Confinement : une Française résidant en Allemagne refoulée à la frontière et obligée de passer la nuit sur un parking

Depuis deux ans, Sylvie fait des allers-retours entre son domicile allemand (Weil-am-Rhein) et son lieu de travail à Saint-Louis (Haut-Rhin). Jamais elle n’a eu de problème. Sauf mardi 28 avril où les policiers allemands lui ont refusé l’accès pour un problème administratif.

Les faits remontent au mardi 28 avril. Il est 21 heures quand Sylvie S.* quitte l’entreprise EMI de Saint-Louis (Haut-Rhin) où elle est employée par intérim. Vers 21h25, elle arrive au poste frontière Palmrain pour rentrer chez elle, à Weil-am-Rhein. A sa grande surprise, les deux policiers allemands qui la contrôlent lui interdisent de passer. Elle pense pourtant avoir tous les papiers nécessaires : l’attestation de son employeur et aussi l’attestation de domicile de son compagnon français chez qui elle vit depuis deux ans.
 
C’est la première fois depuis le début du confinement et la mise en place des contrôles temporaires (le 16 mars) qu’on lui interdit le passage. Sylvie parle peu l’allemand mais comprend qu’elle doit être mariée pour que l’attestation de son compagnon soit valable. Malgré son insistance et sa bonne foi, les policiers restent fermes et lui disent de se rendre à l’adresse indiquée sur sa carte d’identité, en Isère…à 500 kilomètres de là. Elle y possède effectivement un logement où vivent ses grands enfants. Désabusée, la conductrice se gare sur le parking d’à-côté. Comble de malchance, Sylvie a oublié son téléphone à la maison et ne peut pas prévenir son compagnon.


Main courante

Sylvie se rend une première fois à la police municipale de Saint-Louis pour porter plainte contre les deux policiers allemands. Aucun fonctionnaire ne peut la recevoir. Elle s’en va donc dormir dans sa voiture, sur le parking de Palmrain. "Dormir, un bien grand mot…", nous raconte-t-elle. Toute la nuit, elle observe le ballet des voitures, et toutes passent sans exception la frontière. "Même une trottinette." Elle ne comprend pas pourquoi "le sort s’est acharné" contre elle.

Elle se met à fouiller tout l'habitacle pour retrouver le numéro de téléphone de son compagnon. Les policiers allemands acceptent de l'appeler. Il arrive un peu plus tard avec quelques affaires pour Sylvie et son téléphone portable mais doit vite s'éclipser pour aller travailler. A l’aube, elle retourne au commissariat y déposer sa main courante.

"Les policiers français ont appelé l’ambassade de France en Allemagne, nous explique Sylvie. Ils sont au top, vraiment compréhensifs. Depuis, ils m’appellent tous les deux jours pour savoir si j’ai encore eu des problèmes à la frontière." L’accueil des policiers français a été réconfortant. Mais au petit matin, fatiguée et à bout de nerf, Sylvie se filme sur son téléphone pour ne pas oublier sa mauvaise expérience.
  

Sylvie est-elle dans son bon droit ?

Pour comprendre pourquoi Sylvie S. a été refoulée à la frontière, nous avons contacté la police fédérale qui gère les frontières, la Bundespolizei de Weil-am-Rhein. L’institution soutient ses fonctionnaires.

Le collègue qui a contrôlé cette dame a appliqué la loi, il a agi correctement. Si cette personne n’a pas de lieu de résidence en Allemagne, elle n’a pas à pénétrer sur le sol allemand. En Allemagne, il y a une obligation d’inscription à la mairie appelée "Meldepflicht" dès qu’on déménage dans une commune. Elle a eu de la chance si les autres policiers l’ont laissée passer le reste du temps, estime la Bundespolizei.


Effectivement, Sylvie ignorait qu’elle devait s’inscrire à la mairie en vivant en concubinage dans l’appartement de son compagnon. Elle s’est empressée de régulariser sa situation. Elle devrait avoir le tampon de la mairie de Wei-am-Rhein sur le bail de son compagnon la semaine prochaine. En attendant, elle a demandé une attestation à la propriétaire de l’appartement de son compagnon. Et tremble encore quand elle doit passer la frontière.

"Toute la semaine, j’étais anxieuse et je me demandais si la police me laisserait passer. Cette histoire m’a beaucoup stressée. Je n’arrive pas à la digérer", nous dit Sylvie encore sous le choc. Une expérience traumatisante pour cette travailleuse frontalière qui n’oubliera pas sa nuit passée sur un parking pour un papier qu’elle ignorait devoir posséder. Les policiers très (trop?) zélés n’ont fait preuve d’aucune mansuétude et ont strictement appliqué la loi. Sylvie aura bientôt son tampon, un précieux sésame. On ne l’y prendra plus.

*Sylvie préfère ne pas donner son nom de famille.
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