Une plainte a été déposée contre l'Ehpad de Kembs (Haut-Rhin) par la fille d'une résidente pour mise en danger d'autrui. Elle dénonce des conditions de vie indignes dont serait victime sa mère, atteinte d'Alzheimer, et met en cause la direction pour sa gestion du personnel.
Elle ne décolère pas et n'a pas de mots assez durs pour qualifier la façon dont serait traitée sa mère au sein de l'Ehpad Les fontaines de Kembs dans le Haut-Rhin. Françoise (prénom modifié) n'a eu d'autre choix que de placer sa mère, âgée de 74 ans et atteinte d'Alzheimer, en hébergement médicalisé après avoir tenté, vainement, de la garder à la maison.
Presque un an plus tard, elle déchante. Au point de s'en remettre à la justice en allant porter plainte auprès de la gendarmerie de Sierentz pour mise en danger d'autrui le lundi 12 juin 2023.
Après enquête, la plainte sera transmise à la procureure du tribunal judiciaire de Mulhouse, s'il y a lieu. Il y est question d'un certain nombre de faits que rapporte la plaignante concernant sa mère, placée en UVP (unité de vie rapprochée).
De l'urine et des excréments coulaient le long de ses jambes.
Françoise, la fille d'une résidente
Contactée par téléphone, Françoise parle d'irrégularités et de problèmes d'hygiène. "Un matin, je suis venue voir ma mère. Il y avait des excréments sur les murs, sur le sol et sur son fauteuil". Quelques jours plus tard, après avoir signalé le fait à la directrice, elle retrouve sa mère "avec de l'urine et des excréments qui coulaient le long de ses jambes". Elle constate à plusieurs reprises que sa couette est pleine d'excréments et qu'elle n'est pas nettoyée.
Françoise évoque aussi ce jour où elle lui découvre un énorme hématome au niveau de la fesse gauche. "Elle n'arrivait plus à s'asseoir, mais personne n'a rien vu". De ce matin également où, ayant pris la température de sa mère, elle constate qu'elle a de la fièvre. Françoise fait alors appel au médecin de la maison de santé de Bartenheim qui lui prescrit alors rapidement des antibiotiques.
Il y a eu des démissions en cascade et la direction n'en a rien à faire.
Françoise
Depuis son placement en août 2022 à l'Ehpad de Kembs, sa mère aurait perdu treize kilos. Malgré tous ces faits accablants, Françoise n'en veut pas au personnel soignant. "Les filles font tout ce qu'elles peuvent, mais il y a eu des démissions en cascade et la direction n'en a rien à faire". C'est la directrice et sa gestion du personnel, qui serait la cause, selon elle, des départs successifs d'un certain nombre d'employés. "L'infirmière référente, l'ergothérapeute, la psychomotricienne sont parties sans être remplacées. Il n'y a plus qu'une aide-soignante de nuit pour trente résidents en UVP", déplore Françoise.
Un manque de personnel que Françoise tient pour responsable de l'agression dont aurait été victime sa mère de la part d'un autre résident début juin. Transportée à l'hôpital de Mulhouse, la femme de 74 ans souffrirait d'une fracture du col du fémur. "Ils vont la reprendre jeudi [le 15 juin] à l'Ehpad, mais on va voir quel va être le suivi", s'inquiète Françoise.
La directrice apporte son explication
Faute d'être entendue par la direction, la plaignante a donc décidé de porter devant la justice ce qu'elle a observé dans cet établissement. "Je n'ai jamais pu m'entretenir avec la directrice". Directrice qui, elle aussi, a démissionné. Depuis le 1er juin, sa remplaçante vient deux fois par semaine sur site.
Contactée par France 3 Alsace, cette dernière explique que la pathologie dont souffre la mère est compliquée à gérer. "Cette maladie est difficile à accepter de la part des familles. Elle [la fille] a d'ailleurs rappelé le médecin en chef du service ce matin pour s'excuser". Ce qui est vrai, mais, précise l'intéressée, "pour mon attitude envers le médecin, j'étais très énervée, et non sur les faits rapportés lors de mon audition auprès des gendarmes".
La directrice, "pas plus inquiète que ça", fait savoir que l'établissement a tous les éléments de réponses pour faire face, s'il le faut, à la justice.