L'association Trans Rhin Rail, qui milite pour la remise en service aux voyageurs de la ligne ferroviaire entre Colmar et Fribourg-en-Brisgau, en Allemagne, fête ses dix ans. L'occasion de faire le point sur l'avancée du projet, qui pourrait voir le jour à la fin de la décennie.
Depuis plusieurs années, la réouverture d'une ligne de chemin de fer reliant Colmar et Fribourg-en-Brisgau, en Allemagne, est l'un des projets qui anime la frontière franco-allemande. Ce samedi 29 janvier, l'association Trans Rhin Rail, favorable au retour d'un train entre les deux villes, fêtait ses dix ans.
Pour son président Patrick Kerber, rouvrir cette ligne fermée depuis la destruction du pont au-dessus du Rhin en 1945 (et jamais reconstruit) répond d'abord à une demande : "Il pourrait y avoir 5.000 usagers par jour. Quand on sait que 15.000 véhicules traversent le pont routier quotidiennement, le projet a une vraie portée écologique."
En ce début d'année 2022, une étude lancée par SNCF Réseau et DB Netz est en cours. Elle doit aborder plusieurs volets socio-économiques, techniques mais aussi très pratiques : Faut-il construire un nouveau pont, ou emprunter celui déjà existant et construire un autre pont routier ? La ligne doit-elle desservir les villages entre Colmar et la frontière ou bien seulement Colmar et Fribourg ?
À ce sujet, Patrick Kerber a son opinion : "Nous préférons la création d'une 'ligne fine', qui dessert les villages, comme ceux de Sundhoffen, Wolfgantzen, Neuf-Brisach et Volgelsheim. C'est important d'impliquer les territoires ruraux dans ce projet."
Côté allemand, une ligne existe entre Breisach (Vieux-Brisach en français) et Fribourg. Entièrement électrifiée en 2020, elle propose des trains toutes les demi-heures et dessert plusieurs villages (voir carte ci-dessous). En France, la ligne 120, qui relie Colmar à Neuf-Brisach nécessite de nombreux travaux. Fermée aux voyageurs depuis 1969, elle est exclusivement desservie par le fret et n'est pas électrifiée.
L'étude doit rendre ses conclusions à la fin de l'année. Si le projet est retenu, une enquête publique est prévue. D'ici-là, les discussions entre Français et Allemands continuent, et les pro-train peuvent compter sur un soutien de poids : celui de Brigitte Klinkert, présidente du conseil départementale du Haut-Rhin de 2017 à 2020, et actuellement ministre déléguée à l'Insertion.
Présente pour les dix ans de Trans Rhin Rail à Vogelgrun (Haut-Rhin), elle a regretté l'attitude de l'Allemagne, qui n'a toujours pas demandé l'inscription du projet dans le réseau transeuropéen de transport (RTE-T). Ce programme de l'Union européenne doit faciliter les connexions entre les pays européens, et une demande de subvention doit être faite par deux pays. Chose que la France a faite, sans son voisin.
Un projet entre 250 et 275 millions d'euros
"J'ai cru jusqu'à ces derniers jours que l'Allemagne demanderait cette subvention européenne. Malheureusement, ce n'est pas le cas", a-t-elle constaté devant les caméras de la SWR. Pourtant, les élus du Bade-Wurtemberg soutiennent le projet, à l'image de Klaus Schüle, qui dirige le service de la coopération transfrontalière et des affaires européennes auprès du Land. L'élu de la CDU est l'interlocuteur privilégié de Brigitte Klinkert sur ce dossier.
Car, comme le résume Patrick Kerber : "le nerf de la guerre, c'est le financement". L'étude en cours permettra d'affiner ce montant, mais le coût du projet est estimé entre 250 et 275 millions d'euros. Cette somme sera répartie entre la France et l'Allemagne, et pourrait être amortie par la subvention de l'Union européenne.
Le projet est sur de bons rails, donc. Et si les conclusions de l'étude sont positives, le premier train pourrait rallier Colmar et Fribourg aux alentours de 2030 : "On espère que pour les vingt ans de l'association, la ligne sera mise en service", sourit Patrick Kerber. Brigitte Klinkert se veut encore plus confiante, et table sur 2028.