’implants contraceptifs, électrocardiogramme ou prélèvement) et le forfait de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie, il serait plus juste de dire que nous touchons 35 euros. Ce que nous demandons, c’est une revalorisation à 50 euros.

Nos voisins allemands gagnent 75 euros par consultation, ce qui leur permet d’avoir une secrétaire et parfois même une assistante médicale. Il faut savoir qu’en Suisse ou en Allemagne, nos homologues emploient en moyenne 2,4 équivalent à temps plein. Nous, on arrive péniblement à 0,2.

Avoir du personnel en soutien, c’est moins de stress pour le médecin, plus de temps et d’attention pour le patient. L’enjeu va bien au-delà d’un contexte de travail apaisé. Il en va de l’avenir de la médecine générale. Actuellement, seulement 40% des jeunes internes s’installent à l’issue de leurs études. Les 60% restant choisissent d’être salariés, partent à l’étranger ou font carrément autre chose ! Il faut leur donner envie d’avoir envie".

La manifestation organisée par le collectif "Médecins pour demain" se déroulera le jeudi 1er décembre à 14h devant le siège de l’Agence régionale de santé du Grand Est à Nancy.

Le vendredi 2 décembre, les médecins manifestant qui ont rejoint le collectif prévoient d’aller donner leur sang dans les différentes maisons du don. Une manière différente mais active de prendre soin des autres."

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